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Histoire de Timur-Bec - I


Auteur :
Éditeur : Robert-Marc d’Espilly Date & Lieu : 1722, Paris
Préface : Pages : 472
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 105x165 mm
Code FIKP : Liv. Fr.Thème : Histoire

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Histoire de Timur-Bec - I


Histoire de Timur-Bec - I

Cherefeddin Ali

Robert-Marc d’Espilly

Du sultan Cazan, Grand Can de Zagataï ; sa défaite & sa mort. Mir Cazagan Prince Turc prend en main le gouvernement de l’Empir, &établit un Grand Can ; Guerre de Mir Cazagan contre Malek Hussein Prince de Herat.

L’an de l’Hegire 733, le sultan Cazan, a fils d’Isour Aglen, descendant de Genghiz Can, monta sur le Thrône des Cans en Zagataï, (C’est-à-dire, la Il est le 21e des successeurs de Zagataï Can, dans le Pays qui fut donné en partage à Zagataï Can par son père Genghiz. Can.)a Mais ce Prince naturellement enclin à la tyrannie, poussa sa violence & son injustice si loin, que les Peuples en furent réduits au désespoir.

Sa tyrannie avait tellement intimidé tout le monde, que quand il envoyait ordre aux Princes qui étaient de sa dépendance, de se retrouver quelque part, & surtout aux Assemblées d'Etats, qu'il faisait tenir, ils étaient si peu sur de leurs vies, qu'ils faisaient ordinairement leur Testament avant que d'y aller.

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PREFACE DE L’AUTEUR

Au nom de Dieu (a), dont la bonté & la justice s'étendent sur tous les Etres, c'est lui qui dispose des Couronnes comme il lui plaît, & qui accorde les Victoires à ceux qu'il reconnaît les plus propres à accomplir ses volontés éternelles ; c'cst lui qui soutient & élevé continuellement le Mahometisme , pour l'accroissement de fa gloire, & il est certain qu'une fortune élevée de sa main , est inébranlable , & résiste sans peine à tous les événements qui tendent à la détruire. Telle fut celle du grand & invincible Timur ; dont nous entreprenons l'Histoire. Le Lecteur ne fera point surpris de ses actions héroïques, qui l'ont élevé à la suprême dignité d'Empereur Tartare, & lui ont assujetti toute l'Asie, depuis les frontières de la Chine jusqu'à celles de la Grèce, c'est-à - dire, les pays de Turquie, de Tartarie, de Perse, des Indes, & de Syrie ; lorsqu'il connaîtra les qualités sublimes dont ce Prince était doué. Il était très pieux & très-religieux observateur de fa loi, qui était la Mahometane. Il était fi prudent qu'il a toujours gouverné son Etat par lui-même, sans se servir du secours d'un premier Ministre; & il a réuni dans toutes ses entreprises, aussi n'avoient elles pour but que la gloire de Dieu, l'accroissement de la Religion, & le bien des peuples. Il était fort libéral & bien faisant à tout le monde, excepté à ceux qui refusaient de lui obéir, qu'il châtiait avec la dernière rigueur aussi n'en a-t-il pas laissé un seul impuni. Il aimait fort la justice, & jamais on n'a exercé impunément dans son Empire aucune vexation, ni aucune tyrannie. Il estimait les Sciences & les Savanes, & sa grande application a toujours été de faire fleurir les Arts dans tout son Empire. Il a fait voir sa grandeur d'âme en tant d'occasions, qu'il est inutile d'en parler ici. Pour sa bravoure , elle n'a point démenti la Noblesse de ses ancêtres, qui. ont tous été Rois ou Princes -, & cet Ouvrage est un tissu des preuves incontestables qu'il en a données. Il était de plus entreprenant, hardi , également capable de former un grand dessein avec sagesse, & de l'exécuter avec vigueur. gueur. Il était rempli de tendresse pour sa famille Impériale, & pour ses familiers & ses domestiques ; il était très-charitable envers les pauvres & les affligés j il a fait pendant fa vie de très grandes aumônes, il a fait bâtir des Hôpitaux, des Convens de Derviches, & un très-grand nombre de Mosquées. Enfin l'on peut dire que rien ne manquait à ce Prince pour le rendre digne de la gloire à laquelle Dieu l'a élevé.

Timur eut pour père le sage & vertueux Prince Emir Tragaï, & pour mère la charte & belle Tekine Catun, femme légitime de l'Emir Tragaï (b). Il naquit dans le Bourg de Sebz, fitué hors l'enceinte des murs de la delicieufe Ville de Kech (c) Capitale de l'Etat dudit Emir, la nuit d'un mardy cinquième de Chaban, de l'an de l'Hegire 736 qui se rapporte à l'an de la A G./ Souris du Calendrier Mogol, sous le règne du Sultan Cazan, Roi de Tranfoxiane & 1836 / de Turkestan.

