HAPITRE PREMIER
Sommaire. - Impressions générales. - Départ de Stamboul. - Chemin de fer d'Ismidt. - Le lac de Sapandja. - Les émigrés tcherkesses. - Lefké. - La ligne d'Angora. - Biledjik. - Eski-Chéïr. - Cols de Beyjas. - Arrivée Angora.
Il serait intéressant, coup sûr, de pouvoir dès maintenant prédire l'avenir de l'Empire ottoman et de savoir distinguer, au milieu des troubles de sa politique, le moment, prochain peut-être, de sa résurrection ou celui de sa ruine définitive, d'exposer ses chances de relèvement comme ses risques de décadence, d'analyser enfin d'une façon impartiale et complète son état actuel. Je ne puis malheureusement entreprendre qu'une bien faible partie de cette tâche, en essayant, au retour d'un long voyage en Turquie d'Asie, de rapporter sincèrement les impressions que j'y ai reçues des hommes et des choses et d'exposer fidlement les appréciations que j'ai été même d'y faire sur place. Il s'en dégage, au point de vue général, une idée si complexe de force et de faiblesse, un si singulier mélange de virilité et de décrépitude, de fanatisme et d'irréligion, de vertus guerrières et de turpitudes administratives, on s'y trouve en prsence de si belles qualités naturelles et de vices si répugnants, on y rencontre des provinces si prodigieusement fertiles et cependant si mal cultivées, tant de richesses perdues et une si atroce misère, qu'on ne sait vraiment, après avoir fait plus de cinq mille kilomtres au travers de l'Empire, ce qu'il doit advenir des territoires qui le composent. D'ailleurs, un progrès est-il y réaliser actuellement, une idée neuve et productive y soutenir et y développer, qu'on voit aussitôt se liguer contre elle tous ceux qui, par leur position, leur influence, seraient même d'appuyer le chef de l'Etat dans ses projets d'indispensables réformes et dans sa recherche constante d'améliorations nécessaires. Si cependant certains contres, par suite des dernires lois promulguées par le Sultan, et, gràce des gouverneurs plus intelligents et plus honntes, ont beaucoup profit depuis quelques années et ont accru considrablement leur rapport et leur bien-être, on trouve à côté d'elles des provinces, jadis soumises et prospères, qui tendent chaque … |