Pirtûkxaneya dîjîtal a kurdî (BNK)
Retour au resultats
Imprimer cette page

Ma vie de Kurde


Nivîskar : Multimedia
Weşan : Labor et Fides Tarîx & Cîh : 1993, Genève
Pêşgotin : Rûpel : 260
Wergêr : ISBN : 2-8309-0723-X
Ziman : FransizîEbad : 150x225 mm
Mijar : Bîranîn

Danasîn
Naverok Pêşgotin Nasname PDF
Ma vie de Kurde

Versions

Ma vie de Kurde

Noureddine Zaza est né au Kurdistan ottoman. À six ans, il est confronté au drame, lorsque Mustafa Kemal fonde la Turquie moderne: son père et son frère sont emprisonnés. Orphelin à dix ans, il se réfugie à Damas où il étudie le français. Plus tard, il tente de se joindre à Barzani qui lutte pour l'autonomie kurde, contre les Anglais et les Irakiens. Il est emprisonné une année, et parvient ensuite à se rendre à Beyrouth où il fréquente les universités française et américaine. Émigré en Europe, il obtient à Lausanne son doctorat en sciences sociales et pédagogiques. Fondateur de l'Association des Étudiants Kurdes en Europe, il retourne à Damas où il crée le Parti démocratique kurde de Syrie dont il est le premier président, ce qui lui vaudra la prison et la torture. Enfin de retour dans son Kurdistan natal, il doit fuir les persécutions turques en 1967. Il se réfugie alors à Lausanne où, ayant obtenu la nationalité suisse, il enseigne jusqu'à sa mort en 1987.


Préface à la deuxième édition

Dans une chambre de la Clinique Cécil, à Lausanne, en ce début octobre 1988, il est 19 h 30. Alité, la tête immobilisée au creux de l'oreiller depuis la fracture récente de deux vertèbres cervicales, Noureddine Zaza a les yeux fixés sur le petit écran. Comme il le sait par Le Monde qu'il lira jusqu'à l'avant-veille de sa mort, le 7 octobre, il se passe des choses intéressantes dans le monde puisque, de Varsovie à Santiago du Chili, des dictatures semblent sur le point de chanceler. « Seul un vaste mouvement populaire pourra conduire le Chili et la Pologne à la démocratie », murmure-t-il, sans excès d'optimisme et cependant avec confiance.

Mais soudain apparaissent sur l'écran des images effroyables humant un goût de déjà vu : le cortège interminable et lancinant des Kurdes d'Irak fuyant les gaz chimiques.

Après Halabja, au printemps 1988, qui ne suscita que de timides réprobations, après la première attaque chimique, l'été 1987, dans le Balisan, qui passa inaperçue, Saddam Hussein a décidé de remettre ça. Un exode de plus dans l'itinéraire sacrificiel des Kurdes d'Irak!

Vision irréaliste et franchement insoutenable, que celle de ces enfants, de ces vieillards et de ces femmes, tous innocents, et qui n'ont commis d'autre crime que celui d'être nés Kurdes.

Kurdes comme Noureddine Zaza qui éprouva dans son esprit et dans sa chair, le prix de son engagement. Ainsi en fut-il dès sa plus tendre enfance — il a cinq ans lorsque son père et son frère aîné sont emprisonnés — et jusque dans les prisons d'Irak et de Syrie où ses tortionnaires lui hurlaient :

« Alors, depuis le temps, sale Kurde, tu n'es pas devenu Arabe ? »

Ce soir d'octobre 1988, voici que sont exposés à l'opinion publique mondiale, et à sa conscience, les larmes et la détresse, le courage et la dignité d'un peuple trop souvent abandonné, tant par les Ponce Pilate de l'Occident que par les « frères » musulmans.

Face à tant de scènes effroyables, il suffirait, simplement, de tourner le bouton du poste TV et Noureddine Zaza ne verrait plus les visages de son peuple martyrisé. Mais, cloué à son lit, bien qu'impuissant, le corps meurtri, il veut continuer à suivre la marche du monde et des Kurdes. Solidaire jusqu'à son dernier souffle, il insiste pour qu'on n'éteigne pas...
Noureddine Zaza est parvenu, mais il ne le sait pas encore, au stade terminal du cancer qu'il combat depuis trois ans. Voici dix jours, en dépit de son extrême faiblesse, il enseignait stoïquement, pour la dix-septième année consécutive, à l'Université de Lausanne. « Par défi. »

Il dit se réjouir de retourner à Bussigny, chez lui, dans quelques jours. Il croit aux miracles de la physiothérapie qui lui avaient permis, un an plus tôt, de retrouver l'usage de la marche après une opération périlleuse dans la colonne vertébrale.

