La bibliothèque numérique kurde (BNK)
Retour au resultats
Imprimer cette page

Joyce Blau : l’éternelle chez les kurdes


Éditeur : FIKP Date & Lieu : 2013, Paris
Préface : Kendal NezanMultimediaPages : 310
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 135 x 210 mm
Code FIKP : Liv. Fre. Boz. Joy. N° 6212Thème : Général

Joyce Blau : l’éternelle chez les kurdes

Joyce Blau : l’éternelle chez les kurdes

Hamit Bozarslan,
Clemance Scalbert-Yucel

FIKP

Tu as connu plusieurs mondes, dans le temps et dans l’espace et j’ai entrevu, au cours de l’été 1956, entre la nationalisation du Canal et l’intervention anglo française, l’Egypte cosmopolite encore dans laquelle tu es née. Les minorités chrétiennes étaient encore là, à Alexandrie et au Caire. On lisait en ce temps-là, quand on était étranger, Lawrence Durrell et Constantin Cavafi. Des juifs avaient quitté le pays après 1949, vers l’Europe surtout. D’autres, qui se sentaient chez eux, étaient restés. J’en ai rencontré en 1965, tandis que je fréquentais les gens du Hadeto ...


Table des matières

Ptéface
Kendal Nezan, Institut kurde de Paris / 3
Joyce
Gérard Chaliand, géostratège / 11
Un récit de vie non autorisé,
Hamit Bozarslan, EHESS / 13
Connaissance et reconnaissance : quand naissait l’espoir d’une paix israélo-palestinienne
Sonia Dayan-Herzbrun, OTRP, Diderot-Paris 7 / 25
Etudiants “émigks” et activisme en Europe : le cas de la KSSE (1958-1975)
Jordi Tejel Gorgas, IHEID / 43
Traces ofthe Kurds and Kurdistan in Italy and Rome Mirella Gallettit,
Université de Bologne / 63
Kurdish elites and nationhood in Anatolia,
1890s-1938 Keith Hitchins, Univesity of Illinois / 81
From Benedict Anderson to Mustafa Kemal: Reading Writing and Imagining the Kurdish Nation,
Christine Alison, University of Exeter / 101
Wanderings in Adalar Sahilinde’
Amir Hassanpour, University of Toronto / 135
Literary Gurâni: Koinè or Continuum?
Philip G. Kreyenbroek & Behrooz Chamanara, Geroge-August Universitàt, Gottingent / 151
The Future oftbe Rurdish Language:
an Egalitarian Scénario
Michael L. Chyet, Ubraty of Congress / 169
Les lexicographes de la langue kurde : de la description lexicale a l’engagement militant,
Salih Akln, Université de Rouen / 181
Le médiatif en kurde-kurmandji : résurgence ou renouveau du système verbal ?
Ibrahim Seydo Aydogan, INALCO / 205
2012 aptès Jesus-Christ, le kurde 2.0 dans un mondepixelise
Rûjen Werdî, Institut kurde de Paris / 235
The Real Agonies and the Nostalgie Reliefs: A Reading of Sherzad Hassan’s Novels,
Hashem Ahmadzadeh, University of Exeter / 241
La littérature kurmanci de Turquie comme une littérature de tésistance,
Clémance Scalbert-Yücel, University of Exeter / 255
Kurds and the City
Martin van Brunessen, University of Utrecht / 273
A propos d’un concours international d’urbanisme à Diyarbakr en octobre 2011
Jean-François Pérouse, IFEA / 297


PREFACE

Doyenne des études kurdes en Europe, Joyce Blau a célébré en 2012 ses quatre-vingts ans, dans la grande discrétion et l’humilité exquise qu’on lui connaît, comme un événement privé, sans importance particulière.
Cependant, la nouvelle a fini par se répandre auprès de ses amis, ici et ailleurs, souvent incrédules. Le dynamisme, l’enthousiasme juvénile et la bonne humeur à toute épreuve de Joyce ont pu leur laisser croire que le temps n’avait guère de prise sur elle et que son horloge devait suivre un autre rythme, un autre tempo. Comment déjà quatre-vingts ans, ou bien quatrevingts ans ? s’interrogent certains d’entre eux.

