La Construction de l’Identite Nationale Kurde dans la Presse, Au Kurdistan d’Irak Zubeida Abdulkhaliq EHESS
Dans ce travail, on ouvre l’investigation du Kurdistan d’Irak à l’échelle des pays du Moyen-Orient et l’émergence d’Etats-Nations dans cette région. On décrit la manifestation des éléments constructifs de l’identité nationale kurde dans la presse et l’émergence des nouveaux acteurs à partir des événements de 1991 au Kurdistan d’Irak. C’est seulement après plus de quatre-vingts ans de conflits conséquents entre les mouvements nationalistes kurdes et les différents gouvernements irakiens, que les Kurdes, en bénéficiant des changements intervenus en 1991, ont construit une administration étatique et ont gouverné tant bien que mal leur propre territoire, en dépit d’une situation économique et politique difficile et de l’absence de toute reconnaissance officielle de la part des autres Etats. On s’intéresse ainsi à comprendre le rôle de la presse à cette époque, en analysant quatre des principaux journaux qui ont été à la source de la conscience nationale et culturelle, et publiés par différentes directions (nationaliste, islamiste et indépendante). Ce faisant, on s’attache à dévoiler la dimension réelle des éléments constructifs de l’identité kurde dans la presse, et l’émergence d’autres acteurs sociaux tels les jeunes étudiants, les femmes et les journalistes professionnelles. Parmi ces éléments, on se propose d’étudier plus particulièrement l’officialisation et l’évolution de la langue, et les autres éléments d’identités nationales kurdes, avant de suivre le trajet des revendications nationalistes qu’une partie de la presse kurde a épousées au siècle dernier, devenant elle-même parfois une véritable tribune politique pour une indépendance partielle ou totale du Kurdistan. Partant de ce constat, cette thèse entreprend d’examiner : De quelle manière la notion d'identité nationale kurde est-elle entrée dans l’Histoire ? Qui sont les premiers acteurs de la construction de l’identité nationale kurde ? Au Kurdistan d’Irak, comment le sens de cette identité nationale a-t-il évolué au fil des années ? L’identité kurde niée par le slogan du Pari Baas au pouvoir pendant quarante ans en Irak « Une Nation Arabe Unique, ayant une Mission Eternelle », est-elle différente de celle que Jalal Talabani, Kurde et président depuis 2005, entend représenter dans un Irak «multinational, multiconfessionnel et multiculturel » ? Cependant, des problèmes spécifiques vécus par les Kurdes habitant différents pays, rendent la question de l'identité nationale kurde plus complexe. Mais cette conscience nationale qui existe chez les Kurdes, par le sentiment d’appartenir à un peuple partageant la langue et la culture, a largement été éveillée par l’engagement des mouvements nationalistes kurdes et l’essor des projets politiques, au fil du temps.