Marcher, envers et contre tout, contre le sombre pronostic de certains médecins et d'abord contre soi-même. Les défis — la vie contre la mort — qui sont le lot de la condition humaine mais encore plus des Kurdes, Noureddine Zaza y est habitué depuis toujours. Du Kurdistan de Turquie à la Suisse, il s'agira toujours, pour lui, de relever des défis afin que la vie et la vérité triomphent.

Il vit en Suisse depuis 1970, où, lors d'un premier séjour d'études entre 1947 et 1956, il a noué des amitiés profondes. Il a acquis la nationalité suisse en 1988 et admire le système politique helvétique, un modèle qu'il souhaite voir appliqué au Moyen-Orient dans l'intérêt de tous ses peuples.

...Ces jours d'automne 1988, le Kurdistan de son enfance se fera plus insistant et présent avec les appels téléphoniques de ses soeurs et de ses nièces et neveux. Alors l'enfance au Kurdistan de Turquie, avec ses couleurs et ses parfums, ses contes et ses malheurs, resurgit à travers la voix des proches restés « là-bas ».

Noureddine Zaza y a vécu ses dix premières années. Plus tard, entre 1967 et 1970, après un exil de plus de trente ans, il y passera trois ans à attendre les effets d'une démocratisation. Ses espoirs seront déçus. Bientôt, pour échapper à la mort, la police à ses trousses, il devra chercher asile en Suisse en 1970 où je l'y rencontrerai en 1971.

En plus de sa vaste érudition, Noureddine Zaza concilie humanité et noblesse à une indéfectible fraîcheur d'esprit. S'il récite par cœur des poèmes d'Eluard et de Nazim Hikmet, s'il vénère Victor Hugo et Mozart, il sait surtout écouter et voir le spectacle quotidien de la nature. C'est le chant d'un oiseau, les fraises des bois de Bussigny, les forêts valaisannes et le ciel de l'Engadine qui retiennent son regard.

Rien n'échappe à son émerveillement. Toujours, il savoure le présent à sa juste mesure.

Mais c'est aussi le Kurdistan qui, en Suisse ou ailleurs dans le monde, l'habite et l'interpelle et finira par le rattraper.
Comment — après les années de prison, de tortures, l'enfance bousculée par l'exil et la prison des aînés — vivrait-il (vivrions-nous) en paix, dans la douce et neutre Helvétie, alors que les Kurdes continuent d'être persécutés en Turquie, en Irak, en Iran, en Syrie, même si les médias se taisent trop souvent ?

Comment oublier les séances de tortures alors qu'il vous en reste des séquelles, plus de vingt ans après ? Ces douleurs récurrentes qui vous meurtrissent l'épaule, quand le froid se fait trop vif, souvenir des cent coups de nerf de bœuf qu'un tortionnaire lui asséna, à la prison mili¬taire de Mezzé, à Damas. Et le rictus du bourreau, qui vient régulière¬ment hanter ses nuits de cauchemars.

En vérité, dans sa vie, passé et présent ne font qu'un.

Dois-je dire, ici, que la sphère d'intérêt de Noureddine Zaza n'était pas confinée au Kurdistan ? Et qu'il ne cultiva jamais le ressentiment ? Toutes les injustices le révoltaient et il n'y avait pas de causes plus dignes de sympathie et de compassion que d'autres, dès lors que la dignité humaine était en péril. Ainsi l'aurai-je vu pleurer au moment où une rescapée française raconta Hiroshima, tandis que les récits de Chiliens et de Roumains sous la dictature le bouleversaient. Pour Noureddine Zaza, il n'y avait pas de violations des droits de l’homme plus inadmissible que d'autres. Si Juifs et Palestiniens, Vietnamiens et Tibétains avaient droit au respect de leur identité, il n'en pensait pas moins que les Kurdes, eux aussi, éternels orphelins parmi les damnés de la terre, méritaient la même attention.