La vie de Joyce est riche en engagements militants, en combats politiques, en amitiés nombreuses nouées au fil de ses activités de solidarité internationale et d’universitaire avec des hommes et des femmes de pays et de continents divers. L’écrivain Gilles Perrault dans son excellente enquête Un Homme à Part consacrée au militant internationaliste Henri Curiel avoue humblement que tout son art ne lui permettait pas de décrire vraiment Joyce.

A défaut d’une description du personnage ou d’un récit de vie,'un tant soit peu exhaustif, on peut affirmer que les Kurdes, depuis les années 1960 ont occupé une place prépondérante dans la vie professionnelle et amicale de Joyce. Après avoir été l’élève de l’un des plus illustres intellectuels kurdes du XXe siècle, l’émir Kamuran Bédir-Khan, à qui elle a succédé à l’INALCO, Joyce a connu presque toutes les personnalités politiques et culturelles kurdes majeures du dernier demi-siècle. Certaines, comme A.R. Ghassemlou, secrétaire général du PDK iranien et Mehmet Ali Aslan, président du Parti ouvrier de Turquie (TIP) l’ont assistée pendant leur exil parisien dans son enseignement de la langue et de la civilisation kurdes. D’autres, comme Sami Abdulrahman, Mahmoud Osman, Adnan Mufti, au Kurdistan irakien, le poète Hejar et son frère Dr. Sadegh Sharafkandi, successeur du Dr. Ghassemlou, au Kurdistan iranien, Leyla Zana et tant d’autres au Kurdistan de Turquie sont devenus ses proches amis, quasiment des membres de sa famille élective.

Puis, il y a l’autre grande famille, celle des kurdologues, ceux de Léningrad et de Moscou, à qui elle rendit visite et avec lesquels elle entretint des relations épistolaires suivies et fructueuses. Ceux aussi de l’Europe de l’Ouest et de l’Irak, qui n’étaient guère nombreux et qui armés de leur curiosité scientifique, main dénués de moyens, notamment de la possibilité d’accès au terrain, faisaient avec un admirable dévouement œuvre de pionniers.

Aussi étrange et choquant que cela puisse paraitre aux nouvelles générations, Joyce était, pendant longtemps, trop longtemps, la seule professeure spécialiste du kurde du monde occidental ! Ignorés dans le contexte de la guerre froide entre l’Est communiste et l’Ouest, les trente millions de Kurdes vivant au cœur d’une région aussi stratégique que le Proche-Orient, n’avaient pas trouvé plus de grâce aux yeux du monde académique occidental où les lobbies des turcologues et des arabisants avaient réussi à étouffer dans l’œuf toute initiative d’ouverture aux études kurdes. Même en France, pays ayant une certaine tradition de kurdologie en raison de son passé de puissance mandataire en Syrie, l’émir Bédir-Khan a dû enseigner gracieusement pendant dix-sept ans à l’iNALCO faisant passer l’intérêt scientifique et patriotique de l’enseignement de la langue kurde dans une institution française prestigieuse devant des considération pécuniaires ou obstructions administratives sur l’absence de poste disponible.

Dans les années 1980, les efforts déployés par l’Institut kurde pour faire recruter au CNRS quelques spécialistes de la société et de l’histoire kurdes n’ont pas abouti non plus. Il faut dire que cette vénérable institution comptait à l’époque, de nombreux chercheurs sur la Mésopotamie antique mais pas un sur l’Irak contemporain. Joyce a eu davantage de chance et bien sûr, des responsabilités accrues dont celle d’animatrice et de coordinatrice du petit cercle d’universitaires s’intéressant en Europe et aux États-Unis au monde kurde. Elle faisait la jonction entre l’école française formée dans les années 1930 autour des frères Bédir-Khan, comptant, entre autres, Roger Lescot, Pierre Rondot et Thomas Bois, et la jeune génération d’étudiants et de jeunes universitaires.

Sa politique consistant à accorder généreusement de bonnes notes aux étudiants suivant ses cours de civilisation kurde lui avait attiré de nombreux élèves du persan et de l’arabe dont certains sont devenus plus tard des diplomates et ont gardé au moins quelques solides notions sur l’histoire et la culture kurdes, qui leur furent fort utiles dans la suite de leur carrière et qui élargirent le cercle des Français kurdophiles.

