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La Question Kurde en Syrie


Auteur :
Éditeur : L'Harmattan Date & Lieu : 2005, Paris
Préface : Pages : 206
Traduction : ISBN : 2-7475-9296-0
Langue : FrançaisFormat : 160x230 mm
Code FIKP : Liv. Fra. Sab. Ata.Thème : Général

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La Question Kurde en Syrie

La Question Kurde en Syrie

Abdulbaset Seida

L’Harmattan


Après des dizaines d'années de répression, de résistance armée, deux «guerres d'Irak», des dizaines de milliers de morts et la demande de la Turquie de rentrer dans l'Union Européenne, on a fini par entendre parler des Kurdes de Turquie et d'Irak.

Des Kurdes de Syrie, en revanche, on ne sait rien ou presque! Ils sont pourtant 2 millions vivant depuis des siècles en Syrie et soumis, particulièrement depuis l'arrivée au pouvoir du parti Baas en 1962, à une oppression rigoureuse, à une répression parfois sanglante, à une spoliation de leurs terres et surtout - pour plus de 350 000 d'entre eux - à une négation de leurs droits fondamentaux y compris de leur identité.
Malheureusement rien de tout cela n'est connu en France!

Serait-ce la démonstration qu'en-dessous d'un certain seuil de morts, de bombardements, d'attentats, on risque de passer inaperçu? Les Kurdes de Syrie espèrent encore le contraire, eux qui ont choisi la voie pacifique et démocratique.
Par la publication de ce livre d'Abdulbaset Seida qui analyse méticuleusement la situation et apporte les éléments historiques nécessaires à sa compréhension nous souhaitons commencer à briser ce silence.



Abdulbaset Seida est né en 1956 à Amouda en Syrie. Il a fait des études universitaires de Philosophie à Damas (1973-1991). Thèse de Doctorat en 1991 (cf publication). Il enseigne en Lybie de 1991 à 1994 puis s'établit en Suède où il mène des activités de recherche et d'enseignement et publie articles et études dans des revues arabes. Auteur de 3 ouvrages. Membres de l'Union des Ecrivains de Suède.
- Positivisme logique et tradition arabe, Liban, 1991.
- De la conscience mythologique aux débuts de la pensée philosophique théorique. Le cas de la Mésopotamie, Syrie, 1995.
- La question kurde en Syrie. Chapitres oubliés d'une longue souffrance, Suède, 2003.

 



PREFACE

Autant le dire d’entrée, je ne suis certainement pas le mieux qualifié pour écrire une introduction au livre de M. Abdulbaset Seida. Je ne connais pas l’auteur, je ne suis ni un chercheur, ni un spécialiste universitaire de la «question kurde». Si j’ai beaucoup appris en lisant le livre, je ne me sens pas pour autant autorisé à porter un jugement à son sujet . Je ne doute pas qu’il donnera motif à discussion et peut-être à controverse, ce pourquoi aussi il a été écrit. A ma place, plus modeste, je voudrais seulement souligner l’importance qu’un tel livre puisse être publié en français ce qui n’est pas un mince exploit.

Dire d’un livre qu’il a d’abord le mérite d’exister pourrait sembler un compliment douteux. Les qualités intrinsèques de l’ouvrage ne sont pas en cause, mais c’est un fait. Il faut croire que la seule mention du mot «kurde» semble avoir un effet glacialement dissuasif chez les éditeurs de l’hexagone. Ainsi par exemple le livre de Jonathan Randal "After such knowledge, what forgiveness ? - my encounters in Kurdistan" paru en 1997 aux Etats-Unis n’a toujours pas trouvé d’éditeur dans notre pays. C’est à la fois une somme et un récit, merveilleusement écrit par un journaliste remarquable et le meilleur connaisseur d’un terrain qu’il parcourt depuis des décennies et de plus l’auteur entre autres d’un «Osama» célébré par la critique. Rien n’y a fait. Les Kurdes, comme ont dit «ne font pas vendre» (*)

Pour faire exister le livre que vous avez entre les mains, il aura fallu les efforts patients d’un petit groupe de Kurdes et d’amis des Kurdes qui lui ont trouvé un traducteur puis un éditeur qui lui-même prenne le risque commercial de sa publication. Reste maintenant à lui trouver des lecteurs et si la voix d’un journaliste peut y aider, cela seul justifierait l’honneur qui m’a été offert d’écrire quelques mots en tête de ce livre.
Un honneur qui est aussi une sorte de dette.

