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Le Mouvement de Libération du Peuple Kurde au Kurdistan d’Irak


Auteur :
Éditeur : Université Paris VII Date & Lieu : 1986-01-01, Paris
Préface : Pages : 124
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 215 x 295 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Gén. Ahm. Mou. N° 713Thème : Général

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Le Mouvement de Libération du Peuple Kurde au Kurdistan d’Irak

Le Mouvemet de Liberation du Peuple Kurde au Kurdistan d’Irak

Peshraw Karim Ahmed

Université de Paris VII

La superficie du Kurdistan représente celle des quatre départements du Nord : Mossoul, Suleimaniyya, Erbil et Kirkuk, c'est à dire une superficie totale de 97.700 km2. Mais quelques régions kurdes habitées par des Kurdes sont rattachées à de nouveaux départements, comme par exemple la ville kurde de Khanaqin est rattachée à Dialla. (La superficie de la ville est de 3789 Km2). Finalement, la superficie du Kurdistan habité par les Kurdes est de 101.489 Km2.
.....



I

Introduction

La vie (1) est un phénomène de mouvement spécifique à la matière ; l'humanité est l'un des aspects de la vie en général, de même que la tribu, le clan et le peuple sont des manifestations de l'humanité. La nation est aussi la manifestation d'un peuple. Le phénomène est une répercussion matérielle de la matière. La matière est en perpétuelle évolution.
L'humanité est une unité socio-matérielle qui, comme toutes les autres unités sociales elles-mêmes en plein devenir, n'est pas assujettie à quelque limite qu'elle soit. L'évolution continuelle propre à la matière se manifeste dans les caractéristiques essentielles et accessoires, les propriétés essentielles et accessoires de la matière demeurant indissociables pendant une certaine période, ce qui explique l'immuabilité de la matière. Comme toute tribu, tout clan et toute nation sont des types d'unité sociale, il n'en reste pas moins que chaque cas a ses propres caractéristiques différencielles qui, elles aussi, demeurent indissociables pendant un certain temps, tout en assurant l'unité ét la contradiction.
Le caractère unitaire indissociable de tout peuple fait qu'il ne se reconnaît que par lui-même et non par le biais d'un autre peuple, comme c'est le cas pour le peuple kurde. Cette unité et cette indissociabilité font donc que le peuple kurde est une nation, comme les autres peuples sont autant de nations. Pour le facteur d'unité, les nations du monde arrivent (2) à l'étape Komrovısm (3).

L'évolution de toute société est liée aux relations sociales à l'intérieur de cette société, ainsi qu'aux relations avec les autres sociétés proches ou éloignées. Les relations intérieures à une société sont d'ordre historique, linguistique, économique, et d'ordre relevant des normes et des coûtâmes, etc... Mais les relations avec les autres sont d'ordre économique, religieux, politique, etc...(4). On peut dire que ces relations sont comme des chaînons enchevêtrés, entremêlés, liés les uns aux autres, qui se conditionnent et se déterminent mutuellement. Pour comprendre les causes de la force, la faiblesse ou la disparition de toute société, il faut remonter à la cause première (le premier chaînon) à travers laquelle il faut déceler la raison foncière et déterminante. L'évolütion de l'histoire est déterminée par des lois générales intérieures, qu'il faut découvrir (5).

Nous avons dit au début que le peuple et la nation sont des idées de relation propres à l'humanité. Or, si l'on impose un certain type de relations à l'intérieur d'une unité sociale qui est déjà en relation, cela ne peut relever que de l'extrémisme, voire du racisme (6).

Le fait d'imposer un type de relations au sein d'une relation qui caractérise un peuple sans tenir compte de la liberté de la diversité, crée une certaine communauté, voire homogénéité de la forme et du contenu. La vision exttêmiste, nationaliste de la notion de l'identité spécifique est une tentative de dissociation de la nation de l'humanité, et une imposition des caractéristiques de cette nation sur les autres nations. Donc, le fait de dissocier ce qui est particulier et général de l'humanité veut dire dissocier le particulier du général et imposer le premier au dernier. C'est pourquoi on peut considérer, d'un point de vue philosophique, que tous les nationalistes et les chauvinistes sont métaphysiques.

Le fait de considérer les traits généraux de l'humanité seulement, sans tenir compte des traits différentiels qui sont des éléments constitutifs du premier, entraîne la mort des traits différentiels, ce qui peut être considéré comme une vision superficielle des choses , incapable de discerner le fond et la forme. Donc, le fait de ne pas prendre en considération la spécificité des relations d'une nation, et l'attitude indifférente de ceux qui pensent de la sorte, sont des cosmopolites (7).

