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Le passage d’une confrérie soufie au politique


Auteur : Awaz Salihi
Éditeur : EPHE Date & Lieu : 2016, Awaz Salihi
Préface : Pages : 418
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 200x285 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Sali. Pas. N° 5152Thème : Thèses

Le passage d’une confrérie soufie au politique

Le passage d’une confrérie soufie au politique

Awaz Salihi


EPHE


Cette recherche étudie le passage d’une confrérie soufie au politique, avec pour exemple la Kasnazâniyya au Kurdistan d’Irak (1979-2014). Elle tente de saisir et d’analyser, dans le contexte irakien, les éléments de conjoncture qui ont conduit d’abord à la politisation de la confrérie comme une étape de « prédisposition », ensuite à son passage direct au politique. Dans une perspective historique, cette recherche vise à comprendre les racines du phénomène de l’implication des cheikhs et des confréries en politique au Kurdistan dès le 19e siècle. Cette démarche s’impose en effet pour déchiffrer les caractéristiques originelles du phénomène et les examiner ensuite à travers le cas de la Kasnazâniyya. Du point de vue de la politisation de la confrérie, nous étudions dans un premier temps au cours de l’histoire récente de la confrérie son impact socio-politique tout en examinant sa doctrine, ses branches, les modalités de succession au pouvoir de son cheikh, et l’impact de ce dernier sur l’orientation de la confrérie. Puis nous traitons dans un deuxième temps du phénomène de « rationalisation », à partir de la question de l’organisation et de la « bureaucratisation » de la confrérie. Du point de vue de l’articulation entre la Kasnazâniyya et le politique, nous étudions d’abord le phénomène des rapports de « clientélisme politique », puis analysons le parti politique créé par la confrérie dans son histoire, ses idées, son mode d’organisation et ses stratégies sociales, politiques et électorales pour parvenir au pouvoir.


Table des matières

Système de transcription des lettres arabes et kurdes / 7

Introduction / 11
Méthodologie / 15
Période de temps prise en compte dans cette recherche / 19
Le choix du terrain de recherche / 21
Les obstacles à la recherche / 22
Plan de thèse / 23
Première Partie / 25
Genèse des confréries soufies et de leur mobilisation en politique au Kurdistan début du 19e jusqu’au début du 20e siècle / 25
Considérations préliminaires / 26

Chapitre 1 / 28
1.1. Aperçu historique du contexte général du Kurdistan au 19e siècle ; / 28
1.2. Soufisme, histoire et expansion au Kurdistan irakien / 36
1.3. La Qâdiriyya / 39
1.4. La Naqshbandiyya / 46
1.5. Le fondement religieux du statut de cheikh / 52

Chapitre 2 / 58
2.1. Le régime de distribution des terres et son impact sur la position sociale des cheikhs / 58
2.2. L’organisation tribale, comme élément de consolidation dupouvoir du cheikh / 65
2.3. Implication directe des cheikhs en politique / 74

Deuxième Partie / 81
La Kasnazâniyya : histoire, doctrine et pouvoir du cheikh / 81
Considérations préliminaires / 82

Chapitre 1 / 85
1.1. Histoire et fondation / 85
1.2. L’origine du nom de Kasnazâniyya et son historicité / 91

Chapitre 2 / 98
1.1. Généalogie de la Kasnazâniyya et ses branches / 98
2.2. Les règles de la succession à la direction de la Kasnazâniyya / 107

Chapitre 3 / 115
3.1. Les rites et leur pratique : une implication dans la vie de lasociété / 115
3.2. L'adhésion à la Kasnazâniyya : une démarche d’ouverture qui vise la diversité Irakienne / 125

Chapitre 4 / 138
4.1. Le statut du cheikh de Kasnazâniyya et ses dimensions sociales et politiques / 138
4.2. Le cheikh Muhammad et ses consécrations pour la confrérie / 146

Troisième Partie / 156
La rationalisation de la Kasnazâniyya : vers une confrérie bureaucratisée / 156
Considérations préliminaires / 157

Chapitre 1 / 161
1.1. L’organisation de la Kasnazâniyya / 161
1.2. Les « takiya-s » chez la Kasnazâniyya, leur fonctionnement et leur répartition / 184

