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Chroniques de massacres annoncés


Auteur :
Éditeur : Geuthner Date & Lieu : 2014, Paris
Préface : Pages : 698
Traduction : ISBN : 978-2-7053-3901-2
Langue : FrançaisFormat : 155x240 mm
Code FIKP : Liv. Fra. Hel. Chr. 1260Thème : Religion

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Chroniques de massacres annoncés

Chroniques de massacres annoncés

Florence Hellot-Bellier

Geuthner

Les années 1915 et 1918 marquent l’histoire des chrétiens assyro-chaldéens et arméniens de l’Est de la Turquie et de l’Iran de dates tragiques.
Ce livre retrace les événements, mais aussi les conditions qui ont abouti aux massacres. Il explore la lente montée de la violence, du Caucase à l’Anatolie orientale, et les tentatives des chrétiens pour la conjurer. Il s’attarde sur la faiblesse des gouvernants iraniens, sur l’arrivée au pouvoir des Jeunes Turcs et sur les revendications nationalistes qui fragilisèrent la coexistence des populations composant la mosaïque ethnique de la région. Il dénonce les agressions des empires ottoman, britannique et russe et les traités inéquitables générateurs de frustrations.
En 1914 les Assyro-Chaldéens étaient debout. Mais l’entrée en guerre de l’Empire ottoman aux côtés de la Triple-Alliance plaça le patriarche de l’Église d’Orient et les tribus assyriennes du Hakkari devant un terrible dilemme. La décision patriarcale d’engager les tribus aux côtés des Russes, au moment où les « Organisations spéciales » ottomanes mettaient en action un plan d’élimination des chrétiens dans la région, précipita les tribus dans un exode qui se commua en exil.
La barbarie des massacres (seyfo/saypa) de 1915 de part et d’autre de la frontière irano-turque mit fin aux anciennes solidarités tribales entre Assyriens et Kurdes ottomans ; les massacres perpétrés de nouveau en 1918 et 1919 dans la région d’Ourmia hantent aujourd'hui encore la mémoire des Assyro-Chaldéens ; ils firent vaciller la complicité des populations d’Azerbaïdjan, sans parvenir à la briser totalement.
Alors que la présence assyrienne a disparu au Hakkari, les Iraniens d’Ourmia et de Salmas, musulmans et chrétiens, ont su retrouver au cours des années 1920 les clés d’une vie commune. La beauté des chants et des liturgies de langue syriaque emplit de nouveau les églises de la région.



Florence Hellot-Bellier appartient à l’Unité Mixte de Recherches « Mondes iranien et indien », au sein de laquelle elle consacre ses recherches à l’histoire iranienne au tournant des xiC et xxf siècles, en particulier à celle des Assyro-Chaldéens d’Iran. Elle a notamment publié en 2008 France-Iran Quatre cents ans de dialogue, Paris.

 



PRÉFACE


Herman Teule
Université catholique de Leuven

La communauté assyro-chaldéenne, communauté de l’Église d’Orient «assyrienne», dans ses deux composantes actuelles, celle des lignées du patriarche mar Dinkha IV (Chicago) et du patriarche mar Addai II (Bagdad) et celle de l’Église chaldéenne unie à Rome, sous la direction du patriarche mar Louis Raphaël Ier Sako (Bagdad), a récemment fait l’objet de plusieurs études globales portant sur son histoire et sa doctrine. À l’approche de la commémoration centenaire des massacres des chrétiens d’Anatolie orientale et d’Azerbaïdjan iranien en 1915 - pour les Assyro-Chaldéens shatta d-saypa, l’année du glaive - il apparaît de plus en plus évident que nos connaissances sur ces événements, comme sur les périodes qui les ont précédés, sont lacunaires. Si les travaux de David Wilmshurst, appuyés sur une analyse pertinente des colophons de manuscrits, ont tenté de combler ces lacunes, ils ont livré des informations encore trop fragmentaires sur la répartition des Assyro-Chaldéens en Anatolie orientale et sur les structures ecclésiastiques de leur communauté jusqu’en 1913; ils demandent donc à être poursuivis à la lumière de manuscrits conservés dans des fonds considérés récemment comme inabordables et dont l’accès semble aujourd’hui plus facile.

Les récits et les rapports rédigés par des missionnaires catholiques et protestants constituent une autre mine de renseignements, souvent basés sur une solide connaissance du terrain, tout en souffrant parfois d’un défaut d’objectivité. Aussi ont-ils été confrontés aux écrits des autorités iraniennes. Il est en outre intéressant de lire les rapports rédigés par les missionnaires à l’intention de leurs supérieurs religieux, car ils ont été jusqu’ici moins diffusés que les récits de voyage (Cutts, Rhétoré, Riley ...) qui ont été publiés.