Des Kurdes trop souvent oubliés — « Realpolitique » oblige — par les politiques, et dont il plaida inlassablement la cause dans les médias et lors de conférences à l'heure où les Kurdes ne faisaient pas la une de l'actualité. Si, à la fin, Noureddine Zaza était sans illusions quant à la réelle volonté de l'Occident et des Nations Unies de rendre justice au peuple kurde, il se montrait plus attristé encore, voire désespéré, par les incessantes divisions entre Kurdes et par le fourvoiement de certains, de leurs responsables sur le chemin du fanatisme et de l'obscurantisme.

Il croyait aux vertus du dialogue et à un système démocratique à l'helvétique, pas au langage de la violence.

Depuis le 7 octobre 1988, bien des choses, porteuses d'espoir et d'inconnu ont changé dans le monde.

De par la Guerre du Golfe, le problème kurde est aujourd'hui mieux connu*. Sera-t-il pour autant résolu, son peuple aura-t-il un jour droit à la reconnaissance de ses droits les plus élémentaires ?

Après avoir découvert le Kurdistan d'Irak en octobre 1991 puis en mai 1992, j'aimerais croire à un Kurdistan dont les lendemains seraient radieux.

Or il semble qu'en dépit de l'instauration d'un Nouvel Ordre mondial, la lâcheté et l'hypocrisie aient encore un avenir...
« Tant que l'être humain continuera à être piétiné et persécuté, un peu partout à travers le monde, l'humanité ne pourra pas rêver de jours meilleurs. »

Ainsi Noureddine Zaza terminait-il, en 1982, son récit autobiographique aujourd'hui réédité.

Comme lui, je crois que même si un combat est perdu d'avance, ce n'est pas une raison pour ne pas lutter. Le combat est inhérent à la condition humaine. Voilà la leçon que Noureddine Zaza m'aura apprise.

Gilberte Favre Zaza,
Bussigny, le 18 mai 1993.

________________________
* Un prix Noureddine Zaza a été créé par la famille de Noureddine Zaza afin de perpétuer sa mémoire et d'encourager les journalistes à parler de la cause kurde. Il a été attribué :
en 1989 à Antoine Bosshart du Journal de Genève et Bernard Langlois de Politis ;
en 1990 à Mark Kravetz de Libération ;
en 1991 à Jean Gueyras du Journal Le Monde ;
en 1992 à Jean-Claude Bührer de Coopération et du Journal Le Monde.


Ma vie de Kurde relate une grande aventure humaine: le parcours d'un homme, écrivain et leader politique, qui a tout sacrifié à la cause kurde, qui a souffert dans son esprit et dans sa chair afin que son peuple puisse jouir des droits politiques, culturels et humains les plus élémentaires.

La réédition de cet ouvrage, paru pour la première fois en 1982, prend une signification toute particulière depuis les événements de la fin des années 80 qui ont mis en lumière le martyre du peuple kurde. Le témoignage de Noureddine Zaza éclaire l'histoire contemporaine du Kurdistan, et révèle la richesse et la vivacité des traditions culturelles de ce peuple d'agriculteurs et d'éleveurs. C'est aussi toute la complexité de la situation moyen-orientale au XXe siècle qui est mise en lumière à travers l'histoire de Noureddine Zaza.


«Ses arrestations, ses fuites, ses prisons, les tortures qu'on lui inflige font de Ma vie de Kurde un livre d'aventure qui coupe le souffle... Dans cet excès de violence, qui demeure d'entière actualité, ne semblent jamais s'effacer en ce livre la tendresse et le goût des noisettes, des raisins et des figues.»

Bertil Galland
24 Heures


«Ce livre constitue une mine de renseignements sur la vie et la culture des Kurdes de Turquie, de Syrie et du Liban. Il possède une véritable valeur historique et ethnographique, tant sur les Kurdes que sur la mosaïque de peuples qui occupaient encore hier le Moyen-Orient.»

Marie Bousquet,
Jeune Afrique




Weqfa-Enstîtuya kurdî ya Parîsê © 2024
PIRTÛKXANE
Agahiyên bikêr
Agahiyên Hiqûqî
PROJE
Dîrok & agahî
Hevpar
LÎSTE
Mijar
Nivîskar
Weşan
Ziman
Kovar