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Arméniens, Kurdes et Chrétiens d’Orient en Franciliens


Auteur :
Éditeur : L'Harmattan Date & Lieu : , Paris
Préface : Pages : 96
Traduction : ISBN : 978-2-343-06480-2
Langue : FrançaisFormat : 135x215 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Cha. Com. N° 4894Thème : Sociologie

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Table des Matières Introduction Identité PDF
Arméniens, Kurdes et Chrétiens d’Orient en Franciliens

Arméniens, Kurdes et Chrétiens d’Orient en territoires Franciliens

Jean-Paul Chagnollaud

L’Harmattan

Pris dans une actualité tragique, le Moyen-Orient est observé au prisme de ses minorités : persécutions des Chrétiens d'Orient, résistance armée des Kurdes, centenaire du génocide arménien. Pourtant, les trajectoires singulières de ces communautés, de même que leurs attaches avec la France et l'Europe, restent bien souvent ignorées.

À l'occasion d'une journée d'échanges entre chercheurs et acteurs de la société civile organisée par l'iReMMO avec le soutien de la Région Ile-de-France, différents spécialistes sont venus apporter leurs éclairages et leurs témoignages sur ces histoires complexes.

Croisant les parcours de chacune de ces communautés, les textes issus de cette rencontre illustrent la diversité des diasporas originaires de la région. Ce faisant, ils dessinent une universalité du déracinement et contribuent à une meilleure compréhension de la préservation d'une culture en exil.



INTRODUCTION

Jean-Paul Chagnollaud
Professeur des Universités et directeur de l’iReMMO.

Derrière cette formulation, on a du mal à imaginer les souffrances que des millions de personnes ont enduré lorsqu’un jour elles ont dû abandonner leurs foyers pour tenter d’échapper au pire. Arméniens, Kurdes et Chrétiens, autant d’hommes et de femmes pourtant enracinés depuis toujours dans leur terre du Moyen-Orient, sont ainsi partis brutalement sans jamais savoir où cet arrachement tragique allait les précipiter. Et l’on aurait pu élargir encore la réflexion à bien d’autres communautés qui, elles aussi, ont été ainsi traumatisées par la violence de l’Autre...

Leurs itinéraires sont indissociables de l’histoire de l’Empire ottoman qui avait mis en place des formules de coexistence comme l’institution des millets qui permettait aux divers groupes confessionnels et communautaires de vivre leur identité culturelle et religieuse dans une configuration sociétale relativement pacifiée. Pendant les siècles de sa domination, ces peuples ont ainsi pu vivre côte à côte dans un cadre juridique et coutumier assez bien codifié autant au Moyen-Orient que dans les Balkans, au moins jusqu’à la fin du 19ème siècle. Il ne faudrait pourtant pas idéaliser ce système politique qui a connu aussi de sombres périodes où soudain de féroces répressions pouvaient s’abattre sur telle ou telle minorité comme avec les massacres des Arméniens sous le règne du sultan Abdulhamid II, dans les années 1890. A partir de cette époque, pour des raisons liées notamment aux intérêts des grandes puissances et à la montée en force des nationalismes, ce fut le basculement d’abord dans les guerres balkaniques puis dans la Première Guerre mondiale qui a provoqué une rupture majeure dans l’histoire de la région avec l’effondrement de l’Empire ottoman et l’émergence de nouveaux Etats aux frontières décidées par les vainqueurs.

Parce qu’ils sont construits sur l’inclusion exclusive de ceux qu’ils prétendent rassembler et mobiliser, les nationalismes, comme toutes les formes de replis identitaires ou de communautarismes, produisent toujours, en dernière instance, une totale négation de l’Autre pouvant allant jusqu’à l’épuration ethnique et même au génocide défini par le statut de la Cour pénale internationale comme « des actes commis dans l’intention de détruire, tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux (meurtres, transferts forcés, soumission à des conditions d’existence devant entraîner la destruction physique...) »...