Par le truchement des missionnaires, des contacts ont été établis entre les hiérarchies orientales et les Églises occidentales, le pape de Rome, l’archevêque de Canterbury, le saint-synode russe, les différentes Églises luthériennes nationales et les presbytériens américains. En raison des liens entre les missionnaires et les ambassades ou les consulats des pays auxquels ils appartenaient, les orientaux eux-mêmes n’ont pas tardé à mettre à profit ce réseau international de contacts diplomatiques. Plusieurs documents témoignent de la manière dont ils ont essayé de gagner les puissances chrétiennes à leur cause. Dans ce contexte, on comprend l’intérêt porté par bon nombre de diplomates au sort et à la situation des communautés chrétiennes locales, comme en témoigne une abondante correspondance diplomatique.

Le grand mérite de Florence Hellot-Bellier est d’avoir dépouillé les archives diplomatiques, surtout françaises, et missionnaires. Les rapports écrits par certains diplomates avertis, ici publiés ou consultés pour la première fois, ou les lettres et descriptions rédigées par des missionnaires, témoins oculaires des développements qui ont conduit aux terribles massacres de 1915, accroissent de manière sqbstantielle nos connaissances sur la communauté assyro-chaldéenne au début du siècle passé. Ceci ne vaut pas uniquement pour les grandes étapes de la guerre, mais également pour la vie interne de la communauté chrétienne, la situation économique, les rivalités tribales, le voisinage avec les musulmans kurdes et iraniens - «pour le meilleur et pour le pire» -, les rapports avec les autorités ottomanes et iraniennes ou les relations avec l’extérieur.

Mais en contrepoint d’une interprétation unilatérale qui ne considérerait la situation des chrétiens qu’en fonction de leurs contacts avec le monde étranger, l’auteur s’efforce également de comprendre leur position à partir de l’évolution politique et religieuse interne des sociétés ottomane et iranienne - pari réussi.

Ce livre est d’abord une étude historique qui prend fin en 1919-1920. Mais il est clair que plusieurs des thèmes abordés, persécutions et massacres, insertion dans la société locale ou alliance avec l’étranger, nationalisme ethnique ou identité religieuse, et situation par rapport au monde islamique, sont toujours d’une grande actualité pour la communauté assyro-chaldéenne contemporaine. Dans ce sens, l’ouvrage de Florence Hellot-Bellier contribue à éclairer certaines prises de position adoptées par les dirigeants assyriens et/ou chaldéens d’aujourd’hui. Espérons que leurs luttes actuelles ne connaîtront pas le même sort tragique que celui de leurs héroïques ancêtres.

....



Introduction


L’histoire des chrétiens assyro-chaldéens de la région d’Ourmia1 et du Hakkari ottoman au tournant des xixe et xxe siècles est indissociable de celle des populations qui échangeaient depuis des siècles « le pain et le sel », à la croisée des empires iranien, russe et ottoman et dont la vie fut brisée dans les massacres et les tragédies de la première guerre mondiale.

Au début du xixe siècle, les chrétiens assyro-chaldéens d’Ourmia relevaient de l’Église chaldéenne et de l’Église syrienne d’Orient, Église qui s’enracina dans l’Iran sassanide (224-651) lors de synodes réunis à Séleucie Ctésiphon, sur le Tigre, entre 399 et 420 de l’ère chrétienne. L’Église d’Orient, de langue syriaque, dérivée de l’araméen parlé dans le petit royaume d’Édesse, se démarqua des Églises de langue et de tradition grecques en adoptant, dans les querelles christologiques des ive et ve siècles, les concepts diophysites (deux qnome) de Théodore de Mopsueste (350-428), dont Nestorius, patriarche de Constantinople de 428 à 431 avait été l’un des étudiants. Aussi l’Église syrienne d’Orient fut-elle improprement désignée comme nestorienne2. Les luttes entre les empires sassanide et romain, puis byzantin, accentuèrent les divergences entre catholicos et patriarches des différentes Églises : l’Église syrienne d’Orient se développa à l’est de l’Euphrate d’où elle essaima jusqu’en Chine et jusqu’au sud de l’Inde. Les chrétiens passèrent sous la domination de dynasties musulmanes au cours du premier siècle de l’hégire (vne siècle de l’ère chrétienne) : ils furent tolérés et protégés en tant que gens du livre. Ils jouèrent un grand rôle auprès des califes abbassides jusqu’à la prise de Bagdad par les Mongols en 1258 ; puis ils furent tour à tour soutenus et persécutés par les Ilkhanides mongols qui s’établirent en Azerbaïdjan, autour de Tabriz et de Maragheh, dans la seconde moitié du xme siècle et au début du xive siècle. Les attaques de Tamerlan à la fin du xive siècle les obligèrent à se replier dans les montagnes kurdes. Ils y adoptèrent la structure tribale environnante et le patriarche de l’Église d’Orient fut porté à la tête des tribus Assori/assyriennes. Au xvie siècle, des chrétiens réunis autour de Jean Soulaqa menèrent des ouvertures en direction de l’Église catholique romaine ; ils initièrent ainsi une rupture ...




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