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La Description de Damas d’Ibn ‘Asàkir


Auteur :
Éditeur : Institut français de Damas Date & Lieu : 1959, Damas
Préface : Pages : 386
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 170x235 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Eli. Des. N° 316Thème : Général

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La Description de Damas d’Ibn ‘Asàkir

La Description de Damas d’Ibn ‘Asàkir

Nikita Elisséeff


Institut Français de Damas

A l’écart du monde méditerranéen et n’ayant jamais subi l’occupation franque, Damas peut être considérée comme le type même de la ville syrienne. « Entre Alep et Damas, écrivait Jean Sauvaget (1), c’est cette dernière qui doit être choisie parce qu’elle n’a jamais cessé, depuis la conquête arabe, d’être la capitale de la Syrie : l’influence des facteurs politiques en relation avec l’histoire générale de l’Islam, y apparaît ainsi plus nettement. »
Depuis le IIe millénaire avant notre ère Damas apparaît dans les textes assyriens et égyptiens comme un centre important ; il y a tout lieu de croire d’ailleurs que le peuplement humain de la vaste oasis et la première installation urbaine sur l’emplacement de l’actuelle cité ...



AVANT-PROPOS

Aborder l'étude sociale et économique des villes médiévales sans connaître les données archéologiques serait vouloir aborder la psychologie humaine en ignorant jusqu’à l'existence des données somatiques. La topographie ne constitue-t-elle pas la base réelle de la cité ?
Nous n'ignorons pas que les recherches en ce domaine, surtout en pays d'Orient, ne sont pas dénuées de difficultés de toutes natures et des solutions diverses peuvent être données à des problèmes qui demeurent obscurs.

Il est bien évident que le plan de la ville doit servir de base à toute étude sérieuse de topographie historique, aussi avons-nous essayé d’interpréter les données du texte pour situer les édifices mentionnés. Nous avons proposé le maximum de solutions possible et suggéré des hypothèses chaque fois que les données étaient insuffisantes. Nous souhaitons que les incertitudes de nos localisations et les erreurs dont notre traduction n’est peut-être pas exempte incitent des chercheurs plus heureux à apporter de nouvelles solutions et nous espérons enfin que notre travail attirera l’attention des spécialistes sur la nécessité et l'intérêt que présente l'étude de la topographie historique des grandes cités de l’Orient.

Quatre textes arabes importants donnant une vue d’ensemble des monuments de Damas sont actuellement édités, ce sont l’introduction au ïa’rxh Madina Dimasq d’Ibn *Asâkir (m. 571/ 1176), la section “Damas” des A‘lâq al-Hatïra de ‘Izz ad-Dln b. Saddâd (m. 684-/1285), le Timâr al-maqâsid de Yüsuf b. lAbd al-Hâdl (m. 909/1503) et le Dâris d’an-Nu‘aymï (m. 927/ 1521). Le premier texte fut la source principale de tous les auteurs postérieurs soit qu’ils l'aient résumé, soit qu’ils l’aient repris et continué. Cette description de Damas, la plus ancienne et la plus complète parmi celles qui nous sont parvenues, nous avons choisi de la traduire en utilisant l’édition que $alâh ad-Dln al-Miinaijgid a donnée dans les collections de l’Académie Arabe de Damas.

Si le dictionnaire biographique d’Ibn ‘Ascikir apporte de précieux renseignements sur les personnages qui ont séjourné à Damas avant 570/1169, en revanche on ne trouve dans son introduction aucun souci de synthèse historique ni même aucun talent d’annaliste. Ibn ‘Asâkir ne nous paraît pas se soucier des événements ; ce n’est pas « un témoin de son temps », il fait plutôt œuvre de décorateur ; il plante le décor où se déroulent les événements dont Nür ad-Dïn, et ses prédécesseurs au gouvernement de Damas, ont été les meneurs de jeu, tandis que son contemporain Ibn al-Qalûnisï en aura été le chroniqueur.