Chapitre 2 / 192
2.1. Discours contemporain de la Kasnazâniyya : une offre pour réconcilier l’islam avec la
Modernité / 192
2.2. La Kasnazâniyya et les moyens de communication de masse / 201

Quatrième Partie / 207
Le clientélisme politique, source de mutation et de politisation / 207
Considérations préliminaires / 208

Chapitre 1 / 211
1.1. La Kasnazâniyya sous le régime de Saddam Hussein / 211
(1979-2000) / 211
1.2. Clientélisme et alliance avec l’Union Patriotique du Kurdistan (2000-2003) / 216
1.3. Clientélisme et alliance avec la Coalition anti-Saddam Hussein et contribution à la chute du régime (2002-2004) / 222

Chapitre 2 / 226
2.1. Diversité du clientélisme : revirements et contrariétés pour la confrérie / 226
2.2. Le contexte socio-politique de l'Irak au lendemain de la chute de régime et son rôle dans la politisation de la confrérie / 232
Cinquième Partie / 236
Les démarches concrètes de la Kasnazâniyya en politique / 236
Considérations préliminaires / 237

Chapitre 1 / 240
1.1. La Coalition de l’unité irakienne : son histoire et ses liens avec laKasnazâniyya / 240

Chapitre 2 / 260
2.1. Légitimité politique et ses démarchesconcrètes pour s'introduire enpolitique / 260
2.2. Stratégies sociales et politiques / 271

Chapitre 3 / 278
3.1. Le Conseil Central des Confréries Soufies en Irak, une structure politique et religieuse / 278
3.2. Stratégies électorales et alliances politiques/ 291
Conclusion / 307

Les sources / 312

Bibliographie / 315

Les entretiens / 331

Glossaire / 334

Terme soufis et religieux / 334

Personnalités / 337

Alliances et listes électorales majeures depuis les élections de janvier 2005 jusqu’en 2014 / 340

Annexes / 345

Annexe 1 : Image de différents aspects de la confrérie / 346
Annexe 2 : Documents de la confrérie378
Annexe 3 : Documents de la CUNI/CUI / 398
Annexe 4 : Cartes / 415

Résumé / 417


REMERCIEMENTS

Je remercie Monsieur Pierre-Jean Luizard, mon directeur de recherche qui a accepté de diriger ce travail.

Je suis infiniment redevable à Monsieur Kendal Nezan, directeur de l’institut Kurde de Paris à Monsieur Fouad Hussein, et au docteur Nadjmadîn Karîm pour leur soutien dès mon arrivée en France pour poursuivre mes études.

Je suis particulièrement reconnaissante à l’égard de Sylvie Nordmann, Luai Jaff, Ali Dolamari et Madame Joyce Blau pour m’avoir soutenue dans la réalisation de ce travail.

Je remercie ma chère famille pour leur soutien et leur amour sans limites et leur patience sans fin dans ce long parcours d’études en France. Une reconnaissance particulière à l’égard de mon père pour m’avoir soutenu et accompagné durant toutes mes recherches sur le terrain.

Je remercie cheikh Muhammad et cheikh Qâdir, leurs derviches et califes qui m’ont accueillie, fait confiance et facilité mon travail sur le terrain.

Un remerciement particulier à Janine de Jardin et à Viviane qui ont effectué généreusement un long travail de relecture.

Je suis très reconnaissante à l’égard de Gérard Gautier qui a accepté de corriger la version finale de cette thèse.

Enfin j ’adresse ma reconnaissance à ma meilleure amie Hasiba et à sa famille !
À toutes celles et tous ceux qui m’ont soutenue un jour, j’adresse ma plus vive gratitude.

