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Les Kurdistanî : l'affirmation d'un patrimoine


Auteur :
Éditeur : AGCCPF Date & Lieu : 2008, Provence
Préface : Pages : 28
Traduction : ISBN : 978-2-84975-128-2
Langue : FrançaisFormat : 135x210 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Ale. Kur. N° 2646Thème : Général

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Les Kurdistanî : l'affirmation d'un patrimoine

Les Kurdistanî : l'affirmation d'un patrimoine

Sandrine Alexie

AGCCPF

Les 12 et 13 juin 2007, le premier séminaire de Peyresq a été organisé par deux conservateurs exerçant à Marseille : Christine Breton, du programme européen de patrimoine intégré et Mireille Jacotin, du musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée. Depuis 2002, l'association AGCCPF interroge les rapports entre le patrimoine et l'Europe en construction. Dimension conflictuelle du patrimoine s'inscrit dans ce cadre. Cette notion difficile nécessitait un site de retrait et de paradoxe ; que soient ici remerciés Nadine Gomez, qui a eu l'intuition de Peyresq, foyer d'humanisme, et, pour son accueil, l'ABSL Nicolas Fabri de Peiresc. En équilibre instable, au bord de la falaise, près du ciel et enracinés dans la longue durée du site, nous avons pu ouvrir ce premier volet.
À suivre en juin 2008.
Cette marque est le chiffre porté sur les livres de bibliothèque de Nicolas Fabri de Peiresc ; elle accompagne, dans la collection exos, la publication des "Entretiens annuels de Peyresq", organisés par l'AGCCPF-PACA, engagée dans une réflexion européenne novatrice sur le patrimoine.



K:APHRM

Sandrine Alexie

Le Kurdistan d'Irak actuel s'étend au nord de l'État irakien, et a une frontière directe avec la Turquie et l'Iran. Sa dénomination officielle est Région du Kurdistan et son statut est celui d'une région fédérale depuis l'adoption par référendum de la Constitution irakienne, en octobre 2005. Il a donc son propre gouvernement régional, avec un Premier ministre et son cabinet, un Président et un Parlement qui légifère avec des pouvoirs assez étendus par rapport au gouvernement de Bagdad, son drapeau, sa défense militaire (les peshmergas). Le partage de ses ressources pétrolières et d'autres points concernant ses rapports avec Bagdad sont toujours en discussion, mais on considère que depuis 1992, le Kurdistan jouit en fait d'une indépendance de facto, même si elle est tacitement éludée pour des raisons diplomatiques.

La Région du Kurdistan contient pour le moment les trois provinces de Duhok, Erbil-Hewlêr (la capitale) et Silêmanî, ce qui est loin de couvrir la totalité des régions kurdes d'Irak, puisqu'il manque les régions détachées du Kurdistan sous le gouvernement de Saddam et dont le rattachement doit se décider par un référendum, au plus tard en novembre 2007.

La plus importante minorité est celle des Assyro-Chaldéens, chrétiens de langue syriaque de rite orthodoxe (Assyriens) ou catholique (Chaldéens), qui seraient aux alentours de 30 000 au Kurdistan (650 000 en Irak). Ces chrétiens sont des autochtones ou des réfugiés rescapés du génocide de 1915-1916 ou venus plus récemment des zones irakiennes où ils sont la cible privilégiée des groupes islamistes. Il y a aussi quelques milliers d'Arméniens dont l'arrivée remonte aussi au génocide.

La population turkmène est implantée assez anciennement. Ce sont des chiites qui ont fui au XVIe siècle les persécutions des Ottomans. Leur nombre est sujet à caution, et varie selon que les sources sont proches d'Ankara ou d'Erbil (de 2 millions à 200 000). Ils vivent principalement dans les villes, surtout à Erbil et Kirkouk, et ne sont pas territorialisés dans une région précise.
Il y avait, jusqu'au XXe siècle, une très ancienne et importante population juive, mais elle a totalement émigré depuis 1951.