Les configurations historiques et les formes, souvent terrifiantes, des violences subies par les Arméniens, les Kurdes et les Chrétiens renvoient à des séquences différentes. Les premiers ont été victimes d’un génocide froidement planifié par les Jeunes Turcs à partir de 1915; seuls quelques dizaines de milliers ont pu en réchapper. Les seconds ont subi, pendant des décennies et jusqu’à ces dernières années, les très lourdes conséquences de l’échec du traité de Sèvres (1920) qui leur promettait un toit politique. Quant aux Chrétiens, partout minoritaires, ils ont vu, à plusieurs reprises et encore aujourd’hui, leurs vies brisées sous les coups meurtriers de l’intolérance d’un impitoyable fondamentalisme.

Si leurs itinéraires s’inscrivent dans des logiques historiques distinctes, une partie d’entre eux partage une même épreuve, à la fois douloureuse et incertaine : celle de l’exil. C’est pourquoi, il nous a paru intéressant de mettre en perspective croisée ces destins singuliers pour mieux comprendre leurs itinéraires et la manière dont ils cherchent à faire vivre leur communauté en exil et transmettre une mémoire collective. Plus particulièrement ici dans la région Ile-de-France.
Pour tous, c’est un très long chemin qu’ils poursuivent avec une inébranlable détermination malgré les multiples difficultés qu’ils rencontrent surtout quand elles paraissent insurmontables. Evoquant une période particulièrement sombre de l’histoire kurde à la fin des années 1970, Kendal Nezan raconte que l’état d’esprit des Kurdes était alors résumé par cette boutade : «On a un passé tragique, le présent est un calvaire mais, heureusement, on n’a pas d’avenir». Et c’est à ce moment que s’impose l’idée de créer un Institut kurde pour continuer à se battre....
Réunissant les meilleurs spécialistes de ces questions, cette journée d’études et de débats a été construite en trois tables rondes.

Dans la première, « Genèse d’exils », Raymond H. Kévorkian retrace les grandes étapes qui vont du génocide arménien à la naissance de la grande diaspora. Bernard Heyberger analyse les mutations de la présence chrétienne en Orient. Dans la seconde, « Partir ou rester », Tigrane Yegavian étudie la communauté arménienne face aux conflits au Moyen-Orient et Olivier Grojean, les mobilisations des Kurdes d’Europe. Dans la troisième, « Faire vivre sa communauté et transmettre une mémoire collective », Anouche Kunth revient sur la place cardinale qu’occupe le génocide dans la conscience diasporique arménienne ; Antoine Fleyfel rend compte de l’engagement associatif de l’Oeuvre d’Orient pour faire connaître les chrétiens d’Orient tandis que Kendal Nezan revient sur plus de 30 ans d’histoire de l’Institut kurde de Paris.



Partie I

Genèses d’exils

Du génocide arménien à la naissance de la grande diaspora

Raymond H. Kévorkîan
Historien, professeur des universités émérite à l’Institut Français de
Géopolitique (IFG - Université Paris 8), ancien conservateur de la bibliothèque Nubar.

L’intégration des Arméniens dans leurs patries d’adoption, dans nombre de pays du Proche-Orient, est passée par plusieurs étapes, parfois douloureuses, dont la mémoire tend à s’estomper. Avant de devenir citoyens libanais ou syriens, français ou américains, ils ont vécu l’expérience de tout réfugié déraciné, en quête d’un pays d’accueil, où ils pourraient trouver l’environnement propice à une reconstruction. Les bouleversements géopolitiques consécutifs à la Première Guerre mondiale ont redessiné la carte du Proche-Orient et offert aux réfugiés arméniens l’espace nécessaire au redémarrage d’une vie collective. Apres l’anéantissement de 1915, les Arméniens ont eu la ferme volonté de reconstruire la nation, comme pour démontrer que le plan génocidaire conçu par le régime jeunes-turcs, aussi systématique soit-il, n’était pas parvenu à les détruire totalement.

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