La stratégie des institutions politiques du Kurdistan irakien
Saywan Barzani
Université Paris I
L'image du Kurdistan, et des populations kurdes qui le composent, est souvent ignorée du grand public, voire mal perçu car vue au travers d'un prisme qui en tronque une partie de ses aspects.
Répartis sur 503 000 km² d'un seul tenant², vivant à la fois en Turquie, Iran, Irak, Syrie et sur quelques-uns des territoires de l’ex-Union soviétique³, les Kurdes constituent une minorité inégale dont l'intégration et les conditions de vie sont intiment liées aux gouvernements dont ils dépendent.
L'objet de ce mémoire ...
Sommaire
Introduction / 5
Premiere Partie
La période transitoire : une internationalisation de la question kurde en Irak conduisant à une véritable autonomie politique (P.13)
Chapitre I Les facteurs de l'accession des Kurdes à une autonomie réelle / 14
Section I La seconde Guerre du Golfe et ses conséquences pour le Kurdistan irakien / 14
Section II L’exode kurde et l’internationalisation de leur problème / 21
Chapitre II Le Front du Kurdistan : une autorité à la recherche d’une légitimité / 27
Section I Le Front du Kurdistan devenu l’autorité politique de facto au Kurdistan / 27
Section II Une difficile organisation matérielle des élections / 30
Section III Les élections du 19 mai 1991 : une expérience démocratique / 33
Deuxieme Partie La création des institutions politiques du Kurdistan dans une incertitude permanente / 40
Chapitre I La nature et les attributions des nouvelles institutions politiques / 41
Section I L’Assemblée Nationale du Kurdistan :
un parlement monocaméral aux pouvoirs “illimités / 41
Section II Un exécutif officiellement bicéphale / 47
Section III La déclaration unilatérale d'un système fédéral / 51
Chapitre II Le dysfonctionnement du régime politique : ses causes et ses conséquences / 56
Section I Un fonctionnement difficile des institutions / 56
Section II La guerre civile et la paralysie des institutions / 61
Section III La survie des institutions dans une stabilité relative du système politique / 67
Conclusion / 70
Bibliographie / 74
Annexes et cartes / 75
Table des matières / 109
AVANT PROPOS
Le Kurdistan irakien est une région isolée du monde extérieur, géographiquement, politiquement, mais aussi culturellement. Les moyens de communication, y compris la poste et le téléphone y sont officiellement interdits et souvent inaccessibles pour la plus grande part de la population. Les entrées et sorties de la région sont restreints, voire nuis, du fait de l’inexistence d’un passeport kurde et de l’absence de reconnaissance des Kurdes par la communauté internationale. Dans ce contexte, l’existence officielle de l’individu lui-même au Kurdistan irakien est chose bien abstraite.
A la suite des événements qui ont succédé à la guerre du Golfe de 1991, le Kurdistan est soustrait à l’autorité centrale du gouvernement de Bagdad et bénéficie de la protection bienveillante de la coalition américano-britannique qui en interdit le survol de son espace aérien. Cette région vit alors dans une situation unique en son genre sur le plan du droit international. Elle reste en effet en dehors de l’autorité étatique officielle de l’Irak, mais dans le même temps, la région ne peut accéder à son indépendance ; ceci constitue un dilemme insurmontable.
Le Kurdistan a payé un lourd tribut au cours des différents affrontements qui l’ont opposé au régime répressif irakien. Qualifiés de génocide¹, ces crimes, déportations, exécutions et bombardements chimiques ont fait prendre conscience à la communauté internationale du problème kurde. Cette répression a été condamnée par le Conseil de Sécurité de l’ONU dans sa résolution 688 mais qui n’a guère résolu la singularité de sa situation politique.
Dès les retraits militaires et administratifs irakiens du Kurdistan le 23 octobre 1991, les partis politiques kurdes se sont organises pour administrer leur pays indépendamment de l’autonte étatique de Bagdad. Des élections politiques ont été organisées et des institutions politiques, qui fonctionnent-elles aussi hors de la tutelle irakienne, ont vu le jour. Face a cette situation delicate a gcier, mais qu'ils sont finalement parvenus à surmonter, les Kurdes cherchent désonnais à s’adapter à leur environnement géopolitique particulier.
Quelle est la stratégie des Kurdes face à cette position à la fois inconfortable et singulière ? Quelle est la situation économique du Kurdistan irakien ? Comment les Kurdes ont-ils adapté leurs lois et leurs institutions à cette situation de semi-indépendance ? De quelle manière sont-ils parvenus à composer un gouvernement régional en tenant compte de la particularité de chacun des partis politiques et comment ont-ils géré leurs relations internationales ?Autant de questions auxquelles ce mémoire va tenter de répondre.
¹ “ Extrait du rapport de l’ONU sur les violations des droits de l’homme en Irak, 1991 ” Elections sans frontières-rapport de groupe juridique international pour les droit de l’Homme, page 30, traduction arabe, éd. CBSR, Erbil 1999.
Introduction
L'image du Kurdistan, et des populations kurdes qui le composent, est souvent ignorée du grand public, voire mal perçu car vue au travers d'un prisme qui en tronque une partie de ses aspects.
Répartis sur 503 000 km² d'un seul tenant², vivant à la fois en Turquie, Iran, Irak, Syrie et sur quelques-uns des territoires de l’ex-Union soviétique³, les Kurdes constituent une minorité inégale dont l'intégration et les conditions de vie sont intiment liées aux gouvernements dont ils dépendent.
L'objet de ce mémoire est de se limiter géographiquement au seul Kurdistan irakien et d’en étudier plus particulièrement la stratégie de mise en place des institutions politiques kurdes depuis 1991, date à laquelle les Kurdes ont pris le contrôle d’une grande partie de leur territoire et ont décidé de constituer un système politique adapté à leur situation propre.
Avant d'aborder la période consacrée au mémoire (1991-2001), il convient d'effectuer un bref historique afin de saisir à la fois l'origine et la singularité du Kurdistan irakien.
A la fin de la première guerre mondiale la wilaya de Mossoul était sous souveraineté ottomane. Après la proclamation de l’armistice à Moudras entre les Britanniques et l'empire ottoman le 31 octobre 1918, l'armée anglaise se trouve à 20 km de Mossoul. Les Britanniques s'emparent de la ville le 7 novembre 1918. Cette action, contestée par la Turquie kémaliste, signifiait tout simplement la séparation entre la grande majorité des Kurdes restés dans ce qui s'appellera la Turquie et les Kurdes sous administration anglaise.
La délégation kurde venue en France après la guerre pour revendiquer l'indépendance obtient dans le traité de Sèvres du 16 août 1920 la promesse d'un Etat autonome puis indépendant si la population kurde le revendique (articles 62, 63 et 64). Cet engagement des occidentaux et des Turcs ne sera pas respecté et dans le traité de Lausanne du 24 juillet 1923 la Turquie gardera la majeure partie du Kurdistan du Nord.
…..
² Kurdistan, An economic, geographic and historical brief explanation, Central Bureau of Studies and Research, Study n° 33, Erbil, Kurdistan irakien 1999.
³ Voir les cartes du Kurdistan dans les annexes pages 76 et 86.
Saywan Barzani
La stratégie des institutions politiques du Kurdistan irakien
Université Paris 1
Université Paris 1
Pantheon-Sorbonne
La stratégie des institutions politiques du Kurdistan irakien
Saywan Barzani
Sous la direction de
Monsieur le professeur Michel Lesage
DEA Gouvernement
Option : Institutions Politiques
Département de Science Politique
Université Paris 1
Pantheon-Sorbonne
Année universitaire
2000-2001