Sur cette « toile de fond » que constitue notre texte s’inscrivent un nombre considérable de renseignements sur la vie économique et sociale à Damas au XIIe siècle. L’industrie y était active, en dehors des artisans nous trouvons mention de moulins à alcali et à tan, d’une fonderie, d’une papeterie, d’une tannerie et d'une verrerie. L’activité commerciale se concentrait dans les souks, dans les fondouks et les qaysdrïyas, au süq al-Qanadïl et à la dâr al-Wakâla. Quant à la vie sociale, en dehors de la Citadelle et des hôtels résidentiels, les bains et les hospices en étaient les centres et parfois les cimetières ou même la prison. Enfin Ibn ‘Asâkir nous montre l'intensité de la vie religieuse à Damas : à son époque les mosquées étaient fort nombreuses et les madrasas — éléments urbains relativement récents — atteignaient déjà la douzaine.

L’intérêt de l’ouvrage dlbn ‘Asâkir est de nous donner un décor : l’auteur nous promène, suivant un itinéraire défini — le même pour chaque catégorie d’édifices — d travers le paysage de pierre où se profilent les silhouettes de tant de personnages. Cest le premier texte à nous apporter des données topographiques explicites qui permettent de tisser un canevas pour l’histoire de la ville de Damas, c’est pourquoi nous l'avons pris comme base pour l’établissement de notre plan. Il suffira par la suite de noter, au fil des événements historiques, les éléments urbains nouveaux et de les reporter sur ce plan. Ainsi reconstituée la topographie ancienne permet de noter les aspects successifs de la ville, de saisir l'extension ou la régression de la surface construite, d’y voir apparaître et disparaître les monuments, d’apercevoir les changements dans le tracé des rues ou dans celui de l’enceinte. L’archéologie met ainsi en lumière l'aspect le plus concret de i’évolution urbaine : le développement topographique d’une ville : Damas, que M. Jacques Berque considère comme le prototype de la métropole orientale musulmane.

Nous n'avons pas mentionné dans notre traduction tous les traditionnistes dont les « chaînes » sont données par Ibn ‘Asâkir. Certes l’étude de ces isnâd-s ne serait pas dépourvue d’intérêt, étant donné surtout la place qu'occupa notre auteur dans l’école acharite, mais l’énumération des garants successifs des traditions relatées n’apporte guère de renseignements particuliers pour notre étude de la topographie historique de Damas.
Si nous avons ajouté au texte d’Ibn ‘Asâkir de nombreuses notes au risque d’en rendre la lecture moins aisée, c’est que nous avons voulu faire de notre élude un instrument de travail. Nous souhaitons que le lecteur intéressé par l’histoire de Damas puisse mieux en situer dans leur cadre les acteurs et les événements et les localiser avec le maximum de précision. Nous nous sommes efforcés d’abord de donner des éclaircissements sur les personnages cités car l’identification de certains d’entre eux permet de dater tel ou tel monument. Pour ceux qui nous sont restés inconnus, nous avons signalé notre ignorance dans l’espoir que d’autres, mieux informés, compléteraient les données que nous avons pu rassembler. Mais c’est surtout aux notes de topographie que nous nous sommes attachés.

Nous avons reproduit les topongmes sous leur dénomination arabe, en transcription (1), afin de pouvoir plus aisément les retrouver dans d’autres textes. Nous avons, d’autre part, cru nécessaire de traduire ces noms de lieu lorsqu’ils offraient un certain sens et qu’ils pouvaient apporter des indications intéressantes sur la vie économique ou sociale, ou conserver les traces d’une époque parfois ancienne de la cité.

Partant du principe énoncé par Sauvaget (2) suivant lequel les indices archéologiques, inexpressifs par eux-mêmes, n’acquièrent de poids qu’en se recoupant et s’étayant mutuellement, nous avons tenté d’utiliser toutes les données topographiques que fournit le texte d’Ibn ‘Asâkir et nous les avons reportées sur un plan de la ville. Nous avons pu ainsi dresser d'abord un plan des rues de Damas avec le nom quelles avaient au XIIe siècle (3).
Ce plan nous a servi ensuite de « fond de carte », pour un essai de répartition des bains et d’un nombre important de prises d’eau ou canalisations (qanât), En procédant à des recoupements, dont certains étaient inspirés de la méthode du repérage par triangulation, nous avons pu localiser un grand nombre de mosquées intra-muros et les avons portées sur le plan. Enfin en regroupant les renseignements qu’Ibn ‘Asâkir donne sur les églises et les hôtels résidentiels, en dehors des chapitres qu’il leur consacre en particulier, nous avons pu situer la plupart de ces édifices et amorcer ainsi un plan qui nous servira de point de départ pour l'étude que nous nous proposons de faire de la topographie de Damas à l’époque omeggade.