C’est le mot qui convient quand on a eu la chance qui fut la mienne en tant que reporter, de travailler avec des Kurdes en Iran d’abord, en Irak ensuite puis en Turquie et, plus rarement il est vrai en Syrie. J’y ai découvert non seulement des hommes remarquables, au premier rang desquels Abderamane Ghassemlou, qui dirigeait alors le Parti démocratique des Kurdes d’Iran et fut plus tard assassiné à Vienne par les agents de Téhéran, mais aussi un peuple extraordinaire dont la générosité et l’hospitalité Savaient d’égales que le courage. A la mesure des épreuves traversées, ce sont des qualités que les journalistes que nous sommes -pas très nombreux sur le sujet n’ont pas le droit d’oublier.

Le «malheur kurde» comme souvent on le nomme a d’innombrables facettes mais l’indifférence générale dans laquelle il a été tenu au fil des décennies n’est pas la moins poignante. Ce n’est évidemment pas ici le propos de retracer l’histoire moderne de quelque 25 millions de Kurdes et de ce qu’ils ont subi, en Turquie, en Iran, en Irak et en Syrie, à tour de rôle, inégalement et dans des situations très diverses sinon pour rappeler que les Kurdes ont été les grands «oubliés» au moment où les vainqueurs de la 1ère guerre mondiale se partageaient les dépouilles de l’empire ottoman. Comme si le fameux «Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes», s’accompagnait d’un codicille: «Bon pour tous, sauf les Kurdes».

La question d’un (grand) Kurdistan indépendant n’est certes pas à l’ordre du jour. Elle n’aurait pourtant rien de scandaleux même si, réalisme oblige, et comme disait fort bien A. Ghassemlou, on ne saurait imaginer que la communauté internationale accepte de bouleverser la carte de trois pays (au moins) pour en créer un quatrième. Le peuple kurde n’en existe pas moins avec des droits imprescriptibles dont la satisfaction quelle qu’en soit la forme institutionnelle, est assurément l’une des clés pour l’avenir d’un Moyen-Orient pacifié, ouvert et démocratique.

Et cela vaut bien sûr, pour les Kurdes de Syrie, l’objet du présent ouvrage, qui revendiquent rien plus que de pouvoir parler et enseigner leur langue et d’être enfin reconnus comme des Syriens de plein droit. Ils sont entre 1,5 et 2 millions de Kurdes dans le dernier pays gouverné par le parti Baas, et quelque 200 000 d’entre eux n’y ont pas même une identité légale. Il aura fallu les violents affrontements du printemps 2004 qui firent au moins 40 morts dans les régions kurdes de Syrie pour que la presse internationale en rappelle l’existence.

C’est dire à quel point ce livre vient combler un vide. Et à l’heure -historique- ou un président kurde a été élu à la tête de l’Irak, voilà aussi une pièce de plus au dossier pour en finir avec le déni d’existence du peuple kurde.

Marc Kravetz (*)

(*) A qui veut pourtant s’informer, rappelons cependant que la France a le privilège d’héberger l’Institut Kurde qui, tant par ses actions que ses publications, est un centre de ressources mondialement reconnu pour l’histoire, la culture et l’actualité des Kurdes.



