1915, le génocide des Arméniens
Gérard Chaliand,
Editions Complexe
En mai 1915, la nouvelle tombe sur les téléscripteurs des organes de presse, confirmée par les dépêches des consuls: les massacres d’Arméniens reprennent à travers l’Empire ottoman. Les puissances centrales alliées et celles de l’Entente en conflit avec la Turquie s’inquiètent à des titres divers. Depuis 50 ans, elles savent ce que signifient ces violences sporadiques. Dans les circonstances présentes, elles ne peuvent que nuire aux intérêts de tous. D’autant plus qu’il apparaît rapidement, par recoupement des renseignements, que l’on est en présence d’un vaste projet d’anéantissement de tous les Arméniens de Turquie. La Wilhelmstrasse en est rapidement informée. Berlin, comme Vienne, suivent le déroulement de l’opération et comprennent vite devant la résolution turque qu’ils n’ont pas les moyens d’intervenir diplomatiquement. Les Allemands se borneront à réunir un dossier de documents écrits et photographiques à seule fin de se disculper plus tard.
Les membres de la Triple Entente ont, eux, au contraire, tout intérêt à diffuser l’information et à dénoncer la Turquie devant l’opinion mondiale. L’agence Havas révèle le contenu d’un télégramme que les trois ministres des Affaires étrangères de l’Entente — Grey, Delcassé et Sazonov — ont adressé le 24 mai à la Sublime Porte: ils tiendront personnellement responsables ceux qui auront ordonné les massacres et ceux qui les auront ... |