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Contribution à l'histoire du Kurdistan de Mokri


Auteur :
Éditeur : EPHE Date & Lieu : 1996-01-01, Paris
Préface : Pages : 104
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 210 x 295mm
Code FIKP : Liv. Fre. Yam. Kon. N° 3698Thème : Thèses

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Contribution à l'histoire du Kurdistan de Mokri

Contribution à l'histoire du Kurdistan de Mokri

Yamaguchi Akihiko

EPHE

Le présent ouvrage se propose en premier lieu de rétablir et d’évaluer l’intérêt historique d’un manuscrit persan inédit sur une tribu kurde, les Mokri, et plus précisément, sur la famille régnante dans cette tribu, Bâbâmiri, qui dirigea le Kurdistan de Mokri entre XVe siècle et XIXe siècle. Après avoir situé le manuscrit dans le cadre de l’évolution historique de la tribu et de sa région, on signalera certains problèmes qui se posent sur les relations socio-politiques au Kurdistan de Mokri et sur leurs ...



AVANT-PROPOS

Il y a quelques années, j’ai publié un article sur le mouvement nationaliste kurde qui se déroula pendant la Seconde Guerre Mondiale au nord-ouest de l’Iran¹. Ce mouvement se développa très vite, favorisé par la situation politico-sociale confuse après l’invasion des armées anglaise et soviétique en Iran en août 1941. Et, peu après la guerre, il aboutit à l’établissement d’un éphémère gouvernement autonome sous la protection de l’armée rouge qui occupait le nord de l’Iran. Dans cet article, j’ai tenté de mettre en lumière certains caractéristiques de ce mouvement, en mettant en regard deux partis politiques, Komele-y Jiyanawe-y Kurdistan (Comité de la renaissance du Kurdistan, fondé en 1942, JK) et Hizb-i Demokratik-i Kurdistan (Parti démocratique du Kurdistan, fondé en 1945, HDK) qui apparurent successivement au cours de l’événement, et surtout, en examinant les causes pour lesquelles, malgré sa grande influence sur le peuple, JK devait être remplacé par HDK juste après la fin de la guerre.

La conclusion générale de l’article porte sur les différents objectifs politiques du JK et du HDK. Le JK visait l’élévation du niveau culturel du peuple tout en luttant contre le tribalisme, qui était, selon lui, le problème majeur de “la nation kurde” ; cela en écartant toute idée de révolte militaire. Le JK a aussi exclu de son cadre les élites sociales (les chefs des tribus et dirigeants religieux) de peur qu’ils n’exercent une influence sur les membres du parti. Mais vers la fin de la guerre, même le JK commença à avoir besoin de la force armée qui permettrait au mouvement de résister à l’attaque de l’armée iranienne. C’est pour cela, au sein du parti s’est produite une tendance qui compta sur l’aide militaire soviétique et qui recourut au leadership de Qazi Mohammad, cadi de Mahâbâd, dont le charisme était connu auprès les chefs de tribus. Mais cette tendance était essentiellement incompatible avec la ligne fondamentale du JK et a privé graduellement ce parti de sa raison d’être. Ainsi, le HDK se substitua au JK en tant que “parti démocratique”, il tenta de rallier d’abord les élites sociales sous sa bannière, en s’appuyant sur l’autorité personnelle de Qazi Mohammad.

Au moment de sa rédaction, je ne disposais pas suffisamment de matériaux et documents concernant les relations socio-politiques de la région en question, particulièrement sur les groupes sociaux telles que les tribus et les religieux qui ont joué un rôle capital dans le mouvement. Cette déficience m’a conduit à retracer aussi bien l’histoire événementielle de la région que les évolutions des rapports sociaux locaux.

Par ailleurs, étant donné la tendance séparatiste du mouvement, il est important de savoir comment la région qu’on appelle ici Kurdistan de Mokri’, s’intégra dans l’état iranien. Autrement dit, quelles relations eut-elle avec les dynasties précédentes qui ont tracé le cadre géographique à l’Iran actuel.

Mais jusqu’ici à de rares exceptions près², peu d’études historiques sur le Kurdistan de Mokri ont été faites. En dépit de quelques travaux sur le sujet, les matériaux historiques découverts restent insuffisants pour brosser l’histoire de cette région.