Table de matières
Introduction / 18 Principaux objectifs de la recherche / 23 Méthodologie / 24 Principaux concepts utilisés / 27 Echantillonnage / 28 Problèmes particuliers du terrain choisi / 31 Plan / 32
Première Partie : La Presse Kurde, Vecteur D’un Nationalisme Subjectif Et Imaginaire Avant 1991
1. Débat théorique sur la nation, l’identité et le nationalisme / 36 1.1. Les Kurdes en tant que Nation / 38 1.1.1. Le concept de nation : les caractères subjectifs et objectifs / 39 1.1.2. La dimension culturelle : Herder / 45 1.1.3 La dimension politique : Renan / 46 1.1.4 Les kurdes d’Irak avant 1991 et la question nationale : / 47 - Inadaptation du modèle « à chaque Nation un Etat, à chaque Etat une Nation » / 1.1.5. La langue kurde peut-elle favoriser une construction nationale ? / 48 1.1.6 Sur quelles bases se construit la nation kurde d’Irak ? / 49 1.1.7 La « Communauté imaginaire kurde » : Benedict Anderson / 50
1.2. L'identification : base de l'action nationaliste kurde / 52 1.2.1. Deux approches de l’identité nationale / 54 1.2.2. La Construction de l’identité nationale kurde : une réaction politique / 58
1.3. Le nationalisme kurde : un mouvement de construction d'identité nationale / 61 1.3.1. L’émergence du nationalisme au Moyen-Orient: Nationalisme kurde, un type nouveau / 63 1.3.2. Le rôle des intellectuels kurdes, acteurs d’une revendication « nationaliste » / 63 1.3.3. Rôle d’une intelligentsia occidentalisée / 65 1.3.4. Mouvement du nationalisme kurde : mobilisation identitaire / 66 1.3.5. Associations et publications : moyens de mobilisation / 68 1.3.6. L’échec des tentatives des nationalistes kurdes pour créer un Etat-nation / 70
2. La presse, un acteur décisif du nationalisme kurde / 73 1.2. La communication politique : moteur des discours nationalistes kurdes / 74 1.2.1. Le rôle de la presse dans la construction de la nation / 76 2.2. Kurdistan (1898-1902) : premier journal kurde « Réveil du peuple kurde » / 79 2.3. 2.2.1. La langue kurde : élément spécifique de l’identité / 80 2.2.2. Le choix du nom « Kurdistan » en 1898 : sentiment d’appartenance à un peuple distinct / 81 2.2.3. / Distinguer « Nous » et « Eux », une caractéristique de « Kurdistan » / 83
3. La création de l’Irak, intensification du sentiment identitaire kurde / 88 1.3. Expansion de l’identité nationale kurde, en réaction politique à la création de l’Irak, (Etat-Nation) / 88 1.3.1. Revendication d’un Kurdistan indépendant et publication des premiers journaux en langue kurde (1919 à 1927 révoltes de Cheikh Mahmoud Barzandji) / 93 1.3.2 Indépendance de l’Irak sous réserve de la préservation des droits culturels et administratifs des Kurdes (1932) / 95 1.3.3. Proclamation de la République irakienne, reconnaissance des Kurdes et de leurs droits nationaux (14 juillet 1958) / 98 1.3.4. La « Révolution du 11 septembre 1961 » et l’autonomie accordée aux Kurdes par le gouvernement irakien en 1970 / 101 - L’incidence politique de la mobilisation nationaliste / 102 1.3.5 Médiatisation de la question kurde et nouvelle autonomie accordée aux Kurdes par les pays occidentaux (1991) / 106 1.3.6. Emergence d’une nouvelle autonomie politique (De 1991 à 2003) / 108 1.3.7. Reconnaissance du Kurdistan dans l’Irak fédéré, Après Saddam, / 110 Conclusion / 111
Deuxième Partie : Le Nationalisme au Sein du Kurdistan d’Irak : une Objectivité et Une Indeniable Réalité Pour la Presse Kurde Depuis 1991
Introduction / 114 1. Contextes socio- politiques de l’émergence d’un nationalisme kurde relavé par la presse / 115 1.1. Construction d’un pouvoir politique kurde : Apres 1991 / 111 1.1.1. Mise en place de structures gouvernementales légitimes / 116 1.1.2. Débats juridiques autour de l’identité nationale kurde / 117 1.1.3. Un statut d’autonomie kurde au sein du gouvernement irakien, depuis 2005 / 119
1.2. Les dimensions culturelles et politiques de l’autonomie au Kurdistan d’Irak. / 121 1.2.1 Officialisation de la langue kurde au Kurdistan d’Irak : une exception / 121 1.2.2. Au temps du mandat britannique, des choix linguistiques particuliers / 122 1.2.3. Une pleine reconnaissance du Kurmanji comme du Sorani, En 1991 / 124