Note du Traducteur

Cette traduction française comprend le corps de l’ouvrage rédigé par Abdelbaset Seida en arabe. Nous avons pris le parti de traduire le moins de notes possibles, la plupart renvoyant à des documents en arabe ou aux annexes de l’ouvrage en arabe. Le texte original comprend en effet une série d’annexes:

- un article de l’auteur sur l’histoire ancienne de la région et les massacres d’Arméniens et de chrétiens au début du XXe siècle;
- un tableau des familles kurdes de Damas;
- un compte-rendu de réunion du ministère des Affaires étrangères russe datant de 1923;
- le texte de l’accord franco-turc de 1921; les articles du traité de Sèvres1 relatifs au dossier kurde;
- deux notes du gouverneur d’al-Hassakeh, l’une demandant l’arabisation des noms de circonscriptions, de villes et de villages datant de 1994 et l’autre rappelant aux fonctionnaires l’interdiction de toute autre langue que l’arabe dans les administrations (1996);
- un rapport de police sur l’incendie de la prison d’al-Hassakeh;
- une note du ministre de l’administration locale datant de 1977 et communiquant une liste de 103 toponymes à arabiser (avec l’ancien et le nouveau toponyme);
- un courrier du gouverneur d’Alep demandant la fermeture de magasins de musique aux noms kurdes; des extraits de la réponse du gouvernement syrien au rapport de Human Rights Watch concernant les Kurdes de Syrie; un courrier du ministère de l’Enseignement supérieur rappelant l’interdiction d’admission des élèves ne possédant pas de nationalité syrienne, «les étrangers d’al-Hassakeh» précise la note;
- une liste de fonctionnaires (kurdes) à ne pas nommer dans la province d’al-Hassakeh; les recommandations faites à la police en cas de perte de carte d’identité par un «citoyen d’origine kurde»; des cartes des trois régions kurdes de Syrie.
Les spécialistes constateront des variations notables dans les règles de transcription des noms arabes et kurdes. Pour les noms les plus connus, la transcription usuelle en français a souvent été préférée à la transcription scientifique. La transcription de l’arabe a été simplifiée pour ne pas alourdir le texte par l’ajout de signes diacritiques aux lettres.

1 Disponible en anglais sur le site:
http://www.lib.bvu.edu/-rdh/wwi/versa/sevindex.html



Chapitre I

Du crime colonial à la tragédie perpétuelle


À la veille de la Première Guerre mondiale, tout indique que les jours de l’homme malade sont comptés. L’appétit aiguisé, chacun entame des négociations secrètes ou publiques, bilatérales ou multilatérales, afin d’obtenir une part de cet héritage convoité. L’empire Ottoman et l’État iranien héritier de l’empire safavide (défaite safavide de Chaldiran en 1514) se partagent alors le Kurdistan. La plus grande partie du Kurdistan se trouve dans l’empire Ottoman défait pendant la Grande guerre et fait, comme toutes les régions ottomanes, l’objet de longues discussions et de négociations compliquées pendant et après la guerre. Nous nous intéresserons ici plus particulièrement au sort de la province de Mossoul, directement lié au thème principal de cet ouvrage.

Avant la fin de la guerre, l’accord Sykes-Picot plaça la province de Mossoul ainsi que le Sud-Ouest du Kurdistan sous la tutelle du mandataire français. Cet accord fit ensuite l’objet de nombreux amendements résultant des convoitises britanniques sur la province de Mossoul, riche en ressources aquifères et où le parfum du pétrole commençait à s’exhaler. Cette province se situait en outre à un emplacement stratégique: aux confins de la Turquie et de l’Iran et à proximité de la Russie devenue soviétique en 1917.

Ces amendements se décidèrent lors de la conférence de paix tenue à Paris en 1919. Les participants adoptèrent une première décision, sur la proposition du Président américain Wilson, consistant à amputer la Turquie de l’Arménie, du Kurdistan, de la Syrie, de la Mésopotamie, de la Palestine et de la Péninsule arabique. L’historien ...




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