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Le Lobby de la Mort


Auteur :
Éditeur : Calmann-Lévy Date & Lieu : 1991, Paris
Préface : Pages : 406
Traduction : ISBN : 2-7021-2040-7
Langue : FrançaisFormat : 150x230 mm
Code FIKP : Liv. Fra. Tim. Lob. 4578Thème : Général

Présentation
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Le Lobby de la Mort

Le Lobby de la Mort

Kenneth R. Timmerman

Calmann-Lévy


Le Lobby de la mort est conçu comme un roman d’espionnage dont chaque chapitre raconte l'odyssée véridique des hommes, des entreprises et des gouvernements qui ont aidé un petit pays pétrolier insignifiant à devenir la poudrière de la planète. Après six ans d'observation sur le terrain et d'investigations dans le monde entier, le seul journaliste occidental à avoir approché les plus hauts responsables du programme militaire irakien écrit ici le document définitif sur la manière dont l'Occident a armé l'Irak depuis 1975.

Jamais n'est apparue si clairement la conspiration du silence à Washington, Paris, Londres, Bonn, alors que les intentions de Saddam Hussein avaient été maintes fois explicitées et délibérément ignorées. Jamais un réquisitoire aussi complet n'avait été dressé contre les pays impliqués dans ce gigantesque marché de la mort organisée: au-delà des accusés habituels (URSS, Allemagne, France), nous découvrons ici l'effarante duplicité des États-Unis et la vaste toile d’araignée tissée du Brésil à l'Afrique du Sud, de l'Italie au Japon, de l'Europe centrale à la Suisse...

Il ne s'agit pas d'un livre de plus sur la guerre du Golfe, mais du premier dossier d'ensemble sur les quinze années de myopie capitaliste suicidaire qui l'ont rendue possible et sur les perspectives apocalyptiques d'avenir au cas où l'on ne parviendrait pas à stopper la logique folle du lobby de la mort dans le monde.



Kenneth R. Timmerman, journaliste américain, est le plus grand spécialiste des transferts de technologie dans le monde. «Basé» en France depuis 1975, il est un très bon connaisseur du Moyen-Orient. Grand reporter au Liban en 1982, il fut retenu en otage à Beyrouth-Ouest. De 1983 à 1985, il couvre le Moyen-Orient pour USA Today et Atlanta Journal, voyageant au Liban, en Syrie, en Israël et en Irak. En 1986-87, il collabore notamment à Newsweek et CBS. En 1987, il crée Mednews, une lettre confidentielle sur les questions de défense et de sécurité au Moyen-Orient, qui devient la source de référence incontournable sur le Golfe.

Depuis 1987, Timmerman collabore régulièrement aux plus grands titres de la presse internationale: Wall Street Journal, International Herald Tribune, L'Expresso, El Pais, Die Welt, L'Express, Le Point, Politique Internationale, Le Monde. Consultant pour le New York Times et ABC, il est l'auteur delà Grande Fauche (Plon, 1989).

 



«L’argent est plus précieux que toutes les choses au monde»
Molière, L’Avare

PREFACE


Le 27 février 1991, le président Bush a solennellement proclamé la victoire contre l’Irak. De toute évidence l’opération «Tempête du désert» avait été un éclatant succès. Saddam Hussein avait été contraint de se retirer du Koweït, son armée en déroute, et sa dictature vouée à une fin certaine. L’Amérique et ses alliés avaient montré une fois encore qu’il était possible de mener une guerre juste et de la gagner.

Mais le véritable combat contre Saddam Hussein avait peu de rapports avec la libération du Koweït, en dépit de l’ardeur avec laquelle le président Bush et ses conseillers insistaient sur cet objectif. Il ne s’agissait pas non plus de travail et d’emplois, comme James Baker essaya un jour de le démontrer. Ni même de pétrole. À cause de la cupidité des hommes d’affaires occidentaux, de l’analyse erronée des responsables de la politique étrangère et de l’incompétence des organismes de contrôle officiels, les États-Unis et leurs alliés n’avaient pas eu d’autre alternative que de combattre Saddam Hussein sur le champ de bataille. En bref, les États-Unis sont entrés en guerre pour briser la machine de mort de Saddam qu’ils avaient contribué à construire avec les autres alliés du camp occidental.