Dans les années 1990, la question kurde a enfin pu sortir de la marginalité et s’internationaliser dans un nouveau contexte marqué par l’effondrement et la disparition du « camp socialiste ». L’événement marquant a été l’exode très médiatisé de quelques deux millions de Kurdes irakiens vers les frontières de l’Iran et de la Turquie, fuyant la répression massive des troupes de Saddam Hussein au lendemain d’une guerre du Golfe menée au nom du « droit international », sous l’œil indifférent des armées alliées du général Schwarzkopf, refusant d’intervenir sous prétexte de « non-ingérepce dans les affaires d’un État souverain » qu’elles venaient de vaincre. L’opinion publique occidentale, bouleversée par les images télévisées du calvaire kurde, a fini par obliger les Alliés à intervenir et à créer une zone de protection kurde qui a progressivement évolué vers un Kurdistan irakien autonome.

Dès lors, les institutions occidentales civiles et militaires, les ONG engagées dans des actions humanitaires au Kurdistan ont eu besoin de s’informer, de se documenter sur le monde kurde. Au-delà des ouvrages journalistiques de circonstance, le besoin d’une meilleure connaissance de la culture et de la société kurdes est devenu d’autant plus pressant qu’un pays allié de l’OTAN et candidat à l’entrée dans l’Europe communautaire, la Turquie, était également confrontée à une puissante dissidence politique et armée kurde. Par ailleurs, l’importante diaspora kurde, ses élites et ses institutions œuvraient en faveur d’une meilleure prise en compte de la question kurde tant dans la sphère politique qu’au sein des universités. De son côté, le gouvernement régional du Kurdistan a, à partir de 2005, décidé de donner une impulsion au développement des études kurdes dans les universités occidentales et à la formation de chercheurs kurdes en sciences humains.

Ces efforts vont consolider et amplifier ceux déployés par l’Institut kurde depuis trente ans pour la formation des élites intellectuelles kurdes et plus généralement pour le développement des études kurdes.
On commence à avoir un peu partout en Europe, en particulier en France, en Grade Bretagne, en Suède, en Allemagne et aux Pays Bas ainsi qu’aux Etats-Unis des chercheurs s’intéressant aux domaines variés des études kurdes. Langue, littérature orale, littérature écrite, musique, histoire, sociologie, diaspora, religion et vie politique kurdes deviennent des objets d’études de chercheurs dont certains engagent des approches multidisciplinaires et apportent des éclairages nouveaux, souvent inattendus, sur notre connaissance du monde kurde dans sa diversité et sa complexité.

Les Mélanges offerts à Joyce à l’occasion de son anniversaire dans ce volume sont bien représentatifs de cette riche et fertile diversité.
Elle y trouvera, bien sûr, ses sujets de prédilection : langue, grammaire, lexicographie, littérature kurde, avec les réflexions de Michael L. Chyet sur l’avenir du kurde qui, dans le débat sur l’adoption d’une langue unifiée et standardisée, propose un scénario de traitement égalitaire des deux principaux dialectes kurdes, le soranî et le kurmandji, alors que Philip G. Kreyenbroek et Behrooz Chamanara discutent de la question de savoir si un autre dialecte kurde, le gorani, qui donna lieu à une langue littéraire utilisée pendant plusieurs siècles dans les textes sacrés des Yarsanis et par les poètes de la principauté d’Ardalan au Kurdistan iranien, était une koiné ou un continuum des divers dialectes parlés dans cette région du Zagros. Un autre linguiste, Salih Akin, se livre à l’histoire de la lexicographie kurde en mettant en exergue l’engagement « militant » des lexicographes kurdes, tandis que son collègue Ibrahim Seydo Aydogan apporte un éclairage original sur une question jusqu’ici peu étudiée de la grammaire kurde, le médiatif en kurmandji. De son côté, Hashim Ahmadzadeh propose une lecture « naturaliste » des roman de Sherzad Hassan ; sa collègue d’Exeter, Clémence Scalbert-Yücel s’intéresse, quand à elle, à la littérature kurmandji de Turquie, « une littérature de résistance » œuvre d’intellectuels préoccupés par la survie de leur langue et soucieux de la transmettre aux générations futures.

