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La Turquie en 1936 : Le mouvement Ouvrier et l’Adoption du Premier du Code du Tavail


Auteur :
Éditeur : Université de Paris VII Date & Lieu : 1988-10-01, Paris
Préface : Pages : 84
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 215 x 295mm
Code FIKP : Liv. Fre. Cel. Tur. N° 1387Thème : Mémoire

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La Turquie en 1936 : Le mouvement Ouvrier et l’Adoption du Premier du Code du Tavail

La Turquie en 1936 : Le mouvement Ouvrier
et l’Adoption du Premier du Code du Tavail

Nevzat Celik

Université de Paris VII

Dans la première période de la Constitution de l’Etat National Turc, les relations entre le mouvement kémaliste et le mouvement ouvrier ne se réduisent pas à une simple exclusion de ce dernier de l’espace politique en -formation.
Un processus d’inclusion habilement conduit par les kémalistes a fait jouer au mouvement ouvrier un rôle non négligeable dans l’homogénéisation de l’espace national turc. Cependant, "le mouvement kémaliste élimina les autres mouvements de la scène politique du nouvel état turc. D’une part, ces mouvements étaient constitués ...



INTRODUCTION

L’industrialisation de l’Europe a eu des conséquences considérables. L’aspect économique des nations a changé.
De nouveaux problèmes sociaux et politiques ont surgi partout où la machine a triomphé. Elle a commencé au début du XVIIIème siècle en Angleterre dans l’industrie de la soie. La révolution industrielle, vers 1875-1880, a déterminé la période actuelle des transformations économiques et sociales du monde.

Evoluant sous le régime de la libre concurrence, le prodigieux essor économique du XIXème siècle a mis l’homme en présence de la machine. La division du travail, la concentration industrielle, les divergences entre patrons et ouvriers ont posé des problèmes sociaux.
Dans tous les pays industrialisés, la machine a suscité un profond mécontentement au sein de la classe ouvrière. La réduction des salaires, la durée excessive de la journée de travail, l’entrée des femmes et des enfants dans les usines, le chômage massif avec toutes les conséquences désastreuses ont consacré la rupture définitive entre le capital et le travail et ont donné naissance à une nouvelle classe : la classe ouvrière.

Au premier stade de sa renaissance industrielle, la nouvelle Turquie se trouve devant les mêmes problèmes que ceux que les pays industriels cherchent à résoudre depuis le début du XIXème siècle.
Les années 1930 constituent un tournant décisif en ce qui concerne l’histoire du mouvement ouvrier et celle des relations professionnelles en Turquie. En outre, le premier Code du Travail promulgué en 1936 a marqué la législation sociale jusqu’à nos jours.

Le processus d’industrialisation au plan national est en cours. Déjà l’on ressent les premiers souffles de la vie ouvrière. Son intensification se poursuit, grâce au nombre croissant d’usines qui s’élèvent peu à peu dans le pays.
Le problème du travail et du travailleur est donc posé. Le gouvernement républicain en élaborant son programme de redressement dans le plan industriel avait déjà envisagé la codification du travail et un projet de la loi avait été élaboré.

Après une assez longue période de gestation, le projet a vu le jour et est discuté à la Grande Assemblée Nationale, pour trouver une solution entre le patron et 1’ouvr i er.
Ce que l’on sait, c’est que durant cette période, le syndicalisme était interdit, les salariés n’avaient ni congés payés, ni sécurité sociale, la journée de travail n’avait pas de limite, les salaires étaient des plus bas : l’assurance ouvrière n'existait pas. Les conditions de travail étaient extrêmement pénibles.

On sait qu’à cette époque-là, beaucoup de prisonniers étaient contraints par le Gouvernement à des travaux forcés sur les grands chantiers de chemin de -fer.
D’autre part, une grande partie des ouvriers ne travaillaient pas de façon permanente à l’usine et un certain nombre d’entre eux continuaient de cultiver la terre ; l’ouvrier qualifié était rare.

Néanmoins, la Turquie est déjà entrée dans le flôt de l’industrialisation. La nécessité est ressentie de procéder à l’harmonisation de l’ensemble du peuple turc, jusque-là divisé en groupes séparés et hétérogènes. Le Code du Travail sera l’outil et le ciment de cette harmonisation, dont l’un des objectifs est la disparition du mot "prolétaire". L’intensification du mouvement ouvrier et sa structuration en tant que mouvement reconnu et maillon de la société, rendent vain cet objectif.

L’idée de créer une loi réglant les divergences et les malentendus existant entre les ouvriers et le patronat émergera désormais de façon de plus en plus évidente. Le 15 Juin 1936, les députés de 1"Assemblée Nationale votèrent le Code du Travail turc. Le texte fut- publié au Journal Officiel Numéro 3008, et mis en vigueur un an plus tard.
Très rapidement, sa mise en application mit au grand jour les imperfections de sa conception et ses manquements. Parmi ces imperfections, notons l’impossibilité pour le gouvernement de contrôler les activités des entreprises de moins de 10 employés, ces entreprises n’entrant pas dans le champ du Code du Travail.