Introduction

« [...] il est interdit à nos derviches de participer à d’autres partis politiques. Si vous êtes adhérent d’un parti politique, vous devez y renoncer. Si l’un parmi vous prétendait continuer, il serait exclu de notre tarîqa. Jusqu’à aujourd’hui l’Irak était dans le chaos ! Vous devez retourner dans votre tarîqa. Vous, vous avez votre groupe politique [CUNI/CUI]1 qui vous représente, votre coalition est bénie ! Il est composé de califes, de derviches, d'intellectuels et de chefs de tribus qui travaillent pour un Irak démocratique ! Pluraliste ! Pour un Irak des cheikhs, d’Hussein (fils de l’imam Ali), du cheikh al-Gaylânî [...]. Vous suivez la plus importante personnalité ! Le chemin d’Hussein ! Le plus grand martyr ! [...] Sacrifiez votre âme, votre vie pour l’Irak [...] ».2

Cette citation provient du discours3 du cheikh Muhammad, cheikh actuel de la Kasnazâniyya, prononcé à l’occasion de la réunion annuelle avec ses califes venus de toutes les provinces irakiennes, un an après la chute du régime de Saddam Hussein. S’il marque le passage et l’implication directe de la Kasnazâniyya en politique, il renvoie aussi au début de la mobilisation directe des confréries soufies dans la sphère politique irakienne post-Saddam. Ce discours marque également une rupture dans la ligne politique des confréries soufies au Kurdistan irakien, des confréries longtemps considérées comme des partenaires déterminants dans la lutte en faveur de la question kurde en Irak4. 

La Kasnazâniyya est une branche de la confrérie Qâdiriyya au Kurdistan irakien, fondée au 19e siècle par le cheikh ’Abdul Karîm Shâhî Kasnazân (1819-1899), Kurde sunnite de rite « chafiite »5, dans la région de Qeredâgh, située dans la province de Sulaymâniyya. A partir de la quatrième génération de ses cheikhs, cheikh ’Abdul Karîm et son successeur, cheikh Muhammad, la confrérie étend son influence dans les régions sunnite et chiite de l’Irak. Elle fédère différentes composantes ethniques (kurde, arabe et turcomane) et les membres des deux confessions de la religion musulmane en Irak. Sur le plan structurel, elle est dirigée par le « Riâsat al-tarîqa al- ’Aliyya al-Qâdiriyya al-Kasnazâniyya » (Présidence de la confrérie d’Aliyya de la Qâdiriyya de la Kasnazâniyya) qui opère depuis le « takiya »6 central, situé depuis l’année 2000 dans la ville de Sulaymâniyya, au Kurdistan irakien. Subdivisée en bureaux et commissions, l’organisation assure une bonne gestion de la confrérie dans l’ensemble de l’Irak, notamment en matière de communication et d’organisation des missions de « da’wa » (appel)7, d’installation de nouveaux « takiya-s » et d’organisation de conférences et de cérémonies religieuses. Le cheikh est établi depuis 2011 à Amman, où il a ouvert un nouveau « takiya ». Ainsi le « takiya » central de Sulaymâniyya assure la gestion et la continuité de l’élargissement de la confrérie, même en l’absence de son cheikh.

A partir de l’année 2003, au lendemain de la chute du régime de Saddam Hussein, la Kasnazâniyya a fondé son propre parti politique. Du point de vue de son implication dans le processus politique, celui-ci a participé à toutes les élections irakiennes depuis la chute du régime. A la suite de l’élection législative irakienne tenue en avril 2014, la formation politique de la confrérie, dans le cadre de sa coalition avec la liste d’ « al-Wataniyya8 », a obtenu deux sièges au parlement irakien, occupés par deux des fils du cheikh Muhammad : un dans la province d’Anbâr et l’autre dans la province de Bagdad. Bien que née au Kurdistan, lieu de départ de son identité et de son histoire religieuse (et où se trouvent les mausolées de ses fondateurs, ses « lieux saints »), la Kasnazâniyya se désintéresse de la sphère politique kurde.

1 Acronyme du parti politique déclaré par la Kasnazâniyya en 2003, tout de suite après la chute du régime de Saddam Hussein. Depuis sa fondation jusqu’à ce jour, le parti est présidé par le cheikh Nehro, également futur successeur de la Kasnazâniyya ; parmi ses deux adjoints, l’un est son frère, le cheikh Ghândî. A ses débuts, le parti s’appelait « Tadjammu' al-wahda al-wataniyya al-’irâqî » (Coalition de l’unité nationale irakienne « ci-après CUNI »), et depuis 2012 a été rebaptisé « Tadjammu ’ al-wahda al- ’irâqiyya » (Coalition de l’unité irakienne « ci- après CUI »). Pour éviter toute confusion par apport aux données que nous exposons dans cette recherche, nous citons les deux sigles par ordre de leur apparition : CUNI/CUI.