Au chapitre de l’histoire, Joyce trouvera une étude de Jordi Tejel sur l’Association des étudiants kurdes en Europe (KSSE) dont les congrès annuels étaient de véritables « happenings » pour les jeunes intellectuels kurdes d’Europe et leurs amis européens, comme Joyce. Notre regrettée amie, Mirella Galletti, disparue en automne 2012, dans un essai érudit évoque les traces des Kurdes et du Kurdistan en Italie et à Rome tandis que de l’autre côté de l’Atiantique le professeur Keith Hitchins, doyen des amis universitaires de Joyce s’essaie à une analyse stimulante sur le rôle des élites dans la formation de la nation kurde, discute de la pertinence dans le cas kurde des théories de Gellner et de Hroch et suggère que la théorie d’Anthony Smith et des ethno-symbolistes historiques serait mieux à même d’expliquer le processus de formation de la nation kurde.

Dans le même esprit, Christine Allison qui réévalue à la lumière du « cas kurde » la théorie généralement acceptée de Bénédict Anderson sur « les liens cohérents entre discours, littérature et nationalisme », explique pourquoi ce schéma modulaire de « print-capitalisme » ne s’adapte pas au cas kurde et suggère de nouvelles pistes de réflexion.

Cependant, l’idée du nationalisme, de nation comme forme d’organisation des sociétés humaines semble à l’heure d’internet et de l’érosion des frontières « dépassée » voir « antique » pour Amir Hassanpour qui de son exil de Canada enquête sur les tribulations d’une chanson « kurde » qui lui avait donné les toutes premières émotions artistiques de son enfance à Mahabad, découvre qu’à l’origine c’était une mélodie en vogue à Istanbul avec des versions en grec, en arabe, en arménien, etc. et ironise sur les nationalistes de chaque camp qui s’étripent pour en revendiquer la paternité. Qu’une mélodie puisse, au delà des clivages linguistiques et religieux, émouvoir à peu près tous les peuples de l’aire ottomane signifie, certes, que la musique ne connait pas de frontières mais aussi que celles, souvent artificielles et tardives, de la politique ne sauraient oblitérer les échanges culturels et les liens noués depuis des siècles entre les peuples voisins. Voilà qui ne déplairait pas à Joyce l’internationaliste.

En fait, historiquement, ces échanges ont surtout eu lieu dans les villes qui, comme le disait le père du nationalisme turc Ziya Gökalp, sociologue d’origine kurde, « n’ont pas de nationalité » dans la mesure où elles mélangent des populations d’origines diverses et en font des citadins, Çehirli. Les ruraux, très largement majoritaires au Kurdistan jusqu’aux années 1960, ne connaissaient souvent que leur propre langue et leur propre culture et éventuellement quelques bribes de la culture de leurs voisins chrétiens ou juifs. Mais on ne saurait réduire la culture kurde à sa composante rurale. De tous temps il y a eu une civilisation urbaine kurde et certaines des plus anciennes villes du Proche Orient (Erbil, Diyarbekir, Urfa-Edesse) sont situées au Kurdistan. Aujourd’hui la grande majorité des Kurdes vit dans les villes.

Martin van Bruinesen, qui connait bien le Moyen Age kurde, analyse dans sa contribution « Kurds and the City » l’évolution de ces villes historiquement cosmopolites et multiconfessionnelles vers des centres urbains à très forte domination kurde à la suite de l’urbanisation massive des dernières décennies. Celle-ci pose d’ailleurs de sérieux problèmes d’urbanisme que les municipalités kurdes tentent de maitriser de leur mieux, y compris en faisant appel aux concours d’experts européens comme en témoigne Jean-François Pérouse qui a été membre du jury d’un concours international d’urbanisme organisé en 2011 par la mairie de Diyarbekir dont il propose un compte-rendu.

L’urbanisation va de pair avec l’accès à l’école, l’ouverture sur le monde, facilitée par l’évolution récente des technologies d’information et de communication. Rusen Werdî évoque avec humour les perspectives extraordinaires qu’ouvrent à l’expression de la langue et de la culture kurdes l’avènement d’Internet qui bat en brèche les frontières et les velléités de censure des États se partageant le Kurdistan.

Dans sa traversée du siècle Joyce a eu la chance d’assister à l’accélération de l’histoire et à « l’abolition de la distance » grâce à l’Internet. Le monde de son enfance n’est plus. L’Égypte cosmopolite que Gérard Chaliand évoque dans son témoignage, s’est appauvrie tout comme la Turquie, l’Irak et tant d’autres pays où un nationalisme intolérant a vidé de sa substance sa diversité culturelle et confessionnelle. Hamit Bozarslan qui a été l’initiateur et le coordinateur de ces Mélanges retrace avec brio les dates marquantes de ce récit d’une vie peu commune. Une vie dont les espérances d’un monde plus solidaire, plus humaine, plus libre n’ont pas toujours été exaucées mais certains combats ont bien abouti.

