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Les dialectes d'Awromān et de Pāwä


Auteur :
Éditeur : Bianco Lunos Bogtrykkeri Date & Lieu : 1921, København
Préface : Pages : 128
Traduction : ISBN :
Langue : Français, KurdeFormat : 145x230 mm
Code FIKP : Lp. Gén. 1.Thème : Linguistique

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Les dialectes d'Awromān et de Pāwä

Les dialectes d'Awromān et de Pāwä

Âge Meyer Benedictsen,

Bianco Lunos Bogtrykkeri


Pendant un voyage d'exploration en Perse que j'ai entrepris dans les années 1900 1902, j'ai passé quelques mois (été et automne 1901) dans l'ouest de ce pays. Mon but principal était d'examiner l'état des tribus kurdes et de recueillir des textes dans leurs dialectes. Pendant mon séjour dans la ville de Sännā, chef-lieu de la province persane de Kurdistân-i-cajâm, j'appris que les habitants d'Awromān, pays montagneux situé au nord-ouest, à une distance de deux petites journées de voyage de Sännā, parlaient un dialecte particulier que ne comprenaient ni les Persans ni les Kurdes, et que ce dialecte avait été plus répandu



PREFACE I

Pendant un voyage d'exploration en Perse que j'ai entrepris dans les années 1900 1902, j'ai passé quelques mois (été et automne 1901) dans l'ouest de ce pays. Mon but principal était d'examiner l'état des tribus kurdes et de recueillir des textes dans leurs dialectes. Pendant mon séjour dans la ville de Sännā, chef-lieu de la province persane de Kurdistân-i-cajâm, j'appris que les habitants d'Awromān, pays montagneux situé au nord-ouest, à une distance de deux petites journées de voyage de Sännā, parlaient un dialecte particulier que ne comprenaient ni les Persans ni les Kurdes, et que ce dialecte avait été plus répandu autrefois. Il y avait encore à Sännā, me disait-on, des gens savants qui savaient et parlaient »Māču« - telle était la désignation populaire de ce dialecte, d'après le mot awromānī māču, »je dis«.

J'ai trouvé alors sans difficulté un jeune molla qui pût m'initier aux mystères de cette langue. Son nom était 'Abdu-l-Gâfûr. Il était lui-même Awromānī, originaire du village de Rūwār (Rūdābār). Pendant les cinq semaines que dura mon séjour à Sânnâ, je travaillais avec lui chaque jour; il me dicta une série de textes awromānīs, me les traduisit et m'en expliqua, en persan, les passages difficiles. J'ai fait des notices sur la grammaire awromānīe, surtout sur la conjugaison des verbes. 'Abdu-l-Gâfûr était ordinairement un compagnon de travail assez accomodant, mais quelquefois il s'impatientait et refusait de répéter ce qu'il avait dit.

Au commencement du mois d'août j'entrepris un voyage au pays même des Awromānīs et fis un séjour de quelques journées dans le village de Naw-e-Sūtā, étant l'hôte du khan de Lohūn, qu'on désignait généralement sous le titre de sultān-e-Lohūn. Sous les yeux du khan soupçonneux j'y ai noté encore quelques contes populaires. Les habitants en savent beaucoup, à ce qu'il semble, mais je ne réussis pas à trouver des chansons populaires awromānīes: toutes leurs chansons étaient en langue kurde.
Mon travail dans le pays d'Awromān, s'est effectué dans des conditions très défavorables. Le »sultan«, qui ne comprenait pas mon intérêt linguistique, me regardait avec une méfiance croissante. On interrompait toujours de nouveau mon travail. C'étaient des demi-menaces et à la fin une inimitié ouverte: on désirait me voir partir au plus tôt. «Qu'est-ce que tu veux savoir?« me demandait le »sultan«; un bœuf s'appelle comme ça, un fusil comme ça, un cheval comme ça; il ne faut pas longtemps pour noter cela, et puis, insallah, tu reviendras à ta patrie. »Le soupçon du chef rendait les gens tantôt timides, tantôt grossiers, et me força de partir plus tôt que je ne l'eusse désiré. Dans un certain village on me refusa le feu et l'eau pomme faire partir.

Le domaine actuel du dialecte awromānī se réduit à un petit pays montagneux, pays de 3 400 kil. carrés peut-être, et qui est certainement peu peuplé. Comme le pays ne produit pas de blé, il doit se procurer le blé en donnant en échange ses propres produits, surtout des mûres blanches. C'est un pays où il n'y a pas de chemin frayé, pays caractérisé par des versants escarpés en partie couverts de taillis et de bois, en partie nus, et par des trous profonds, ressemblant presque à des puits, qu'on appelle, dans la langue du pays, håwž. (»bassin«). Tout le terrain se divisait en: 1) les hautes terres, Awromān-e-Taxt ou Hāwg-e-Baòrānī avec 25 établissements, parmi lesquels la capitale Bahramawā (Bahrāmābād); 2) les vallées, Awromān-e-Lohūn, avec 16 établissements. Cette dernière partie du pays touchait à la frontière turque. Chacune des deux parties avait son régime à elle, étant gouvernée par un khan indigène.

Je ne puis pas donner des renseignements sur le nombre des personnes qui parlaient awromānī à l'heure de ma visite dans le pays; probablement il n'y en avait pas plus de quelques milliers. En orient il n'est pas convenable de demander le chiffre de la population.

Aux confins d'Awromān, dans quelques villages du district de Juānrūd, on parle, me disaient les indigènes, des patois qui ne diffèrent que très peu de l'awromānī, entre autres celui de Pāwä aux environs du village de Pāwā. Je fis un arrêt court dans cette contrée et y recueillis quelques morceaux, pour la plupart en vers, dans le patois des habitants.

A Sānnā, où le kurde est maintenant la langue commune hors des communautés persane, juive et syrienne, on prétendait que l'awromānī y avait été communément entendu autrefois, et que tous (?!) les ouvrages anciens qui avait cours dans la ville étaient écrits dans cette langue. Cependant je ne parvins jamais à trouver un tel ouvrage ni manuscrit, ni imprimé.

A mesure que je me familiarisais avec le dialecte d'Awromān, je remarquai pas peu de ressemblances en matière de phonétique et de vocabulaire entre ce dialecte et une langue parlée loin de là, sur le territoire turc,  surtout dans le district de Därsim, à savoir la langue des Zâzâs. J'eus l'impression que l'awromānī et le zāzā étaient des restes isolés d'un groupe de dialectes iraniens autrefois plus répandus et dont l'unité avait été rompue par l'invasion de peuples étrangers et surtout par le mouvement expansif des Kurdes.

Pour des raisons diverses, malheureusement, les matériaux que j'avais recueillis à Sānnā et en Awromān et mes notes ont été mis de côté pendant de longues années. Il va sans dire que, lorsque, après ce long intervalle, j'y suis revenu, les textes ne m'étaient plus bien familiers, et que bien des passages m'étaient devenues incompréhensibles. Grâce aux lumières et au zèle inlassable de M. Arthur Christensen, avec lequel j'ai relu et étudié de nouveau les textes, les résultats de mes recherches peuvent enfin être présentés au public.

Åge Meyer Benedictsen.




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