2 Extraits du discours de cheikh Muhammad prononcé lors de sa réunion avec les membres de sa confrérie et les membres de la direction de la CUNI/CUI, organisée à Sulaymâniyya dans le « takiya » central le 07/05/2004.

3 Nous présenterons l’analyse du contenu de l’extrait de ce discours quand il sera évoqué ultérieurement dans cette thèse.

4 Pour aller plus loin dans la littérature sur la question kurde en général et de Kurdistan irakien particulier :
Bozarslan Hamit, La question kurde. États et Minorités au Moyen Orient, Presses de Sciences Po, Paris, 1997, 383 p. Il s’agit d’un ouvrage qui analyse la question kurde dans toutes ses dimensions historiques, politiques, religieuses et économiques, en se situant dans une perspective sociologique des mouvements minoritaires.
Jmor Salah, L'origine de la question kurde, L’Harmattan, Paris, 1994, 283 p. Cet ouvrage est consacré à l’histoire de la question kurde depuis le début du 20e siècle à partir des traités politiques.
BARZANI Saywan, Le Kurdistan d'Irak 1918-2008, L’Harmattan, Paris, 2009, 290 p. Il s’agit d’un ouvrage qui traite de la question kurde en Irak depuis la fin de la Première Guerre mondiale jusqu’à 2008.
Il présente également une analyse de l’évolution de la question kurde en Irak depuis 1991.

5 Une des quatre écoles d’interprétation théologique « madhhab » de la confession sunnite qui sont : chafiisme, hanafisme, hanbalisme, malékisme. Les Kurdes sunnites dans leur majorité sont des adeptes de ce rite. D’après les interprétations du cheikh Muhammad, les raisons du choix de ce rite sont : premièrement que l’école de l’intérprétation fondée par al-Shâfi’î est l’une des plus modérées des écoles d’interprétation théologique du sunnisme ; deuxièmement, qu’ai- al-Shâfi’î est l’un des adeptes de la vénération des descendants du prophète ; troisièmement, qu’il eut des compagnons soufis à une période de sa vie. De plus, selon la doctrine de la confrérie, les disciples ne sont pas obligés de suivre le rite de leur cheikh, étant donné que leur seule vocation est de pratiquer la méthode de la confrérie.

6 Centre de culte de confrérie où les « dhikr al-silsila-s », les cérémonies religieuses sont organisées et les affaires de la confrérie gérées.

7 Mission de l’appel au recrutement vers la confrérie.

8 Coalition formée et présidée par Ayâd ’Allâwî et regroupant 20 formations politiques pour participer à l’élection législative de 2014. Elle a obtenu 21 sièges sur 328 au parlement irakien.


Awaz Salihi

Le passage d’une confrérie soufie au politique

EPHE

École Pratique des Hautes Études
Le passage d’une confrérie soufie au politique
La Kasnazâniyya au Kurdistan-Irak (1979-2014)
Awaz Salihi

Mention « Religions et systèmes de pensée »
Ecole doctorale de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes
[Laboratoire GSRL]

Le passage d’une confrérie soufie au politique
La Kasnazâniyya au Kurdistan-Irak (1979-2014)
Par Awaz Salihi

Thèse de doctorat de Sociologie
Sous la direction de M. Pierre-Jean Luizard
Soutenue le 28 novembre 2016

Devant un jury composé de :
Mme. Joyce BLAU, Professeur à la retraite, l’INALCO.
M. Gilles Dorronsoro, Professeur de Sciences Politiques, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, (rapporteur)
M. Halkawt Blakem, Professeur à l’INALCO.
M. Pierre-Jean Luizard, Directeur de recherche, GSRL (CNRS/EPHE), (directeur de thèse)
M. Alexandre Papas, Chargé de recherche, CETOBAC (CNRS/EHESS), (rapporteur)

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