1.3. Enseignement en langue kurde / 125 1.3.1. Sous le gouvernement irakien : une forme de contrôle du nationalisme kurde / 126 1.3.2. L’enseignement en langue kurde : promotion du développement de la conscience nationaliste, Depuis 1991 / 122
1.4. Des journaux en langue kurde : une expansion du sentiment nationaliste / 130 -Une presse kurde censurée : Avant 1991 / 131 1.5. Multiplication des relations de reconnaissance mutuelle : Depuis 1991 / 133 1.6. La naissance d’une vie politique au Kurdistan d’Irak / 135
2. Les intellectuels et la presse kurde 1.2. Les intellectuels : acteurs omniprésents de la croissance du nationalisme kurde / 139 1.2.1. L’engagement des intellectuels kurdes dans la vie culturelle et politique, Entrel920 et 1958 / 140 1.2.2. L’engagement des intellectuels dans la résistance armée, De 1961 à 1991 / 142 1.2.3. Des intellectuels « engagés » dans la fondation du gouvernement du Kurdistan et des islamistes qui s’y invitent, à partir de 1991 / 146 1.2.4. Des intellectuels « engagés » dans la construction de la société civile kurde d’Irak, A partir de 2003 / 148
2.2. Les marqueurs de l’identité nationale kurde et leur écho dans la presse / 152 1.2.2. La langue kurde / 152 2.2.2. Le drapeau kurde : symbole d’identification / 156 2.2.3. L’hymne national kurde / 159 2.2.4. La cartographie paradoxale du Kurdistan / 162 2.2.4. Mémoire historique et conscience nationale / 166
3. Le nationalisme dans la presse kurde (Quatre journaux comme exemple) / 170 1.3. Xebat (Lutte) / 172 1.3.1. L’orientation politique / 172 1.3.2. Xebat, une fidélité au discours / nationaliste kurde traditionnel / 175
2.3. Kurdistani nwe (Nouvelle du Kurdistan) / 178 2.3.1 Orientation politique / 178 2.3.2. L’influence du nouveau statut kurde dans l’orientation rédactionnelle de Kurdistani Nw / 181
3.3 Yekigrtu (Confédération) / 183 3.3.1. Orientation politique / 183 3.3.2. Le discours de Yekigrtu et l’Umnia / 186
3.4. Hawlati (Citoyenneté) / 184 3.4.1. Orientation politique A'Hawlati / 188 3.4.2. La revendication citoyenne / 190 3.5. La contribution de la presse à l’identité nationale kurde / 192 Conclusion / 197
Troisieme Partie : L’aboutissement De La Construction D’identité Nationale Kurde : Quelle Citoyenneté?
Introduction / 199 1. De nouveaux acteurs ; de nouveau objective : l’engagement dans la société civile 1.1. L'engagement des femmes journalistes : un engagement politique marqué / 201 1.1.1. Les discours féminins : de la participation politique au crime d’honneur / 204
1.2. De nouveau « groupes professionnels » ; apparition d’un discours critique dans la presse kurde / 209 1.2.1 / L’émergence des discours pluriels / 212 1.2.2. / L’intérêt des lecteurs pour les nouveau discours / 215
2. Les Kurdistan d’Irak : un espace nationale que les médias relient à la mondialisation / 218 2.1. De la diaspora kurde à l’identité communautaires / ; / 219 2.1.2. Une sensibilité grandissante de l’opinion occidentale à la réalité kurde / 222
2.2. La naissance et l’essor d’une presse dite « en ligne », répercutés au-delà des frontières politiques / 224 2.2.1. Tout le monde peut-il devenir journaliste ? / 227
2.3. Représentant du gouvernement régional du Kurdistan (un lien de construction d’identité ) / 231
2. Obstacles au développement de l’identité nationale kurde, au Kurdistan d’Irak / 235
3.1. La langue kurde, comme un élément encore instable dans la construction culturelle de l’identité national / 235 3.1.1. L’usage du Sorani dans les milieux journalistiques / 237
3.2. Fragilités politiques au Kurdistan d’Irak, problèmes internes, relations internationales / 240 3.2.1. Limite imposée à une construction de l’identité nationale : la guerre civile / 242 3.2.2. Le Kurdistan d’Irak et ses voisins : des rapports difficiles / 245 3.23. La relation avec l’Etat fédéral irakien .double mouvement contradictoire « ré-irakisation » et « kurdistanisation » / 248 Conclusion / 254
Conclusion générale / 255
Bibliographie / 264
Annexe / 301
REMERCIEMENTS
Je tiens à exprimer ma sincère gratitude envers M. Farhad Khosrokhavar qui a dirigé ce travail, en y apportant suggestions et conseils éclairés. Je suis profondément reconnaissante de sa confiance et de son engagement.