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I. Les Kurdistanî sous l'Irak de l'ancien régime et l'anfal :
La destruction quasi-totale d'une région, de ses populations et de son patrimoine

A. Les Kurdes : cible principale de l’Anfal

Avec l'effondrement de l'Empire ottoman et le démembrement de ses territoires, le Traité de Lausanne, signé en 1923, décida le rattachement des zones kurdes méridionales au nouvel état irakien (créé et voulu par les Britanniques) et partagea donc en quatre le pays habité par les Kurdes, contre l’avis de sa population. C'est ainsi que les Kurdes « d'Irak », peuple de langue iranienne et de culture montagnarde, à majorité sunnite, se trouvèrent incorporés contre leur gré à un pays de langue majoritairement arabe, de religion majoritairement chiite, et dont l'habitat est principalement désertique ou urbain, hormis les marais du sud. Par ailleurs, de façon paradoxale, ou [jour éviter de favoriser l'un des deux grands groupes, les Britanniques imposèrent comme roi un hachémite, arabe et sunnite, qui ne représentait donc que la plus importante minorité en Irak, c est-à-dire les Arabes sunnites. Cette domination du groupe arabe sunnite survécut à la monarchie et ne prit fin qu'en 2003, avec la chute du régime de Saddam. La domination chute sur l’Irak arabe fut consacrée par les élections de 2005, qui les porta largement au pouvoir, tandis que les Kurdes gardaient un statut à part, leur laissant une très grande autonomie.

La population kurde est estimée entre 4 millions et 6 millions en Irak, sur un ensemble de 30 millions de Kurdes au Moyen-Orient. Cette région n'est qu'une petite partie du pays kurde, dont la superficie actuelle (sans les provinces revendiquées) est à peu près celle de la Suisse.
La religion majoritaire des Kurdes est l’islam (de rite chaféite) et leur pratique est caractérisée par le très grand poids des confréries soufies, les tariqat'. Certains sheikhs kurdes ont d'ailleurs joué un très grand rôle dans l'histoire du mouvement national, et les premières grandes révoltes, aux XIXe et XXe siècles, étaient menées par des princes féodaux et/ou des leaders religieux.

Le Kurdistan comprend d'importantes sectes religieuses, plus ou moins issues de l'islam (soufisme ou chiisme), avec un enseignement gnostique et des pratiques pré-islamiques très marquées par les anciennes religions iraniennes. Les Yézidis sont les plus nombreux et bénéficient d'une meilleure lisibilité actuellement au Kurdistan d'Irak.

L'histoire et le patrimoine du Kurdistan ont été jusqu'à présent peu mis en valeur par les régimes successifs de Bagdad, pas plus d'ailleurs que la région n'a vraiment été économiquement développée, la modernisation de l'Irak ayant toujours tenu à l'écart les « zones de population suspecte » (i. e. celles habitées par les Kurdes ou bien par les chiites du sud). Pour finir, le régime de Saddam chercha à éliminer au Kurdistan toute trace, vivante ou passée, des Kurdes et des Kurdistanî. Ce ne sont pas seulement des édifices stratégiques ou économiques, tels que les bâtiments administratifs, les centrales électriques, les ponts, qui furent détruits, mais la presque totalité des agglomérations et édifices cultuels devaient disparaître, même les cimetières (parfois seul vestige de certaines communautés religieuses disparues, tels les juifs du Kurdistan). Les villages furent presque totalement rasés (près de 4 500 sur 5 000), les sources furent dynamitées ou bouchées, les arbres fruitiers et les forêts brûlés, les cheptels abattus. Ce qui manqua disparaître fut à la fois toute une région, sur le plan historique et humain, et tout un écosystème, fondé sur l'agriculture (le Kurdistan était le grenier à blé de l'Irak) et le pastoralisme.

La population eut à subir un plan d'arabisation très poussé à Kirkouk, mais aussi dans des villages de moindre dimension, tels ceux autour de la ville de Zakho, tout au nord, où les habitants, kurdes musulmans ou chrétiens, furent déplacés ou tués dans le but futur de laisser la place à des colons arabes. L’Anfal est connu sous son aspect le plus spectaculairement meurtrier (les attaques au gaz, les exécutions de masse) mais ce fut aussi un vaste programme de déportation et de rassemblement dans …




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