Le président Bush le reconnut d’ailleurs en partie lorsqu’il adressa son message de la fête du Thanksgiving (novembre 1990) aux troupes américaines en Arabie Saoudite. Chaque jour qui passe, avait averti Bush, est pour Saddam Hussein «un pas de plus qui le rapproche de son objectif: acquérir un arsenal nucléaire». La menace d’une bombe atomique irakienne, conçue et fabriquée avec l’aide des savants d’Allemagne de l’Ouest, donne un «véritable sens d’urgence» au déploiement des forces alliées dans le Golfe. Bush ne dit pas à ses troupes à quel point Saddam était proche de disposer de cette arme; mais les services de renseignement du Pentagone l’avaient informé quelques jours plus tôt que la première bombe serait prête dans un délai de trois à six mois. «Il y a une chose dont je suis sûr: il ne détient jamais une arme sans l’utiliser», ajouta le Président.

Saddam Hussein n’aurait pas pu représenté une telle menace s’il n’y avait eu le «lobby de la mort». Pendant les quinze ans qui précédèrent son invasion du Koweït, l’Irak s’est constitué une formidable machine de guerre, inconnue jusque-là au Moyen-Orient, avec l’aide des gouvernements occidentaux, de leurs arsenaux et de leurs crédits. Ils lui ont vendu des engins blindés, des avions supersoniques, des armes chimiques, des missiles balistiques, ainsi que le matériel pour faire une bombe atomique. Tous les membres du lobby pro-irakien ont apporté leur pierre à la puissance offensive de Bagdad en luttant avec acharnement pour préserver leurs privilèges. Mais ils ne pouvaient que se disputer des contrats, car c’était Saddam qui menait la danse de mort en profitant de tant de sollicitude. Quinze ans avant l’invasion du Koweït, en réponse à un embargo sur les armes soviétiques décidé par Moscou, il avait établi un plan magistral pour assurer son indépendance en matériel militaire. En même temps qu’il étendait ses achats d’armement, il envoyait ses agents à travers le monde pour se procurer la haute technologie qui lui permettrait, à l’avenir, de fabriquer tout ce dont il aurait besoin pour vaincre. L’Irak ne dépendrait plus jamais de personne. Telle était sa volonté. Pendant cette gigantesque croissance militaire et industrielle, qui s’est déroulée presque ouvertement, pas une fois n’a retenti un signal d’avertissement en Occident. Saddam Hussein était «une force de modération» dans la région, comme le déclara au Congrès le secrétaire d’État adjoint John Kelly, quatre mois seulement avant l’invasion du Koweït. L’Irak était un fabuleux marché pour la France, l’Allemagne, Italie, la Grande-Bretagne, l’Autriche et les États-Unis. Saddam Hussein a été notre création, notre monstre. Et, comme celui du Dr Frankenstein, il est devenu fou.

Ce livre est une mise en garde et le récit de ce qui se produit lorsqu’une monumentale avidité s’unit à une prodigieuse ambition. C’est l’histoire des nombreux hommes, sociétés et gouvernements qui ont aidé à transformer l’Irak, simple petit État pétrolier, en une superpuissance régionale. Il montre pour la première fois comment nous avons créé Saddam Hussein, pas à pas, pièce par pièce, par cupidité, aveuglement volontaire et erreur gigantesque. Et, bien entendu, il indique ce que Sadaam avait l’intention de faire avec ce formidable arsenal.

Mais Le Lobby de la mort veut également montrer une image plus large de ce qui s’est passé en Irak et suggérer diverses façons d’éviter que cela ne se reproduise ailleurs.

Ce livre est le résultat de six années d’études et d’enquêtes sur les programmes d’armement de l’Irak, effectuées à une époque où peu de gens s’y intéressaient.

