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Contes et poèmes kurdes


Auteur : Multimedia
Éditeur : Peuple & Création Date & Lieu : 1974, Genève
Préface : Pages : 60
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 140x195 mm
Code FIKP : Br. 2279Thème : Poésie

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Contes et poèmes kurdes

Contes et poèmes kurdes

Ces contes et ces poèmes sont un reflet de l'âme kurde mais aussi un document.

La nation kurde, riche de seize millions d'âmes au moins, est écartelée entre la Turquie (8 millions), l'Iran (5 millions), l'Irak (2 millions 1/2), la Syrie (500 000) et l'Arménie soviétique (300 000).

Nulle part, les Kurdes (peuple d'ethnie indo-européenne) n'ont le droit de disposer entièrement d'eux-mêmes. Ou ils sont en armes, comme en Irak, pour jouir de leurs droits, ou ils sont soumis à une politique directe d'assimilation forcée, comme en Turquie, en Syrie et en Iran.

Ce peuple mérite qu'on entende sa voix.


PREFACE

Entre les inventeurs d'histoires et les accoucheurs de l'Histoire, la séparation n'est pas totale, dit Claude Roy. Ici, nous sommes au cœur de la question. Noureddine Zaza, docteur ès sciences sociales et pédagogiques de l'Université de Lausanne, a transcrit les contes de sa race et s'est courageusement battu pour elle.

Il a créé en 1957 le parti démocratique kurde de Syrie, pour sauvegarder une culture et une unité très menacées. Mais il a été emprisonné et même condamné à mort.

Le Kurdistan n'a donc pas d'existence politique propre, il n'existe que dans la résistance à l'oppression, dans la guerilla de Barzani et dans ses traditions culturelles. Ecrasez l'une, effacez  les autres et le Kurdistan aura vécu. C'est à quoi s'emploient ses ennemis. « Il n'y a rien de kurde, rien ! » affirment-ils.

Mais le Kurdistan vivra.

Il convient pour sauver une culture, c'est-à-dire une identité contestée, d'aller à l'origine, d'aller vers le foyer de cette chaleur: les légendes. Transmises oralement d'âge en âge, elles furent d'abord une incantation magique, un désir, un espoir qui, à force d'être répété, se réalisera. Elles sont nécessaires à tous les niveaux de civilisation, elles viennent de cette source éternelle où baigne toute vie. Si elles meurent, comme on le voit en Occident, même les pays les plus riches mourront de froid.

Car la langue distingue un peuple, peut-être plus encore que ses frontières et ses religions. L'expression directe, populaire, est son génie.

Le trésor des contes de Noureddine Zaza révèle l'âme particulière des Kurdes. Nous sommes au royaume de la bravoure, de l'amour et du défi. « Siyamend » évoque la haute montagne du Sipan, éclairée par un soleil noir. Le jeune berger Siyamend tire à l'arc, lance le javelot, monte à cheval comme tous ses camarades et mieux encore. Il galope avec le vent sur les plaines, empoignant un mouton, un veau ou un homme sans interrompre sa course. Il ravit, à la barbe des sept frères qui la lui refusent, sa bien-aimée Khadje aux yeux mauves et la cache dans une caverne. Très ingénieux, il réussit à rançonner les caravanes et devient le roi du pays. Mais trop passionné de chasse, il ne sait pas respecter l'amour d'un cerf pour sa femelle et le tue d'une flèche. L'animal, secouant ses bois, le pousse dans l'abîme.

Alors s'élève le cri de Khadje:

— 0 Sipan ! 0 rochers, monts et ravins !
ne me barrez pas la route !
Frayez-moi un chemin
Ouvrez-moi un passage
Que je rejoigne Siyamend !
et que je lui devienne une tombe et non plus une épouse !

On le voit, la femme kurde est aimante et volontaire. Dans le poème « La déclaration d'une fiancée» de Djasmin Djalil, elle est une rose sauvage: Si tu ne me touches pas, je ne m'épanouirai pas. Viens, cueille-moi, emmène-moi par dessus la montagne... Elle n'a pas peur de dire à ses parents: Je veux celui que j'aime.

Quant à l'homme kurde, il se montre toujours intrépide. Le « Canip Yildirim » de Noureddine Zaza, au rythme fier et sobrement viril, l'exprime fort bien. Et la mère kurde est stoïque. Obligée de reconnaître la tête tranchée de son fils, tombée dans la neige,

la mère regarda loin
vers les montagnes
et répondit:
— Ce n'est que la tête d'un agneau
que Dieu protège les béliers
qui sont dans la montagne !

Ainsi se termine le chant épique du « Neveu de Moussa bey de Mokhtar ».

Mais l'humour ?

Il est tout entier dans le conte « Le Dieu et le fusil ». La nostalgie de la fontaine de Jouvence, de l'or enfoui ? Dans « La légende de Bingol » et « La tombe blanche ». Et l'astuce, l'intelligence ? Dans « Pîvaz et Sîro », les deux frères qui s'ap- pelaient Oignon et Ail. La familiarité avec les bêtes, le don de les observer ? Ce secret que les peuples pasteurs possèdent plus que tous les autres, il éclate dans « La flûte de Tchéko »; elle réussit à faire grimper un bélier, chef de troupeau, sur une échelle verticale, malgré l'immense réserve de graisse contenue dans sa queue en éventail. On savoure ce détail, comme on s'attendrit de retrouver ici les deux rosiers qui fleurissent dans le ravin où sont morts Siyamend et Khadje, ce double miracle, ces plantes, ces arbres qui s'élèvent toujours sur le tombeau des amants. Mais deux papillons les survolent et l'étoile du Sipan s'est aussi dédoublée.

Il ne nous reste plus qu'à souhaiter aux Kurdes leur vrai pays: un Kurdistan reconnu dans toute sa magnifique réalité.

S. CORINNA BILLE




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