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Le Kurdistan entre l’Empire Ottoman et l’Empire Perse


Auteur :
Éditeur : Universite de Paris X Date & Lieu : 2000-06-23, Paris
Préface : Pages : 156
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 210x295 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Gen. Abd. Nat. N° 4603Thème : Thèses

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Le Kurdistan entre l’Empire Ottoman et l’Empire Perse


Le Kurdistan entre l’Empire Ottoman et l’Empire Perse

Najat Abdulla Ali

Universite de Paris X

Le concept de la nation a été au cœur de discours politique tout au long des deux derniers siècles. En effet, nous ne trouvons pas d’autre concept politique autant magique que nation dans l’histoire universel, on en donne des définitions différents et contradictoires.
Pour Renan, la nation est fondée sur la volonté de vivre ensemble, en partageant les valeurs des citoyennetés. Il a bien senti dans une conférence donnée à la Sorbonne, le 11 mars 1882 : qu’une nation est un plébiscite de tous les jours, donne une définition purement subjective que corresponde la base de la théorie du nationalisme civil. En contrepartie, pour Herder, la nation n’est qu’une langue et une ethnie1. En opposition avec la théorie du nationalisme civil, celle-ci corresponde à la base de la théorie du nationalisme ethnique. Cette ambivalence est souvent ramenée à une opposition schématique entre la conception française ...



PREMIERE PARTIE

I.1 : Définition du sujet :
I.1.1 : Frontière, guerre et histoire.

Les kurdes : les sacrifices de frontière.

Dans l’histoire du Kurdistan le XIXème siècle reste un siècle obscur, qui n’a guère été étudié par les historiens. En effet, la première moitié du XIXème siècle fut une période très sensible dans l’histoire kurde. En étudiant ce siècle, nous passons de la période de tolérance ethnique à la période de l’intégration ethnique de la nation kurde au sein de l’Empire Ottoman et de l’Empire Perse.

En effet, le Kurdistan n’ayant jamais eu son propre statut politique, il vivait toujours dans la marginalité des puissants Etats voisins ! En vertu de sa situation géographique à la frontière séparant l’Empire Ottoman de l’Empire Perse, le Kurdistan a subi la plupart des guerres de ces deux puissances sur son sol et le plus souvent dans les rangs de l’armés des deux côtés, les Kurdes se massacrant et se pillant eux-mêmes.
Aux origines, le Kurdistan était un théâtre pour la guerre et la confrontation des forces étrangères, et, par conséquent ce pays fut écrasé de part et d’autre par les guerres et les offensives permanentes de l’étranger. Evidemment, dans ces conditions, il ne reste aux Kurdes qu’à se ranger derrière l’une ou l’autre puissance et continuer comme une partie d’une région dans les frontières de ces empires voisins. De par l’appartenance régionale et le sentiment régionaliste encore vif dans sa mémoire et sa pensée, le peuple kurde, à son tour, a produit le phénomène de clientélisme envers l’un ou l’autre. Cela est devenu jusqu'à nos jours une partie de la culture du nationalisme armé kurde.

En effet, les Etats dominants ont été très fortement instigateurs du phénomène de clientélisme, et du sentiment régionaliste contre l’évolution du sentiment national kurde, et jusqu’à nos jours les Etats coloniaux du Kurdistan ont exacerbé ce sentiment régionaliste. A travers toutes les guerres et les confrontations dans ce pays ensanglanté, que dit-on aux archives historiques, manuscrites et aux chroniques historiques ? Elles étaient comme les citoyennes de ce pays la bûche de guerres infinies. Or, comme les kurdes n’avaient aucune institution ni pouvoir politique dans cette lutte régionale, leur histoire est obscure, sans source, rendant double le travail des historiens kurdes pour la réécrire aujourd’hui.

L’étude de l’histoire kurde est considérablement limitée par l’absence d’archives nationales kurdes. En effet, les manuscrits et les sources sont rarement dans des mains kurdes, et même s’il en existe encore, ils sont écrits soit en perse, soit en turc, et sont dispersés aux quatre coins du monde. Il faut savoir dans quelle partie du Kurdistan ces manuscrits rares ont été écrits, dans le Kurdistan ottoman ou dans le Kurdistan perse, car ils sont influencés par l’ombre de la pensée et l’ombre de la politique du pouvoir central dominant. Ceci est un point très important auquel les historiens doivent prêter attention. L’historiographie kurde au XIXème siècle est si pauvre que le nombre des chroniques et manuscrits kurdes ne dépasse pas les doigts d’une main ; cependant le XIXème siècle est plus chanceux que les siècles précédents.