On peut se poser la question suivante : la pensée nationaliste a-t-elle la même forme, le même contenu, de son début à sa fin ? Ou du moins il faudrait distinguer entre la forme et le contenu, sachant que la plupart des idées générales des nationalistes sont similaires, telle que la fierté nationaliste, le centralisme économique, une organisation politique précise dans des limites déterminées, la pratique d'une même langue, et une même évolution historique...

Il faut préciser ici que l'idéologie nationaliste part de ces deux principes, et chaque nation suit l'un de-ces deux principes suivant le temps et l'espace : le principe de la colonisation ou de la domination, et celui de la liberté.

Les deux principes ont une relation étroite parce qu'ils sont un même point de départ, la liberté est une réaction contre la domination. Le nationalisme naît de l'effet de l'évolution d'une société. L'évolution des choses matérielles ne s'arrête pas. L'évolution apparaît sous la forme d'une unité et évolution internes.

De la lutte et contradiction entre les forces évolutri-ces dans la société kurde qui aspirait à un développement, et les forces étrangères réactionnaires qui entravent ce développement, surgit l'esprit de libération au sein du peuple kurde et une lutte s'ensuivant dans des moments historiques déterminés (8). Alors, cette évolution et cette unité interne d'une société demeurent le point de départ des nationalismes chez les peuples dominés ; et on peut penser que c'est un phénomène naturel progressiste dans la mesure où il s'agit de la défense de la dignité, et d'une recherche d'une voie de développement indépendant. La fait d'adopter des idées nationalistes chez les peuples dominés est une réaction naturelle contre les dominants. "La vie d'une nation vaut une guerre ; une rectification de frontière, un déplacement de compétence ne méritent pas le risque de grandes pertes humaines. Il s'agit de l’existence d'un peuple non seulement dans ses libertés individuelles, mais dans son indépendance nationale, la guerre n'est pas seulement licite, elle est morale : la personnalité d'une nation échappe à toute incarcération territoriale" (9). Ce sont des idées qui combattent les idées d'hégémonie et d'asservissement de l'homme par l'homme. C'est une réaction, une forme et une façon de préserver les limites naturelies propres à tout élément pourvu d'une vie.

Tout élément vivant dans la nature est enclin de par sa nature.’à se conserver, à éviter sa mort.

Le phénomène de nationalisme, qu'on peut interpréter comme étant une lutte pour la préservation de son identité, se manifeste d'une façon particulière à travers son évolution historique ; et chaque étape historique, qu'elle soit antérieure ou ultérieure, porte en soi une ou des idéologies qui la soutiennent ou la détruisent en même temps. Le nationalisme est une idéologie qui soutient la bourgeoisie et la consolide dans son existence, autrement dit qui renforce l'infrastructure de la société, et donne sa forme générale à la nation (démocratie, socialisme, dictature...).

Cette forme prend naissance après qu'il y ait d'autres formes de gouvernement de sa nature. Au départ, l'idéologie nationaliste appelle la libération de la nation, et la délivrance de la domination étrangère et ses conséquences négatives. *^L 'un des buts de la révolution nationale aujourd'hui est la libération du colonialisme et la réalisation de la démocratie et l'avènement du socialisme est un fait qui vient après 10).

Il est évident qu'au début de sa naissance dans la nation ont lieu des luttes de classe qui ne sauraient prévaloir la cause de la libération nationale. "Nos syndicats ont arrêté leur politique envers les problèmes du pétrole étranger et national ; or, à partir de cette politique, il fallait poursuivre nos négociations pour nos droits avec les entreprises" (11). Les pays colonisateurs ont construit dans les pays colonisés une base économique faible, et cela est dû à l'absence de cohérence et d'équilibre dans la stratégie économique du colonisateur, c'est une économie d'anarchie. Au milieu des années cinquante, une pensée vit jour au Kurdis-tant qu'on appela plus tard la pensée nationaliste (12).

En même temps, la plupart des pays du Tiers Monde se débarrasèrent du colonialisme de façon définitive avec des gouvernements nationalistes sur le plan politique ; cependant que l'affaire des Kurdes et du Kurdistan s'est compliquée encore davantage. D'où notre intérêt de comprendre ce problème d'un peuple persécuté.