Mes remerciements s’adressent également à Mme Pascale Gruson pour l’intérêt qu’elle a porté à cette étude depuis le début, pour ses relectures attentives et ses critiques. Je remercie très chaleureusement M. Bernard Hourcade, pour son soutien et ses précieux conseils, pareillement M. Hamit Bozarslan et Mme Joyce Blau pour avoir accepté de participer à mon jury de thèse.
J’exprime ma reconnaissance à tous ceux qui, au Kurdistan d’Irak, ont consenti à me rencontrer, à m’accorder leur temps et leur confiance sans lesquels ce travail n’aurait pas existé ; aussi les professeurs de l’université de Duhok, tout particulièrement M. Ismat Xalid, M. Dawod Atrouchi, M. Farhad Atroushi et Abbas Vali de Londres, pour leurs conseils avisés.
Mes remerciements s’adressent également à Madame Hélène Monot assistante chercheurs au CADIS, pour sa soutient, sa disponibilité et son aide administrative depuis le commencement de ce travail.
Je voudrais remercier l’Institut kurde de Paris, qui m’a accordé une bourse d’études en France, de 2003 à 2008.
Une mention particulière revient à mon amie Edith, qui a pris le soin de relire cette thèse, pour sa gentillesse depuis toujours et sa patience. Toute ma reconnaissance va à Charles pour ses encouragements, son amitié et son aide depuis mon arrivée en France. Je tiens également à remercier de tout mon cœur Mme Marlyse Lescot, sa fille Diane et son fils Michael qui m’ont accueilli au sein de leur famille durant quatre ans, et m’ont ainsi associée à une vie chaleureuse et familiale.
Pour leur aide et leur soutien inconditionnel, je remercie particulièrement mes sœurs et mes frères au Kurdistan d’Irak : leurs encouragements tenaces et inébranlables ont dépassé les frontières, et m’ont procuré la force et la persévérance nécessaires à ces longues années d’études en France.
Enfin, je souhaite témoigner ma profonde gratitude à toutes les personnes qui, à un moment ou un autre, m’ont assurée de leur amitié et de leur soutien : Mme Marie Fouladi, Mme Malouf, Rojda, Ahmad, François, Daniella, Charles, Tara, Shahla, Nahid, Fereshte, Kawa, Ali, Vali, Masoud, Armities, Azita, Arzo, ...
Que tous ceux que j’ai oubliés de citer nommément me le pardonnent ...
Introduction
La presse n’est pas seulement le lieu de l’information écrite, c’est aussi une forme d’interaction sociale.1 Elle organise entre ceux qui la détiennent un lien, une communauté faite de savoirs communs, de façons communes de se représenter le monde. Par leurs discours, les médias représentent la communauté et réactualisent sans cesse son identité.
Mais parallèlement, sans le partage d’une même identité, la communication devient impossible parce qu’elle suppose un creuset de valeurs, de références et de souvenirs communs. Le maintien des identités culturelles et des langues n’est possible que s’il existe des moyens de communication enracinés localement. « La communication a pour fin première d’organiser un espace social de consensus, une communauté d’identités partagées, de reconnaissance réciproque », souligne pertinemment André Akoun.5 L’information dispensée par les moyens de communication est une des médiations qui favorisent l’appartenance d’individus à une communauté.
