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Les pensées hébraïques, arabes, persanes et égyptiennes


Auteur :
Éditeur : Hermann Date & Lieu : 2009, Paris
Préface : Pages : 448
Traduction : ISBN : 978 2 7056 6666 8
Langue : FrançaisFormat : 140x210 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Dro. Phi. N° 3627Thème : Philosophie

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Les pensées hébraïques, arabes, persanes et égyptiennes

Les pensées hébraïques, arabes, persanes et égyptiennes

Roger-Pol Droit

Hermann

Son nom vient du grec ancien, mais la philosophie n’est pas l’apanage des cultures issues de la Grèce antique. Au contraire, les Grecs eux-mêmes considéraient souvent que la philosophia venait d’ailleurs, et qu’ils n’en étaient pas les inventeurs. Tout au long de l’histoire occidentale s’est maintenue cette conviction : les autres aussi sont philosophes. C’est seulement à la fin du XIXe siècle que la pensée occidentale s’est refermée sur elle-même, délaissant toutes les perspectives théoriques autres au profit de la seule tradition gréco-latine.
Le second volume de cette anthologie rassemble des extraits de textes philosophiques essentiels des civilisations hébraïque, arabe, persane et égyptienne. Ces passages, dont la plupart sont traduits pour la première fois en français, et regroupés selon leur langue d’origine, permettent de découvrir les lignes de force de ces philosophies étrangères tout en révélant leur tonalité particulière.
Présentés par d’éminents spécialistes internationaux réunis spécialement sous la direction de Roger-Pol Droit, ces corpus sont éclairés par des études de synthèse et accompagnés de notes, glossaires et références mettant à la disposition du lecteur les moyens d’approfondir les sujets de son choix.



LES PENSEES HEBRAÏQUES

Un ailleurs si proche et pourtant si méconnu par Raphaël Draï

« Pour se vouloir située « ailleurs », une philosophie, décentrée au regard des classifications convenues, n’en doit pas moins rester une philosophie. Cette première condition conduit à s’interroger, avant toute autre analyse, sur la possibilité même d’une philosophie juive. Ce n’est pas seulement que la pensée juive - usons de cette expression générique à seule fin d’engager un dialogue difficile —, soit assimilée à une théologie puisque Dieu y apparaît comme la préoccupation principale, sinon obsessive. C’est que les noms qui scintillent depuis des siècles au firmament de cette pensée - il suffit de nommer le Maharal de Prague et Rabbi Nah’man de Bratslav - ont eux-mêmes récusé la « philosophia » ou plutôt les « philosophim » , comme sectateurs de l « apikorsismé1 » , comme des manipulateurs, irresponsables et irrévérencieux, un tantinet galopins, d’idées qui les dépassent et qui, entre autres, récusent l’existence de Dieu et le principe que l’univers fût créé ex nihilo, tout en s’imaginant eux-mêmes auto-engendrés.

« Ce n’est pas que des rencontres avec la philosophie n’aient eu lieu, de Philon d’Alexandrie à Moïse Mendelssohn, en passant, bien sûr, par Maïmonide. Mais est-il sûr que ces rencontres ne furent pas de simples croisements en d’étroits chemins, où chaque protagoniste, après avoir échangé quelques mots avec son interlocuteur, s’empresserait de reprendre sa route, pensant qu’elle serait la plus sûre et la mieux orientée ? A l’opposé, les exemples sont nombreux de philosophes qui ont circonscrit leur domaine en excluant la question de Dieu, afin de le déclarer, purement « philosophique » 2. Pourtant, un concept peut-il être traité comme un vulgaire malandrin, introduit par effraction dans une propriété privée, ou comme une grosse mouche incapable de trouver la fenêtre vers où on la chasse à grands coups de torchon ? Une philosophie sans Dieu est-elle forcément une philosophie laïque, si cette formule n’est pas à son tour un pléonasme ? N’est-elle pas plutôt une philosophie athée, autrement dit une philosophie toujours habitée par l’objet qu’elle prétend dissoudre3 ?

« Pour être philosophe tout en étant habité par la préoccupation du religieux, faut-il procéder comme Ricœur et distinguer deux parts bien distinctes dans son œuvre : la part philosophique et la part théologique, comme si chacune se rapportait à un auteur différent ou à une aire corticale spécifique du cerveau? Par de telles pratiques, il semble que l’on prouve moins l’indépendance d’un esprit que les clivages du Sujet supposé penser. Est-il alors possible de procéder autrement? On constate déjà, par cette seconde interrogation préalable que les notions d’« ailleurs » et l’idée d’« autre » se conjoignent étroitement. Si une pareille attitude n’était pas possible, il faudrait qu’elle le devînt. Dans le monde actuel, qualifié au gré des jours, de post-moderne, post-humain, post-révolutionnaire, le monde « fragmintégré » de la planétarisation des territoires et de la globalisation des modes de pensée et de comportement, le monde de la « connectique » et des réseaux satellitaires, dans ce monde, s’ignorer de manière délibérée, c’est prendre le risque de s’affronter dans la pire posture qui soit : en méconnaissance de cause, puisque l’Autre ne cesse de protester qu’il existe bel et bien, avec son corps, sa parole, son écriture et sa pensée. Par où se démontre, au passage, un axiome lui-même méconnu de l’éthologie humaine: la proximité crée autant de difficultés qu’elle est censée en résoudre, et la rencontre du fameux « visage d’autrui » peut se durcir, pour un rien, en un impitoyable face-à-face.

« Peut-on au moins réduire l’antinomie entre « philosophie » et « pensée juive » , pour concevoir cette fois une philosophie juive, dans l’exercice de laquelle nul ne se croirait obligé de fracturer une fois de plus (et parfois une fois de trop) une conscience psychiquement étayée, déjà …

1. Cf. Glossaire.

2. Christopher Hitchens, The Portable Atheist, Essential Readings for the Nonbe-liever, Da Capo Press, 2007.

3. Cornelio Fabro, Introduction à l’athéisme moderne, Anne Sigier, 1999.




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