Le problème du nationalisme kurde date de cette époque. Nous le verrons, il est tout à fait original. Les Kurdes sont un peuple ancien, vivant au Proche Orient depuis 3000 ans. C'est une grande civilisation, la civilisation des Mèdes (13).

Elle a fourni de grands scientifiques et philosophes comme Ibin Athir, Ibin Khalakan.

Après la première guerre mondiale qui a provoqué la chute de l'empire ottoman, le Kurdistant s'est vu divisé en quatre. Le peuple kurde a donc subi les conséquences de cette "drôle de guerre" . Cette initiative a rencontré l'hostilité des Kurdes.

Si le traité de Sèvres (10 Août 1920) était sur quelques points favorables au peuple kurde, en revanche, le traité de Lausanne (24 Juillet 1923) lui était franchement défavorable.

"Le conseil fit procéder à une enquête pour connaître les desiderata de la population concernée (kurde). Mais, au moment du verdict Mossoul fut rattaché, le 5 Juin 1926, à l'Irak sous mandat britannique, en dépit des aspirations de la population de ce territoire à la création d'un état kurde indépendant" (14).

Les Kurdes au Kurdistan méridional ont très mal accepté les faits. Dès 1919, les Kurdes se révoltèrent. Cette révolte continua jusqu'en 1927.
D'autres révoltes locales ont été encore enregistrées ; ainsi celles de la tribu Barzani en 1932, 1943, 1945, 1947, pour déboucher finalement sur une révolution nationale.

" Le mouvement de libération du peuple kurde au Kurdistan d'Iran, de 1975 à nos jours". J'ai choisi cette période car elle a une très grande importance, en raison des évènements qui ont exercé une influence directe et jusqu'à maintenant sur l'avenir de ce peuple, ainsi que sur celui d'autres peuples du Proche Orient.

Durant cette période, il s'est produit un changement dans la structure sociale de ce peuple, qui a influencé l'ensemble du mouvement, de façon évidente. Ce changement structural confère à cette période une importance toute particulière.

Bien que quelques analyses très importantes aient été publiées sur la révolution du peuple kurde au Kurdistan d'Irak durant les années 1961-1975, ces recherches n'ont pas couvert tous les aspects de cette révolution. Sur le plan de l'information, on peut les classer en trois catégories:

1) Les analyses académiques,
2) Les publications à la solde du gouvernement irakien et dont le contenu est directement l'antithèse de la révolution kurde. C'est pourquoi, elles n'ont aucune importance scientifique et historique authentique.
3) La troisième catégorie de ces publciations concerne des livres édités par le P.D.K.I et le Parti communiste d'Irak. Elles participent également d'un esprit de parti et dans de nombreux cas, elles ont négligé le rôle du peuple au profit du rôle du parti. C'est pourquoi, l'utilisation de tels documents nécessite, de la part des chercheurs, une certaine prudence.
On peut citer l'exemple de Djalal Talabani ou de Madjed Abdolreza.

Une partie de ces livres traite des défaùts de la révolution (1961-1975), comme c'est le cas du livre de Sami Abdol Rahman. Mais, en gros, toutes ces critiques nécessitent une analyse scientifique, afin de devenir une base solide qui permette une analyse de la période dont j'ai l'intention de parler.

C'est pourquoi, nous considérons ce travail analytique comme une partie propre du sujet. Mais, en fait, durant la période de 1975 à nos jours, aucune analyse scientifique n'a été faite.

L'importance du problème kurde tient d'une manière générale à la situation géographique du Kurdistan, de l'Antiquité à nos jours. D'autre part, il fait partie du mouvement de libération des peuples dans le monde.
L'importance particulière du problème apparait dans plusieurs points, que nous avons l'intention d'analyser et de préciser de la manière suivante.

1) Marx. Engels, : Filosofskaya Ensiklopediya (en russe) "La vie", Encyclopédie de Philosophie, ed. "Sovetskaya Ensiklopediya", Moscou, 1983, p. 186 (La vie est une forme d’existence de corps protéines, et cette forme en soi est le résultat d'un changement continuel des constituants chimiques de ce corps).

2) Zagladin, "Marx et le processus historique pour la libération de l'homme" (en arabe) Al Nahj (éclaircir), trimestrielle, n° 1 Juin 1982, p. 242. Et enfin l'homme dans son devenir et son évolution selon Marx est l'accaparement de l'individu qui reproduit l'expérience historique de l'humanité, sa civilisation matérielle et spirituelle.

3) Komrovism: C'est un type de société où finissent les frontières nationales, politiques, où se dissoluent toutes les cultures spirituelles, matérielles de l'humanité, où apparait la forme la plus sublime de l'union de l'humanité.