C’est le rôle que joue la presse dans les pays occidentaux, après avoir profité pendant plus de trois siècles des progrès socio-économiques’6 techniques, juridiques et étatiques. Elle exerce désormais un quatrième pouvoir dans les pays industrialisés. Il en est tout autre pour les Kurdes que la privation de souveraineté a empêchés tout au long du vingtième siècle d’acquérir le plein contrôle des mécanismes étatiques, des médias, et surtout de la radio et de la télévision, essentielles à la diffusion et à l’imposition de critères d’identité « nationale » uniformes.
Seul le Kurdistan irakien fait exception à la règle : au terme de plus de quatre-vingts ans de conflits, conséquences des oppositions entre les mouvements nationalistes kurdes et les différents gouvernements irakiens, les Kurdes, bénéficiant des changements intervenus en 1991, ont construit une administration étatique et ont gouverné tant bien que mal leur propre territoire, en dépit d’une situation économique et politique difficile et de l’absence de toute reconnaissance officielle de la part des autres Etats. Nonobstant cette situation pour le moins inédite qui a perduré douze ans, le partage du Kurdistan et la guerre civile entre les deux principaux partis kurdes, le PDK et l’UPK, les Kurdes constituent désormais, et depuis 2005, la deuxième force politique du pays après les Chiites, et contrôlent une part importante du pétrole. C’est également un Kurde, Jalal Talabani, qui occupe le poste de président de l'Irak depuis 2005. La Constitution irakienne, négociée sous l’égide des Etats-Unis, et adoptée par référendum (à 79%) en octobre 2005, stipule que : « Le régime irakien est un régime républicain, parlementaire, fédéral et démocratique » et que « l'Irak est un pays multinational, multiconfessionnel ». Le fédéralisme garant de l’autonomie kurde, acquis de facto depuis 1992, est aujourd’hui une réalité. En décembre 2005, les élections législatives ont désigné un nouveau Parlement, où les Chiites (avec 128 sièges) et les Kurdes (avec 59 sièges) arrivent en tête. En mars 2006, Massoud Barzani a chargé les deux grands partis de la région de former un seul gouvernement contrôlant la zone autonome du Kurdistan irakien. La nouvelle Constitution reconnaît l’arabe et le kurde comme langues officielles et langues de travail pour l’ensemble de l’Irak ; les deux langues sont frappées sur la monnaie ; tout document officiel doit être rédigé en kurde au même titre que la langue arabe. (Article 9).
Les 503 journaux et magazines à qui cette expérience étatique (1991-2009) a donné l’opportunité d’être publiés, les dizaines de chaînes de télévision et de stations de radio qui ont pu diffuser en langue kurde ont été partie prenante de ce qui a constitué un mouvement journalistique sans précédent dans toute l’histoire du journalisme kurde. En parallèle, une nouvelle génération qui a grandi dans la Région du Kurdistan d’Irak, a intégré le milieu du journalisme. Mais cette génération n’a pas la maîtrise de la langue arabe et rejette les symboles de l’identité irakienne. Une enquête réalisée au cours de notre recherche en mars 2006 sur un panel de 100 étudiants à l'Université de Duhok a montré par exemple que 72 étudiants âgés de 19 à 22 ans ne parlaient pas couramment la langue arabe7 8 9. Le drapeau et l’hymne irakiens, qui tous …
4 Lits Marc, Récit, média et société, Louvain-la-Neuve, Académie Bruyant, 1996. p. 16. 5 Akoun André, Sociologie de la communication de masse, Paris, Hachette, 1997, p.12. 6 L’évolution socio-économique des deux derniers siècles, qui a entraîné en maints pays une urbanisation grandissante et une forte mobilité géographique, a contribué à détacher l’individu de ses groupes de proximité et à l’exposer à un cadre de vie plus complexe et plus précaire. Tel est l’argument de John B. Thompson, qui retrace le déclin des formes d’interaction directe, caractéristiques des communautés traditionnelles, et leur remplacement par des formes d’interaction indirecte ou médiatisée dans les sociétés modernes. Dans ces grands centres urbains aux cadres anonymes, les individus sont particulièrement exposés à l’influence exercée par les sources d’information omniprésentes que constituent les médias ,THOMPSON B. John, The Media and Modemity : a social Thory of the Media, Cambridge, Poity Press, 1955.