La naissance de nôtre Prince avait été prédite à Cachouli Behader l'un de ses aïeux, par un songe qu'il eut, où il lui paraissait que huit étoiles étant sorties de lui, la huitième jetait une splendeur si grande, qu'elle éclairait les quatre parties du monde ; ce que Toumené Can, père de Cachouli, expliqua qu'un Prince de sa race qui naîtrait à la huitième génération, remplirait le monde de l'éclat de ses vertus & de ses conquêtes.

L'Horoscope de Timur, qui fut tirée au moment de sa naissance, lui prédît la Couronne &. L’Empire, toutes fortes de prospérités, & une très-belle & nombreuse lignée.

Ce Prince fît connaître dès ses plus tendres années les excellentes dispositions qu'il avait à accomplir les prédictions de son horoscope, car dès qu'il eut atteint l'âge de raison, on remarquaient dans toutes ses actions quelque chose qui marquait un air de Souveraineté; il ne parlait jamais que de Trônes & de Couronnes ; ses jeux favoris représentaient l'Art militaire; il disposait des jeunes enfants qu'on élevait auprès de lui, - comme un Prince dispose de ses sujets ; il élevait aux dignités ceux qui lui paraissaient plus remplis de mérite, & n'accordait aux autres que le titre de soldat. Il faisait des figures avec des cannes, & les supposant être des ennemis, il leur faisait courir sus par ses troupes, parmi lesquelles il faisait observer les règles de la discipline militaire, avec la dernière rigueur.

Quand il fut parvenu à un, âge un peu plus fort , & qu'il fut plus en état de s'appliquer aux exercices du corps, loin de choisir ceux qui plaisent le plus aux jeunes gens, comme la danse ou autres, qui les efféminent plutôt que de les former, il s'adonna à la science des armes: ses plus grands plaisirs étaient de montera cheval, de remporter les prix de la Course se de la Bague , de se bien servir d'une lance, & de bien manier un sabre. Il était continuellement à la chasse, seul délassement qu'il prît dans ses travaux continuels. Ce fut dans de si nobles exercices que Timur passa tout le temps de sa vie, qui précéda le commencement de ses grandes & merveilleuses actions , c'est-à-dire, depuis sa dixième année jusqu'à sa vingt - cinquième ou environ-, car ce fut à peu près à cet âge-là que l'ambition s'étant rendue maîtresse de son cœur, il commença, comme il a toujours fait depuis, à mépriser les plus grands dangers-, à livrer des combats , à remporter des victoires, & à s'acquérir le nom d'un grand Conquérant & d'un Héros Intrépide. Au milieu de toute sa gloire, il était d'une retenue admirable, & toutes ses actions avaient la justice pour règle. Il n'usa même jamais du privilège qu'ont les Vainqueurs de maltraiter ceux que la fortune a rendu leurs esclaves, que quand sa gloire y était intéressée, ou qu'il y était obligé indispensablement, pour maintenir ses droits & conserver ses conquêtes.

Si Timur fut si grand & si admirable durant tout le cours de sa vie, les Mirzas (d) ses enfants ne dégénérèrent en rien de ses excellentes qualités; principalement le grand & invincible Charoc son fils aîné, & qui fut depuis son successeur à l'Empire $ qui quoi qu'il fut aussi puissant que Salomon, a toujours si bien usé de sa puissance, qu'il n'a jamais donné aucun sujet de plainte au moindre de ses sujets. Jamais ce Prince ne s'est adonné comme tant d'autres, aux jeux & aux plaisirs, dont il était sans cesse environné. La police de son Etat, & la justice qu'il rendait à ses peuples, faisaient son unique occupation & s'il était obligé de prendre quelques heures de relâche pour se délasser de ses occupations, il les employait à la méditation & aux bonnes lectures ; en sorte qu'on peut dire que ce Prince menait, au milieu du tumulte de la Cour & de l'embarras des affaires, la vie du monde la plus solitaire & la plus détachée de toutes fortes de vanités. J'aurais trop à faire de décrire ici toutes les vertus du grand Charoc, & de fon fils l'invincible Ibrahim Sultan, qui a excellé dans les lettres comme dans les armes, & a été un excellent Ecrivain. Je renvoyé le lecteur à la seconde & troisième partie de cet Ouvrage, ou j'ai décrit toutes leurs grandes actions. (e)

Pour en revenir à nôtre Histoire, taire, j'ose dire qu'elle est préférable à toutes celles qui ont été écrites jusqu'ici, & qu'elle doit remporter le prix fur celles des plus grands Princes, pouf trois raisons.