Outre les manquements qui caractérisaient d’une certaine façon le Code du Travail de 1936, certains articles prévoyant notamment l’interdiction de la grève et du lock—out éloignaient le Code du Travail de l’objectif qu’il s’était originellement fixé : la justice sociale.
Ce sont là quelques aspects qui nous ont poussé à faire ce travail.

Méthodologie

Nous avons opté pour une approche spécifique du mouvement ouvrier et du premier Code du Travail Turc. L'objet de notre mémoire n’est pas une approche manichéenne du problème, mais l'analyse de la situation politique et économique en 1936 et la façon dont cette situation a débouché sur le premier Code du Travail. Nous nous situerons dans une perspective globale pour positionner le problème, mais le centre de notre étude se trouvera dans une perspective analytique et, nous l’espérons, objective.

Nous avons conduit notre recherche à partir d’une double démarche : une démarche bibliographique centrée essentiellement sur les conditions d’existence et de travail, et sur l’aspect socio-économique.
Une démarche empirique : observation de faits, réalisation, décrets et lois.
Les sources principales pour l’élaboration de notre travail se composent essentiellement de journaux et revues parues à cette époque à Paris et en Turquie. Les difficultés que nous avons rencontré au niveau de notre investigation résident dans les rétentions d’informations. Les autorités du Ministère des Affaires Etrangères Françaises d’une part, ainsi que les autorités turques d’autre part, n’ont pas consenti à nous transmettre certains documents.

Le principe de notre étude repose sur un constat et une analyse, non pas sur une critique des différentes motivations ayant donné le jour au Code du Travail au de son organisation.
Nous nous garderons bien de tout jugement arbitraire. Nous présenterons donc les aspects, particularités ou originalités de la situation socio-économique précédant la création du Code du Travail. Notre démarche est constituée d’une part par une analyse des conditions ayant préparé la réalisation du premier Code du Travail turc; d’autre part, la démarche que nous avons adoptée consiste en la présentation des principaux aspects du Code du Travail.

Il nous semble que la recherche présente un intérêt au niveau du caractère original de la démarche que nous avons conduite. Cette démarche, rappelons-le, consiste à replacer un -fait social précis dans un contexte global. Quant au fond, nous ne serons pas insensibles aux revendications du monde ouvrier turc de cette époque-là et à l’immense progrès social que représente la Constitution du Code du Travail. Ceci est le second intérêt de notre travail dans la mesure où notre mémoire connait peu de précédents.

La première limite a été évoquée préalablement. Elle concerne la rétention d’information. Cette dernière implique une approche partielle de l’organisation, elle relativise l’authenticité de notre analyse. La deuxième limite est spécifique au réel respect des aspects prévus par le Code du Travail Turc. Ces conditions n’ayant été réellement mises en vigueur que très tardivement, notre analyse ponctuelle ne nous a pas permis d’approcher dans le temps l’application du Code du travail.
Notre travail sera constitué en trois parties. Dans un premier chapitre nous considérons la situation économique et politique intérieure. D’une -façon générale, les conditions socio-économiques nous éclaireront sur les raisons ayant justifié la création d’un Code du Travail.

Nous analyserons ensuite le mouvement ouvrier en Turquie en 1930-1936 en présentant les différentes manifestations de grève préalables au Code du Travail.
Enfin, l’analyse juridique du Code du Travail nous amènera à présenter les aspects nouveaux qui devront régir désormais les conditions de travail en Turquie.

Chapitre I

La Situation Economique Et Politique Intérieure

Dans la première période de la Constitution de l’Etat National Turc, les relations entre le mouvement kémaliste et le mouvement ouvrier ne se réduisent pas à une simple exclusion de ce dernier de l’espace politique en -formation.

Un processus d’inclusion habilement conduit par les kémalistes a fait jouer au mouvement ouvrier un rôle non négligeable dans l’homogénéisation de l’espace national turc. Cependant, "le mouvement kémaliste élimina les autres mouvements de la scène politique du nouvel état turc. D’une part, ces mouvements étaient constitués autour des groupes d’intellectuels qui n’avaient pas de base sociale suffisamment étendue pour diffuser leurs idées, et ceci malgré les efforts et le soutien d’un certain nombre d’ouvriers. D’autre part, il faut également rappeler que le nationalisme battaint son plein à cette époque et vu l’état de guerre contre les forces étrangères, les ouvriers et les paysans auxquels voulaient s’adresser les partis de gauche, voyaient comme ennemis celles-là et non les groupes sociaux dominants composés des propriétaires fonciers et de la bourgeoisie commerçante anatolienne. De plus, la politique subtile des kémalistes vis à vis de ces mouvements, fut tolérante pendant un certain temps (1)

.....

(1) Cahiers du GETC (Groupe d’Etudes sur la Turquie Contemporaine), n°l — Hiver 1984—1985, p. 31.




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