Ma reconnaissance va aux maîtres qui ont guidé mes premiers pas dans les éludes arabes, à M. Régis Blachère, professeur à la Sorbonne, dont l’enseignement arabe m’a permis de traduire ce texte cl à M. Gaston Wiet, membre de l’Institut, professeur an Collège de France, qui le premier, avec son talent de sgnthèse, me fit découvrir l’histoire de l'Orient musulman. Jamais ne m’ont manqué ni leurs encouragements, ni leurs conseils, jamais leur sollicitude ne s’est lassée à mon égard, je liens à leur exprimer ma respectueuse reconnaissance. Qu’il me soit permis aussi d’évoquer la mémoire de Jean Sauvaget qui, avec une sympathie active, orienta mes recherches sur la Syrie médiévale.

Ma dette n’est pas moins grande envers M. Henri Laoust, professeur au Collège de France et directeur de T Institut Français de Damas, qui n’a jamais hésité à me faire bénéficier de ses conseils et m’a toujours assuré d’un appui dont l’amitié ne fut pas l'élément le moins précieux pour moi. Je saisis l’occasion de la publication du présent travail dans les collections qu’il dirige pour lui exprimer ma profonde gratitude et ma vive reconnaissance.
Ma gratitude va aussi à mon jeune collègue Dominique Chevallier et au Révérend Père Michel Allard s. j. qui ont bien voulu m’aider dans la correction des épreuves.

Cet ouvrage n’aurait pu recevoir sa belle apparence sans la collaboration des ateliers de composition et sans les presses de l’Imprimerie Catholique de Beyrouth, à tout son personnel j’adresse ici mes remerciements.
Je m’excuse enfin auprès des autres personnes auxquelles va ma reconnaissance de ne pouvoir les nommer toutes ici. Je les prie de croire que je nen oublie aucune.

Beyrouth, février 1959

(1) Pour le système de transcription nous avons suivi les règles adoptées par la GAL. On a naturellement gardé l’usage courant pour les toponymes les plus connus.
(2) Alep, 40
(3) Pour l’établissement de ce plan nous nous sommes servi du plan de Wulzinger et Watzinger — dont nous avons conservé le quadrillage—et des plans donnés dans leurs travaux par A. Talass et S. S. Munaggid.

Introduction

A l’écart du monde méditerranéen et n’ayant jamais subi l’occupation franque, Damas peut être considérée comme le type même de la ville syrienne. « Entre Alep et Damas, écrivait Jean Sauvaget (1), c’est cette dernière qui doit être choisie parce qu’elle n’a jamais cessé, depuis la conquête arabe, d’être la capitale de la Syrie : l’influence des facteurs politiques en relation avec l’histoire générale de l’Islam, y apparaît ainsi plus nettement. »

Depuis le IIe millénaire avant notre ère Damas apparaît dans les textes assyriens et égyptiens comme un centre important ; il y a tout lieu de croire d’ailleurs que le peuplement humain de la vaste oasis et la première installation urbaine sur l’emplacement de l’actuelle cité remontent au IVe millénaire, époque à laquelle prospérait dans ses environs l’agglomération de Tell as-Sâlihïya (2). Mais en fait nous n’avons aucune donnée précise ni sur le site, ni sur l’étendue, ni sur la disposition topographique de Damas avant la période hellénistique (3).
Lorsqu’en 635 les Arabes, groupés sous les étendards de l’Islam, pénètrent dans Damas ils trouvent une ville qui depuis six siècles, depuis Pompée (64 B.C.), était soumise à l’influence de l’Occident romain, grec et byzantin. C’est une cité hellénistique …

(1) J. Sauvaget, Esquisse d’une histoire de la ville de Damas, REI, 1934, cahier IV, 424.
(2) Cf. Fouilles de Haldar et Von der Osten. Cf. ASAS II, 1952, 264.
(3) R. Thoumin, Géographie Humaine de la Syrie Centrale, Tours 1936, 237 ss.

 




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