Ainsi, l’Algérie pour laquelle Joyce a été si passionnément engagée aux côtés de son ami Henri Curiel, qui a profondément marqué sa vie, est devenue indépendante. La lutte contre l’apartheid qui a tant mobilisé leur réseau de solidarité a été couronné de succès. Le peuple kurde, après des décennies de persécutions, a pu enfin accéder à la liberté pour le moins au Kurdistan irakien et ailleurs son avenir semble plus prometteur.

Last but not least, son Egypte a pu se débarrasser de son dernier pharaon ! Il reste la question palestinienne si chère à son cœur, encore en attente d’un règlement global et définitif. Mais depuis les tout premières tentatives de dialogue israélo-palestinien initié par Henri Curiel, assisté de Joyce, comme le rappelle la contribution à ces Mélanges de Sonia Dayan-Herzburn, il y a eu des avancées réelles avec l’existence d’une Autorité palestinienne gouvernant une partie des territoires et la reconnaissance par l’ONU d’un Etat palestinien.

Le succès ultime de ce combat, tout comme celui de l’émancipation du Kurdistan, semble être une question de temps. Il faut persévérer, résister au temps et continuer d’espérer. Le combat de Joyce a donc encore de longues années devant lui. Si certains de ses compagnons de lutte ne sont plus là physiquement, d’autres, avec leur propre vision du monde, leurs espoirs et leurs aspirations ont pris leur relève dans le domaine académique, comme l’illustre ce savoureux recueil, comme dans celui du combat politique, appelé par sa nature même a être renouvelé et redéfini à chaque génération.

Kendal Nezan

Joyce

Tu as connu plusieurs mondes, dans le temps et dans l’espace et j’ai entrevu, au cours de l’été 1956, entre la nationalisation du Canal et l’intervention anglo française, l’Egypte cosmopolite encore dans laquelle tu es née. Les minorités chrétiennes étaient encore là, à Alexandrie et au Caire. On lisait en ce temps-là, quand on était étranger, Lawrence Durrell et Constantin Cavafi. Des juifs avaient quitté le pays après 1949, vers l’Europe surtout. D’autres, qui se sentaient chez eux, étaient restés. J’en ai rencontré en 1965, tandis que je fréquentais les gens du Hadeto créé par Henri Curiel.

Tu es issue de ce monde là, me semble-t-il. Ces hommes et ces femmes qui avaient épousé l’idée révolutionnaire, opposés aux régimes conservateurs ou tyranniques. Tu étais de ceux qui se sentaient du côté des masses ouvrières ou paysannes et qui regardaient vers l’étoile de la révolution mondiale.

Cette étoile qui a suscité tant d’enthousiasme puisque tant de gens ont consenti à mourir pour elle et tant de déception pour tant de ceux qui l’avaient suivie, les yeux au ciel.

Mais comme Henri Curiel, tu n’étais pas de ceux ou de celles qui renoncent aisément.
Tu es de cette génération où l’on s’appelait camarade, au-delà des patriotismes locaux.

…..


Hamit Bozarslan

Clemance Scalbert-Yucel

Joyce Blau : l’éternelle chez les kurdes

FIKP

Fondation Enstitut Kurde de Paris
Joyce Blau : l’éternelle chez les kurdes
Coordinateurs
Hamit Bozarslan
Clemance Scalbert-Yucel

© Institut Kurde de Paris
106, rue La Fayette, F-75010 Paris
Mises-en-page & conception :
S. Ilitch / H. Bozarslan
Première de couverture : Joyce Blau, 1995
www.institutkurde.org

Copymédia Imprim'vert
Achevé d'imprimer en février 2013
Par www.copy-media.net
CS 20023 - 33693 Mérignac Cedex

PDF
Téléchargement de document non-autorisé.


Fondation-Institut kurde de Paris © 2025
BIBLIOTHEQUE
Informations pratiques
Informations légales
PROJET
Historique
Partenaires
LISTE
Thèmes
Auteurs
Éditeurs
Langues
Revues