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Le Conflit Kurde en Turquie Etude Historique et Politique


Auteur :
Éditeur : IEPG Date & Lieu : 1993-09-01, Paris
Préface : Pages : 286
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 210 x 295mm
Code FIKP : Liv. Fre. Bal. Con. N° 2254Thème : Thèses

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Le Conflit Kurde en Turquie Etude Historique et Politique

Le Conflit Kurde en Turquie Etude Historique et Politique

Bayram Balcı

Intitut d'Etudes Politique de Grenoble

Si la présence des Kurdes dans cette région proche-orientale nous est signalée depuis fort longtemps - Xénophon nous parle de la peuplade des Carduques -, c'est essentiellement à partir du dix-neuvième siècle que la question kurde commence à irriter les diplomaties des grandes puissances de l'époque. Pendant toute la période ottomane, la question kurde reste une affaire locale et sert d'outil aux Empires turc et iranien dans leur politique étrangère. Les tribus kurdes, composantes de la société kurde - si on peut l'appeler ainsi -, sont parfaitement inféodées à leur chef qui décide de la nature des relations à entretenir ...



INTRODUCTION

Le Retour Sanglant du Nationalisme Kurde

Alors que nous réfléchissions sur le classement des motivations qui nous ont poussé à travailler sur le problème kurde, les journaux télévisés informaient en ce milieu du mois d'août que les militants du PKK venaient d'adopter une nouvelle stratégie dans leur combat : la guerre des otages. Les récentes prises d'otage de quelques touristes occidentaux viennent consolider l'idée que le problème kurde ne se cantonne dans la région proche-orientale. Il est plus que jamais en voie de devenir un problème à dimension internationale. C'est au lendemain de la guerre du Golfe que les Kurdes éveillent - une fois de plus - les consciences occidentales. Leur fuite vers la Turquie et leur souffrance sur les chemins de l'exode sont filmés en direct par toutes les télévisions. Les opinions publiques découvrent un peu plus ce peuple dont on leur a toujours dit qu'il était l'oublié de l'histoire. Elles découvrent par la même occasion que le problème kurde ne se limite pas à l'Irak. Le PKK qui n'était alors connu que par les spécialistes, des questions d'Orient et les amateurs de l'actualité politique internationale découvrent l'existence d'Apo et de ses hommes qui rêvent de bâtir un Etat kurde en s'inspirant de l'idéologie marxiste-léniniste. Dans les mois qui suivent, la montée de la tension entre la guérilla du PKK et l'armée turque, qui se traduit par la mort de centaines de personnes, civiles et militaires, provoque des ondes de choc qui parviennent jusque dans les villes occidentales. Les attaques par le PKK contre les intérêts turcs en Europe et les prises d'otages occidentaux aident les opinions publiques européennes à saisir davantage l'actualité de la question kurde.

L'opinion publique turque, quant à elle, n'a pas attendu la guerre du Golfe pour découvrir le lancinant et épineux problème kurde dont les origines sont très anciennes. Les attaques du PKK qui débutent véritablement en 1984 chagrinent la population qui prend conscience de la gravité du problème. Les autorités turques qui commentent les événements parlent d'une "poignée de bandits" et rappellent sans cesse que l'Etat maîtrise la situation. Aussi bien les services secrets que les forces militaires ne semblent pas accorder une grande importance à cette petite organisation, alors peu connue, qui prétend "libérer le Kurdistan du colonialisme turc". La classe politique et l'armée sont convaincues qu'il s'agit-là de quelques militants d'extrême-gauche qui ont survécu au "nettoyage" de l'armée après le coup d'Etat du 12 septembre 1980. La multiplication des actions du PKK ne tarde pourtant pas à alerter les autorités turques et les mesures prises par les différents gouvernements qui se sont succédés ces dernières années sont là pour montrer l'évolution des esprits du côté turc. La question kurde est incontestablement le problème numéro un en Turquie et le gouvernement de Madame Ciller semble l'avoir bien saisi.
Depuis quelques années, il ne se passe pas un jour sans que les confrontations entre le PKK et l'armée turque ne fassent de nouvelles victimes. Les scènes de carnage font désormais partie de la vie quotidienne en Turquie et l'opinion publique du pays semble peu à peu s'y habituer.

Le caractère actuel et urgent de la question kurde est cependant loin d'être la seule motivation qui nous incite à l'étudier. La République de Turquie n'a - hélas - pas toujours été le théâtre de la libre discussion sur la situation des Kurdes. Le débat sur le sujet n'a été autorisé par la législation turque que depuis peu de temps. Nous aimerions par la présente étude - dans la mesure de nos capacités -, contribuer à ce débat. Les autorités turques ont enfin compris - peut-être furent-elles contraintes de le faire - que le problème kurde ne pouvait plus être ignoré. Tout bon démocrate ne peut que se réjouir de cette ouverture et se doit de contribuer autant qu'il peut pour que la discussion - enfin possible - se développe dans un climat de paix et de sérénité. Or, le débat engagé sur cette question ne nous semble pas - jusqu'à présent en tout cas - se dérouler dans un esprit de sagesse et de raison. Toute personne responsable se doit de tout faire pour que le bon sens et les valeurs humanitaires l'emportent. Sans que cela puisse être considéré comme de la prétention, nous espérons que notre travail pourra y contribuer quelque peu. Personnellement touché par le malheur qui frappe cette partie de la terre, nous voudrions participer à notre manière à ce débat qui mérite d'être traité avec une certaine philosophie. Comme le déclarait Turgut Ôzal lorsqu'il a dévoilé son projet visant à mettre fin à l'interdiction qui frappait la langue kurde, la réalisation du progrès ne peut être atteinte que si les tabous sont brisés 1. Convaincus que seuls le dialogue et la libre discussion permettent de parvenir à une solution au problème kurde, il nous a semblé opportun de présenter - ne serait-ce que brièvement - à quelques opinions occidentales, les traits saillants de la question kurde qui secoue l'ensemble de la vie politique turque. Le présent travail a été réalisé dans l'urgence, urgence d'une actualité qui nous interpelle sur une guerre qui ne dit pas son nom dans le sud-est anatolien. Pas de sensationnel pourtant dans notre démarche puisque nous tâcherons d'analyser les origines du problème.

Les fondements de la question kurde.

Si la présence des Kurdes dans cette région proche-orientale nous est signalée depuis fort longtemps - Xénophon nous parle de la peuplade des Carduques -, c'est essentiellement à partir du dix-neuvième siècle que la question kurde commence à irriter les diplomaties des grandes puissances de l'époque. Pendant toute la période ottomane, la question kurde reste une affaire locale et sert d'outil aux Empires turc et iranien dans leur politique étrangère. Les tribus kurdes, composantes de la société kurde - si on peut l'appeler ainsi -, sont parfaitement inféodées à leur chef qui décide de la nature des relations à entretenir avec les puissances locales. La très large autonomie accordée aux principautés dynastiques kurdes - autre réalité de la société kurde - permet aux deux géants de la région de bénéficier de la "docilité" de cette population montagnarde réputée pour ses qualités guerrières et son obstination dans la révolte^. Les deux Empires utilisent le plus souvent les tribus dans leurs relations frontalières en les engageant dans des guerres qui ne les concernent pas. Les puissances européennes de l'époque sont …

1 In Cumhuriyet, 1er février 1991.
2 In Basile Nikitine. - Kürtler (les Kurdes) traduit du français. - Istanbul, Özgürlük Yolu Yayınları, 1986.- / 323.




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