La première est l'Utilité que tout le monde en peut retirer, pour s'instruire dans la Chronologie, la Géographie, & l'Histoire d'Asie,& l'exemple de vertus que les plus grands Princes ne doivent point craindre d'imiter, en conformant leurs actions sur celles d'un si grand Héros. Elle est outre cela semblable à un théâtre où la fortune est représentée, se jouant de là politique des hommes, tantôt ruinant leurs déteins, tantôt les favorisant; quelque sois se laissant gouverner par cette politique, & quelquefois renversant tous les artifices dont elle s'était servie, pour éviter les dangers auxquels elle se voyait exposée. On y voit Tu mur jeter les fondements d'une Monarchie, qui d'abord parois croit chimérique aux yeux des plus sages ; cependant on le voit s'élever peu à peu au-dessous de ses pareils : on le voit ensuite tantôt courir la fortune comme un simple soldat, & tantôt commander des armées & détrôner des Rois ; & tout d'un coup, toute cette fortune disparaissant, on le voit obligé de quitter prise, & d'errer ça & là, abandonné de tout le monde, jusqu'à ce qu'enfin ou le voit dépouiller les Empereurs de leurs Sceptres & de leurs Couronnes, s'en revêtir lui-même, & s'affurer l'Empire de l'Asie, par la conquête de la Tartarie, de l'Inde , de la Perse, de l’Arabie, de l'Egypte, de la Natolie & d'autres Royaumes ; Se toute cette partie du monde devenue soumise à ses Loix. On le voit enfin après sont & de si glorieux travaux, quitter les Couronnes terrestres pour passer à l'immortalité, qui était son but principal, & la fin glorieuse à laquelle rendaient ses entreprises, laissant son Empire dans une heureuse & profonde paix.

La seconde raison qui peut faire mériter à cet Ouvrage une approbation universelle, c'est l'exactitude avec laquelle toutes les actions du grand Timur y ont été inférées: qualité qui ne se trouve dans aucune des histoires des autres grands Princes : tous ses exploits y étant décrits, jusqu'aux moindres circonstances. L'Auteur de la vie de Timur en vers Turcs, avoue même que ce Prince ne voulut pas lui permettre d'inférer certains faits particuliers dans son Ouvrage, craignant qu'ils ne parussent fabuleux, s'ils étaient écrits en vers, & les réservant (comme Timur l'a die lui même plusieurs fois) pour le présent ouvrage.

La troisiéme raison qui doit attirer l'estime de tout le monde pour ce Livre, c'est que la vérité règne dans tous les faits qui y font rapportés, & qu'on y a évité les moindres exagérations. Pour convaincre le Lecteur de ce fait important, il ne faut que l’instruire de la manière dont cet Ouvrage a été composé. Timur Bec avait toujours à sa suite des Secrétaires Tartares & Persans, choisis entre les plus savant hommes de son Empire, il les avait chargés d'écrire toutes ses actions & tous ses discours, avec toutes les circonstances qui avoient rapport à la Religion, à l'Etat & à ses Ministres, avec ordre d'écrire le tout simplement & sans y rien ajouter, ni pour embellir le stile, ni pour rehausser la gloire de personne ; l'on y a même observé de ne jamais relever la bravoure des soldats, ni des Généraux de l'Empereur, aux dépens de celle des ennemis ; & c'est ainsi que cette Histoire, aussi-bien que celle en vers Turcs ont été composées. Outre ce qu'on vient de rapporter, comme plusieurs Officiers & grands Seigneurs de la Cour de l'Empereur, avaient fait écrire plusieurs faits particuliers, dont ils avaient été les témoins oculaires, & où ils avaient même eu la plus grande part : ce Prince fit ramasser tous ces fragments, & eut la patience de les arranger lui-même, après quoi il les fit vérifier en sa présence de la manière suivante. Un Lecteur lisait un de ces mémoires: & lorsqu’il en était sur quelque fait important, ou quelque action remarquable, il s'arrêtait, les témoins oculaires faisaient leur rapport, & vérifiaient les circonstances du fait, les rapportant telles qu'ils les avoient vues, alors l'Empereur examinait lui-même la vérité-du fait, & ayant bien confronté ce que les témoins rapportaient, avec le contenu des mémoires, il dictait aux Secrétaires la manière dont ils dévaient l'insérer dans le corps de l'ouvrage, & se le faisait relire ensuite, pour voir s'il était tel qu'on ne pût y rien trouver , ni à ajouter ni à diminuer. Le Lecteur connaîtra par le récit qu'on vient de faire, que cet Ouvrage à été écrit avec toute la fidélité possible; & que c'est au grand Timur qu'on doit attribuer la gloire de sa composition, puisqu'il a pris lui même la peine d'en rassembler toutes les parties, & de les vérifier. L'Auteur n'a. fait que lui donner pour ainsi dire, les derniers coups de pinceau, en l'ornant des beautés de l'élégance persienne, afin de le mettre au point de perfection où on le désirait.