7 Voir article 1. 8 Voir l’article 3. 9 Il faut garder à l'esprit l’attitude des gouvernements successifs irakiens envers les Kurdes, essentiellement depuis l’arrivée du Parti Baas au pouvoir en 1968, avec une idéologie nationaliste arabe et la politique singulière d’arabisation des Kurdes irakiens. À maintes reprises les Kurdes ont été massivement exilés vers l'Iran, la Turquie et certains pays occidentaux. Citons les exemples suivants: l’exode des Kurdes chiites dans les années soixante-dix vers l’Iran, l’exode de 200,000 Kurdes en 1975 suite aux accords d’Alger de 1975 et la chute du mouvement de …
Construction of Kurdish national identity in the press in the Iraqi Kurdistan (1991-2010) Abstract
In this paper we extend the scope of the investigation of Iraqi Kurdistan to the Middle East and the birth of State-Nations in the région. We describe the appearance of the constructive éléments of the Kurdish national identity in the press and the emergence of the new actors since the events of 1991 in Iraqi Kurdistan. It's only after eighty years of war épisodes between the Kurdish nationalist movements and the different Iraqi govemments, that the Kurdish, taking advantage of the changes occurred in 1991, constructed a State administration and, despite the économie and political difficulties and the absence of official récognition from other States, govemed their territory somehow well. So we try to understand the rôle of the press in this period, analysing four of the mainstream newspapers which hâve been instrumental in the birth of national and cultural conscience, and published by different steering groups (nationalist, islamic and independent).
Doing so, we try to discover the real dimension of the constructive éléments of the Kurdish identity in the press, and the emergence of new social actors such as the students, the women and the professional joumalists. Among these éléments, we study more peculiarly the birth and the évolution of the language, and the other éléments of Kurdish national identity, before pursuing the path of national demands which was adhered to by a part of Kurdish press in the past century, becoming sometimes themselves a real political platform for a partial or total independence of Kurdistan. Departing from this assessment, this thesis undertakes to examine the following questions : How has the notion of Kurdish national identity emerged in the History ? Who are the actors of the construction of Kurdish national identity ? How the meaning of this national identity has evolved over the years? Is Kurdish identity, denied and suppressed by the slogan of Baas Party in power for décades : “One and Unique Arab Nation with One and Unique Eternal Mission", different from the one that Jalal Talabani, kurd and president since 2005, tries to represent in a “multinational, multidimensional and multicultural” Iraq ?
Nevertheless, the spécifie problems facing the Kurdish living in other countries, makes the question of Kurdish national identity more complex. But this national conscience which exists among Kurdish people, stemmed from the feeling of belonging to the same people sharing the same language and culture, has been widely awakened over the time by the involvement of nationalistic movements and the rise of the political projects.
Zubeida Abdulkhaliq
La Construction de l’Identite Nationale Kurde dans la Presse, Au Kurdistan d’Irak, de 1991 à 2010
EHESS
Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales La Construction de l’Identite Nationale Kurde dans la Presse, Au Kurdistan d’Irak, de 1991 à 2010 Zubeida Abdulkhaliq
These de Doctorat Sociologie
Sous la direction de Farhad Khosrokhavar Présenté et soutenue publiquement Le 13 février 2012
Jury : Joyce Blau, Professeur émérite, INALCO Hamit Bozarslan, Directeur d’études, EHESS Bernard Hourcade, Directeur de recherche, CNRS Farhad Khosrokhavar, Directeur d’études EHESS, directeur de thèse