Ma maison de guerre
Seyhmus Dagtekin
Le Castor Astral
« Je suis un curieux vertébré qui imagine se faire un monde, une maison avec des mots qui ne seraient même pas les siens. Parce que certains voudraient que les mots aussi aient leurs apparte¬nances. Et les mots se laissent avoir, se laissent enfermer dans des enclos. Ils se mettent dans toutes les bouches, s’épuisent à toutes les besognes comme si un ressort avait dû céder dans la langue. Mais je crois au verbe, à la force instituante de la parole. L’essentiel serait de retrouver le ressort cassé, le lien fondateur entre le mot et nos êtres. Pour parvenir, un jour, à ce mot qui nous refonderait, nous pousserait à exister pleinement, avec qui et où que l’on soit. »
Seyhmus Dagtekin est né en 1964 à Harun, village kurde dans les montagnes du sud-est de la Turquie. Après des études en audiovisuel à Ankara, il arrive à Paris en 1987 où il vit depuis. Né au français à l’âge de vingt-deux ans, il est l’auteur d’un roman (À la source, la nuit, Robert Laffont) et de recueils de poésie dont Les Chemins du nocturne (Le Castor Astral), Prix international de poésie francophone Yvan Goll, et Juste un pont sans feu (Le Castor Astral), prix Stéphane Mallarmé et prix Théophile Gautier. Table
I. Mais le rire viendra / 7 II. Célébration / 11 III. Où le feu s’affranchit des noms / 29 IV. Dire à part / 53 V. L’obscure permanence du désir / 71 VI. Fermé sera le nord / 93 VIL Le poème amoureux ? / 105
I
Mais le rire viendra
J’aurais voulu habiter la statue de la liberté, la jungle qui est dans sa tête Les tortues, les léopards, les éléphants qui sont sur l’herbe au-dessus de sa tête En vrai, la statue de la liberté est un dragon Un dragon camélébn qui pousse sur toutes les balles perdues Moi, je suis une balle perdue qui n’arrive pas à se retrouver parmi les autres Une balle perdue qui se couvre de ton ombre Moi, je suis une balle perdue qui frappe la joue diablement belle de la dragonne, Une balle de rumeur dans un bol de riz que je tiens sous ton nez Une balle perdue qui me prend pour ton œil, me presse contre ton cou comme un dé à rejouer entre tes seins Une balle dans les prés, dans les jungles de ta statue / Casser la gueule, t’as vu ça, au serpent qui creva Tunique hachée, bouche aimée, des vaux-rien dans tout ça T’as pas le monopole du monde, ni celui des mouches, ni celui du sable gobé, ni celui des lèvres écarlates Ça bombe le verbe, ça tombe le cœur, fait beau Ça se chauffe aux bisons, aux tisons, ça bombe le torse, fait pas beau
Taisons tes fronts, tes tendons Moi, une balle perdue / Ah ! ce sein doux que je mélange à ton pain
Le rire viendra comme une décharge de sable dans tes semelles
II
Célébration
Ci-gît tout poème Moi dedans Toi le dehors du poème Moi eau Toi coulée du poème Pour ne sortir que lentement de la durée Loin de toute permanence
….. Seyhmus Dagtekin
Ma maison de guerre
Le Castor Astral
Le Castor Astral Ma maison de guerre Seyhmus Dagtekin
Ma maison de guerre est le huit cent soixante-quatrième ouvrage publié par Le Castor Astral
www.castoras tral.com © Le Castor Astral, 2011 castor.editeur@wanadoo.fr
ISBN 978-2-85920-864-6
Cet ouvrage a été achevé d’imprimer par l’Imprimerie Floch à Mayenne le 23 mai 2011. Photocomposition Ateliers Graphiques de l’Ardoisière.
N° d’impr. : 79741 Dépôt légal : juin 2011 Imprimé en France
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Destûra daxistina; vê berhêmê nîne.
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