Dans ce présent travail je traiterai d’un manuscrit persan inédit. Il me servira de fil conducteur pour dégager une problématique en matière d’histoire du Kurdistan de Mokri. Ce manuscrit est dédié à la famille dominante de la tribu Mokri, Bâbâmiri, qui régna sur le Kurdistan de Mokri entre XVe siècle et le XIXe siècle, et porte sur un conflit qui eut lieu au milieu du XIXe siècle. Assez court, ce document lui-même ne nous apprend pas grand-chose. Toujours est-il qu’en ramassant des informations fragmentaires sur cette tribu qui sont souvent dispersées dans des chroniques persanes et dans des rapports de voyage européens, nous pourrons reconstituer partiellement l’histoire des Mokri jusqu’au XIXe siècle. La confrontation de l’histoire ainsi reconstituée avec le manuscrit, nous fera connaître les difficultés qui se posent autour de l’histoire du Kurdistan de Mokri. Voilà le but fondamental de ce présent travail.

Quant aux sources utilisées ici, ce sont principalement des chroniques persanes et des récits de voyage européens. L’élaboration de ce mémoire s’appuie sur la consultation d’une partie des documents disponibles et nécessaires relatifs à ce sujet et j’espère les avoir suffisamment mis en œuvre. Lors de la rédaction de ma thèse, je compléterai ce travail préliminaire par la consultation de nombreux autres documents, notamment des archives diplomatiques européennes, des rapports abondants des missions chrétiennes installées près d’Orumie, des registres des fondations pieuses.

Pour le présent mémoire, je voudrais remercier, en premier lieu, Monsieur Jean Calmard, historien érudit dans le domaine de l’Iran, qui m’a continuellement encouragé et soutenu tout le long de la préparation du mémoire, même durant les moments d’incertitude de mes recherches. Ses précieux conseils sur l’histoire de l’Iran ont éclairé mon étude.
Je voudrais remercier en deuxième lieu Madame Homâ Nâteq, éminente érudite de l’histoire et de la littérature de l’Iran, qui m’a beaucoup aidé à déchiffrer le manuscrit que je présenterai ici.

Je tiens à remercier également plusieurs amis (Oliver Bast, Chirine Mohseni, Yamanaka Yuriko, Kondo Nobuaki) qui ont contribué à l’avance de mes recherches.
Je voudrais manifester en dernier lieu toute ma gratitude à mes anciens directeurs de recherches du Japon, tout particulièrement Messieurs Itagaki et Yamauchi pour leur analyse sur l’histoire contemporaine du Moyen-Orient, et Monsieur Haneda concernant l’histoire de l’Iran médiéval.

1 Yamaguchi (1994)
2 Il n’est pas facile de définir d’une manière rigoureuse l’étendue du Kurdistan de Mokri qui évolue suivant les époques. Ici nous nous intéressons à la province de Mahâbâd, bien qu’elle ne corresponde pas toujours aux territoires qui avaient été occupés par les Mokri.
3 Par exemple, Bruinessen (1981)

Introductıon

Le présent ouvrage se propose en premier lieu de rétablir et d’évaluer l’intérêt historique d’un manuscrit persan inédit sur une tribu kurde, les Mokri, et plus précisément, sur la famille régnante dans cette tribu, Bâbâmiri, qui dirigea le Kurdistan de Mokri entre XVe siècle et XIXe siècle. Après avoir situé le manuscrit dans le cadre de l’évolution historique de la tribu et de sa région, on signalera certains problèmes qui se posent sur les relations socio-politiques au Kurdistan de Mokri et sur leurs transformations à l’époque qâjâr.

Dans la première partie, nous esquissons l’histoire de la tribu des Mokri et du Kurdistan de Mokri, et principalement ses origines, ses rapports avec les Ottomans, les dynasties iraniennes ainsi qu’avec d’autres tribus kurdes de la région. Ensuite, nous retraçons l’événement dont parle le manuscrit. En conclusion, nous faisons la synthèse de la problématique concernant l’histoire du Kurdistan de Mokri.

La deuxième partie contient le texte édité, la transcription en latin, la traduction en français et les fac-similés de l’original. À la fin du mémoire se trouvent la bibliographie, les généalogies de certains notables du Kurdistan, et des cartes.
Voici quelques données sur notre manuscrit.

Le manuscrit en question est conservé à présent à la Bibliothèque d’Etat à Berlin. Il a été acquis en juin 1903 par Oskar Mann, orientaliste allemand, qui résidait alors à Sâvjbolâg afin de collecter des légendes et des contes oraux des Mokri. Et c’est son informateur kurde nommé Mirzâ Mohammad Javâd qui lui a fourni ce document dont nous disposons¹. Ce dernier est aussi l’auteur d’un autre …

1 Heinz (1968), p.288 ; Fuad (1970), p.138 ; c’est ce que dit Mann dans son ouvrage qui est d’ailleurs le fruit de ses recherches à Sâvjbolâg, Mirzâ Javâd, issu de la famille de cadi de cette ville, était un grand connaisseur de l’arabe et des études coraniques. Mann (1906), XXVI ; pour la famille de cadi à Sâvjbolâg, voir infra.




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