L’étude de l’histoire kurde au XIX eme siècle, si elle n’aborde pas les problèmes de frontière entre l’Empire Ottoman et l’Empire Perse, serait une étude inachevée. En effet, le Kurdistan était à la fois un facteur de guerre entre ces deux empires et un facteur pour la paix et les accords entre eux. C’est la raison pour laquelle la plupart des traités, accords, documents administratifs et lettres officielles entre ces deux empires porte en grande partie sur les Kurdes et le Kurdistan. Cela nous a encouragé à y consacrer un mémoire, car nous croyons que ce sujet est encore un terrain vierge pour l’étude de l’histoire kurde au XIXème siècle.
En vertu de la place géopolitique et de la combinaison avec les peuples voisins du Kurdistan, nous voyons que la plupart de ses événements historiques ont pris leur place dans l’historiographie de leurs voisins (Turcs, Arabes et Perses). Ceci a sa valeur comme matériel historique.
Nous nous sommes donc servis d’une grande partie de ces sources orientales. Toutefois, il faut relire ces sources avec distance, loin du fanatisme des croyances religieuses et nationales.

Pour la partie principale de notre étude, nous nous sommes servis de documents officiels des archives perses, ottomanes et anglaises, ainsi que des chroniques historiques de peuples voisins. Nous avons trouvé dans ces sources beaucoup de sources historiques utiles pour l’historiographie kurde, capable de nous éclairer sur certaines questions obscures qui n’ont pas été étudiés jusqu’à nos jours. Il est certain que le Kurdistan a toujours été attiré par l’Empire Ottoman et l’Empire Perse, puisqu’il était dans la marginalité politique de ces puissances. Ainsi, le retour aux archives de ces deux empires nous aide à mieux comprendre la place géostratégique du Kurdistan dans la lutte entre ces deux puissances.

Cette étude est une approche thématique sur la nation et le problème de frontière : le Kurdistan comme problème de frontière entre ces deux empires, et les répercussions de ce problème sur l’avenir et le sort politique du Kurdistan. Dans cette étude nous évoquons la notion de la nation kurde, qui diffère du concept qui évolua en Occident au début du XIX eme siècle. De plus, la définition de la nation en Orient se fait d’après des éléments de la théorie du nationalisme ethnique (sang et culture), tandis que la définition occidentale est plutôt subjective.

Enfin, notre étude est un projet long et approfondi qui conduit jusqu’à la fin de la première guerre mondiale, période au cours de laquelle les frontières de la région ont été redistribuées. La nouvelle carte du monde a déchiré la nation kurde plus que jamais, cette nation déchirée jusqu’à nos jours à la recherche d’une identité nationale.

I.1.2 : Historiographie de la nation : quelques repères

A) Qu’est qu’une nation ?

Le concept de la nation a été au cœur de discours politique tout au long des deux derniers siècles. En effet, nous ne trouvons pas d’autre concept politique autant magique que nation dans l’histoire universel, on en donne des définitions différents et contradictoires.

Pour Renan, la nation est fondée sur la volonté de vivre ensemble, en partageant les valeurs des citoyennetés. Il a bien senti dans une conférence donnée à la Sorbonne, le 11 mars 1882 : qu’une nation est un plébiscite de tous les jours, donne une définition purement subjective que corresponde la base de la théorie du nationalisme civil. En contrepartie, pour Herder, la nation n’est qu’une langue et une ethnie1. En opposition avec la théorie du nationalisme civil, celle-ci corresponde à la base de la théorie du nationalisme ethnique. Cette ambivalence est souvent ramenée à une opposition schématique entre la conception française (sol, citoyenneté) et la conception allemand (sang et culture). Ces deux conceptions, la nation comme volonté, la nation comme hérédité, sont toutes les deux traditionnelles2.

Dans la période de pré nation, le pouvoir et les Rois ont été si confronté qu’étaient sans limite. Louis XIV a dit toujours (L’état, c’est moi). Les philosophes de la lumière acculèrent l’idée de l’absolutisme féodal : Rousseau, Voltaire, John Locke, Kant, puis la déclaration d’indépendant de l’Amérique enl776, et enfin la révolution française alimenta fondamentalement l’idée de la nation. Avec la naissance de la nation, le concept de la frontière fut changé, les provinces qui ont été auparavant sous l’influence des Rois, avec l’installation de la société civile, les frontières des provinces prirent une importance est devenu une patrie de la nation. En conséquence, la nation et la province unifia, des états-nationaux naquirent.

En effet, l’émergence de la nation au XIXème siècle, était le produit de la modernité et le combat contre l’absolutisme féodal, pour Anthony Smith, étant donné que la nation est un produit de la modernité, mais elle naquit avant la période de la modernité. Avec l’évolution du …

1 Banel, P., La question nationale au XIXe siècle, éditions la Découverte, Paris, 1997, p.9.
2 Delannoi, G (sous la direction)., Théories du nationalisme, éditions Kimé, Paris, 1991 ; p. 13.




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