4) Bakhch Abdel Hamid : "Les lois déterminant l'activité idéologique, politique et organisationnelle du Parti communiste et son unité" (en arabe) Al Nahj, trimestrielle, n° 1 Juin 1982, p. 162 (Les lois régissant l'évolution sociale sont des lois qui régissent l'activité humaine. Ces lois ne pourraient exister sans les circonstances de la vie humaine).

5) Bakhch Abdel Hamid, ibid. p.161

6) A ce propos, voir par exemple : Saddam Hussein, Al Sawrah (La Révolution) -en arabe-, Bagdad, 29.6.1983.

7) Nul n'existe en dehors de la nature, ni rien n'existe sans elle, avant ou après elle. La nature, sans condensation illimitée de la matière, n'est point admise comme vraie, elle n'existe pas et ne doit pas être.
L'internationalisme ne peut être concu en dehors de la nation, et ne peut exister sans elle, et ne pourra pas exister après la nation.
L'internationalisme sans des formes d'unité nationale ne peut avoir lieu, ni exister.

8) Talabani Djalal : Kurdustan we AI Haraka Al Qowmiye Al Kurdiye, [Kurdistan et National Kurde], Ed. Dar Ataliya Litibaâ we Nachr, Beyrouth, 1971, p. 175.

9) Albert de la Pradelle : La paix moderne (1899-1945) de la Haye à San Francisco, les Ed. Internationales, Paris, 1947, p. 182.

10) Slavar Naytchnoqo kommunizma. (Dictionnaire du communisme scientifique).en russe.Ed. Politizdat Moscou, 1980, pp.285-286.

11) Arra Khachador : Min tadjak Al aamal Alnqabi Al aanmali fi Al Iraq Des expériences du travail syndical ouvrier en Irak), sans lieu, 1984, p. 36

12) Nabaz Jamal. Biri "Natawayî" y kurdi ne Biri "Qewmiyyet" i Rouhelatî w ne Biri "Nasyona-lizm” i Rojavayi ye, (La pensée 'Natawaie' n'est pas une pensée "Alqawmiya" de l'Ouest, ni une pensée “nationaliste" d'Occident), en kurde, Ed. Imprimerie Liberté, Suède, 1984, p. 174.

13) Laurent Chabry, Annie Chabry : "Politique et minorités au Proche Orient", Ed. Maisonneuve et Larose, Paris, 1984, p. 252 "L'origine historique des Kurdes pose encore aujourd'hui un problème aux kurdologues. Pour certains (Pr Minersky), ils seraient les descendants directs des Mèdes. D'autres, (Pr. Marr) voient dans les Kurdes la résultante d'un mélange entre ces mêmes conquérants mèdes et le peuple autochtone des Kardoukhs".

14) Kendal : in Les Kurdes et le Kurdistan, ("sous la direction de G. Chaliand), Ed ; Maspéro, Paris, 1981, p. 89 et suiv.

Première Partie: Connaissance De La Region

I.- La Geographie

La superficie du Kurdistan représente celle des quatre départements du Nord : Mossoul, Suleimaniyya, Erbil et Kirkuk, c'est à dire une superficie totale de 97.700 km2. Mais quelques régions kurdes habitées par des Kurdes sont rattachées à de nouveaux départements, comme par exemple la ville kurde de Khanaqin est rattachée à Dialla. (La superficie de la ville est de 3789 Km2). Finalement, la superficie du Kurdistan habité par les Kurdes est de 101.489 Km2.

Le Kurdistan historique est la terre ancestrale des Kurdes, comme la ville de "Halla". Comme disait Ibn Batouta, "les gens de cètte ville constituent deux groupes, les Kurdes et les Djawanes (1), entre eux la terreur est continue et la guerre n'en finit pas"(2). Et, pour preuve de la kur-dité de Halla, l'un des Djawanes a été parmi les premiers à se convertir à l'Islam. Il s'appelait Djaban Kurde. L'émigration des Arabes de la Presqu'île Arabique (d'où l'appellation dans l'histoire "l'Irak Arabe" ) a poussé les autochtones kurdes vers le Nord.

1) Une ancienne tribu kurde.

2) Mustapha Djawad : Djawan Al qebile Al kurdiye Al munsiye we Mechahir Al Djawaniyn, (en arabe), (Djawan, tribu kurde égarée et célébrations des Djawaniens), Bagdad, 1975, p-10

 




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