Les informations données ici proviennent pour la majeure partie de sources de première main.
Comme journaliste spécialisé dans les problèmes de défense, j’ai bénéficié de l’expérience de nombreux concepteurs d’armes, techniciens et militaires qui ont travaillé en Irak et ont été assez généreux pour partager leurs connaissances avec moi au cours de ces années. Ils avaient accès aux installations militaires irakiennes et à des projets qui n’ont jusqu’à présent jamais été révélés au public. Au cours de centaines d’interviews, ils m’ont décrit ce que les Irakiens achetaient et comment ils l’utilisaient. Dans la plupart des cas, je n’ai pas pu citer leurs noms.

De nombreux autres aussi restent anonymes: agents du renseignement, diplomates et autres officiels gouvernementaux de différents pays d’Occident et du Moyen-Orient qui ont partagé avec moi leurs analyses, parfois inestimables.

Il m’est arrivé aussi de tomber par hasard sur des pistes nouvelles. Ainsi, lors d’une visite à des usines d’armement d’Afrique du Sud en 1985, je me suis trouvé dans l’entrepôt d’une nouvelle fabrique de munitions. À ma grande surprise, j’ai découvert une grande quantité de caisses en bois contenant des obus avec pour inscription du lieu de destination: «Ministère de la Défense, Bagdad, Irak.» J’avais découvert sans le vouloir la connexion sud-africaine et le rôle qu’allait jouer ce génie de la balistique, Gerald Bull.

Mais la plupart des informations sur le programme à long terme de l’industrie de guerre me furent fournies par les Irakiens eux-mêmes, au cours d’entretiens qu’ils m’ont accordés en tant que correspondants, spécialistes des questions de défense. À partir de 1986, j’ai rencontré en diverses occasions les principaux responsables du ministère de l’Industrie et de l’Industrialisation militaire, y compris le ministre lui-même, Hussein Kamil, et ses deux principaux adjoints les généraux, Amer al-Saadi et Amer Rashid. Au cours de mes fréquents voyages à Bagdad, je me suis entretenu avec de nombreux ingénieurs de l’armement, fiers de ce qu’ils accomplissaient et désireux de partager leur enthousiasme avec quelqu’un qu’ils considéraient comme un professionnel en ce domaine.

J’ai essayé de respecter aussi scrupuleusement que possible l’ordre chronologique des faits qui ont contribué au surarmement de Saddam, pour que le lecteur puisse mieux comprendre ce que les responsables savaient à chaque moment, sans être influencés par ce qu’on a appris plus tard.

Saddam Hussein n’est pas sorti de l’ombre le 2 août 1990, lorsqu’il a envahi le Koweït. Cette sinistre histoire d’amour qui implique le monde entier durait alors depuis quinze ans...

Paris, le 8 septembre 1991.
Kenneth R. Timmerman



Prologue
Comme de Jeunes Mariés...

Par un bel après-midi d’automne, le vendredi 5 septembre 1975, le Boeing 707 de Saddam Hussein atterrit à Orly, pavoisé pour la circonstance avec l’aigle de Saladin, symbole guerrier de l’Irak. Le Premier ministre Jacques Chirac se préparait à accueillir son hôte dès qu’il aurait posé le pied sur le sol de France. Un long tapis rouge menait au salon de réception où champagne et petits fours attendaient les hôtes irakiens.

«Je vous souhaite la bienvenue en tant qu’ami personnel, dit Jacques Chirac à son visiteur. Je vous assure de mon estime, de ma considération et de mon affection.»

Impressionné par cette réception, Saddam répondit avec une modestie caractéristique:
«Nous espérons que les relations que la France entretient avec les pays arabes bénéficieront de la même chaleur et de la même cordialité qu’aujourd’hui. Les rapports entre nos deux pays ne peuvent que s’améliorer à la suite de ma visite qui, je l’espère, sera bénéfique pour la paix mondiale.»

Saddam ne dit pas - et Chirac ne lui demanda pas - quelle était exactement sa conception de la paix mondiale. Elle était tout à fait particulière, et nombreux en Occident auraient eu du mal à la comprendre. La paix pour Saddam signifiait la domination par les armes. Il était venu pour sceller un pacte stratégique qui se traduirait très vite par une vente massive d’armes françaises et le transfert à l’Irak de technologies nucléaires. Ainsi allait s’accélérer dramatiquement la course aux armements au Moyen-Orient et commencer l’ambitieux programmé nucléaire de Saddam Hussein.

.....




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