Une perfection de cet Ouvrage, qui est encore très-remarquable, c'est l'exactitude avec laquelle on y a observé la Chronologie, & le tems de chaque événement, où on a marqué avec soin les jours & les heures où ils sont arrivés. On y a aussi très-soigneusement marqué tous les campements, les routes, & les journées, & même les heures de distance d'un lieu à un autre.

Au reste comme les événements sont tous enchaînés, & ne sont que des suites les uns des autres ; on a repris la narration d'un peu haut, & l'on a jugé à propos de rapporter plusieurs faits historiques, qui ont précédé, le tems où Timur-Bec a commencé à faire parler de lui dans le monde, parce qu'on en a crû le rapport nécessaire à la parfaite intelligence de cette Hiftoire.

a) Les Orientaux ont pour principe, de mettre Je nom de Dieu à la tête de tous leurs Ouvrages.

b) On ne doit point être surpris que l'Auteur, en parlant de la mère de Timur-Bec, «prime qu'elle était femme légitime de l'Emit Tragaï; parce que les Mahometans sont autorisez par leur Loi, à entretenir des Concubines, dont les enfants ne laissent pas d'être légitimes.

c) Kech Ville de Transoxiane à 99. d. 304. m. long. 39. d. 30. m. lat.

d) Mîrza signifie fils de Prince.

e) La seconde & troisième partie de cet Ouvrage dont parle l'Auteur, n'ont point été traduites, & je ne crois pas qu'en en ait d'exemplaires en France.



Avis au lecteur

Il s'est glissé dans l’impression de cet Ouvrage, une faute de Chronologie considérable, dont il est à propos d'avertir le Lecteur. Elle commence à la page 26 du premier volume, où l'an de l’Hégire 761 est rapporté à l’an de Grâce 1369, au lieu de 1359. ce qui fait une erreur de 10 années & la même faute s’étant trouvée en quelques endroits du manuscrit, elle a été continuée dans tout le reste du livre ; ainsi au lieu que la mort de Timur-Bec Je trouve ici en l’an de Grâce 1415, elle doit être en 1405. il fera très-facile de ne point s'y tromper, pour peu qu’on y. veuille faire attention.



Histoire de Timur-Bec

Livre Premier

Où sont marqués divers Evénements qui ont précédé l'élévation de Timur-Bec sur, le Thrône de Zagataï.

Chapitre premier

Du sultan Cazan, Grand Can de Zagataï ; sa défaite & sa mort. Mir Cazagan Prince Turc prend en main le gouvernement de l’Empir, &établit un Grand Can ; Guerre de Mir Cazagan contre Malek Hussein Prince de Herat.
L’an de l’Hegire 733, le sultan Cazan, a fils d’Isour Aglen, descendant de Genghiz Can, monta sur le Thrône des Cans en Zagataï, (C’est-à-dire, la Il est le 21e des successeurs de Zagataï Can, dans le Pays qui fut donné en partage à Zagataï Can par son père Genghiz. Can.)a Mais ce Prince naturellement enclin à la tyrannie, poussa sa violence & son injustice si loin, que les Peuples en furent réduits au désespoir.

Sa tyrannie avait tellement intimidé tout le monde, que quand il envoyait ordre aux Princes qui étaient de sa dépendance, de se retrouver quelque part, & surtout aux Assemblées d'Etats, qu'il faisait tenir, ils étaient si peu sur de leurs vies, qu'ils faisaient ordinairement leur Testament avant que d'y aller.

Ce mécontentement général fut enfin cause que Mir Cazagan, qui était un des plus considérables Princes de son temps, & de la Tribu de Tabit, se révolta & se joignit â quelques Princes du Pays pour faire la guerre au grand Can; ils levèrent des troupes dansb Saliseraï, & mirent sur pied une grande armée.

Le Can n'eut pas plutôt avis de leur

« Ce Pays qui fut donné en partage à Zagataï Can, cst la Tranfoxiane, le Pays des Yugures , la grande Ville de Caschgar, auprès du Tebet, le Royaume de Bedacschan, & la Ville de Bale, que plusieurs Sçavans assurent être l'ancienne Bactria…

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