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Le Système Verbal dans la Langue Kurde


Auteur :
Éditeur : Université de Paris VII Date & Lieu : 1981-01-01, Ahmed Hasan
Préface : Pages : 154
Traduction : ISBN :
Langue : FrançaisFormat : 215 x 295mm
Code FIKP : Liv. Fre. Gen. Has. Sys. N° 1214Thème : Thèses

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Le Système Verbal dans la Langue Kurde

Le Système Verbal dans la Langue Kurde

Ahmed Hasan

Université de Paris VII

Le verbe "bûn" est considéré dans la langue kurde comme le verbe le plus important car c'est le verbe principal servant de base à la plupart des autres verbes. Autrement dit, sans la connaissance du rôle du verbe "bûn", de sa conjugaison et de son utilisation, aucun autre verbe ne peut fonctionner ni se conjuguer. Si l'on connaît bien le verbe "bûn" dans le sens "être", la compréhension des autres groupes de verbes sera plus aisée.
Le verbe "bûn" a également trois fonctions et trois sens différents ...



INTRODUCTION

La langue de n’importe quel peuple, est l'un des éléments les plus importants pour celui-ci. C'est par la langue qu'un peuple communique dans différents buts et qu'il s'exprime de même, c’est par elle qu'on connaît la richesse culturelle et la littérature d'un peuple. De plus la langue est l'un des éléments qui identifie un peuple et son » origine, et définit à quel groupe il appartient. La langue est donc de première importance pour un peuple.
Les Kurdes sont sans doute l'un des peuples les plus anciens de l’Asie Mineure. Le nom du peuple kurde a été cité pour la première fois dans les notes de Xénophon. Les "Kardouchoi" dont parle Xénophon pendant la fameuse retraite (401 - 400 av. J.C.) de ses troupes composées de dix mille soldats à travers le Kurdistan actuel, n'étaient que des Kurdes. Montagnards, habitants du même pays, très braves et ayant un nom semblable, tous ces éléments font croire à la plupart des historiens que les "Kurdouchoi" dont parle Xénophon étaient les Kurdes d'aujourd'hui.

Dans l'histoire, les Kurdes ont créé des empires, comme l'empire « Mède de l'antiquité, et le prince Saladin, qui a réalisé l'unité du monde islamique face aux croisés, était kurde.
Le Kurdistan actuel, situé en plein cœur de l'Asie Mineure s'est trouvé, après la première guerre mondiale, partagé entre quatre pays : l'Irak, la Turquie, l'Iran, la Syrie et l'URSS (où vivent environ 500 000 Kurdes). Le Kurdistan a une superficie d’environ 500 000 km2 et une population d'environ 20 millions d ’habitants.
Dans sa thèse sur les Kurdes, Minsky soutient leur origine indo-européenne, ceux-ci s'étant probablement déplacés au VII-é siècle avant J.C. de la région du lac d'Aurmien vers le Botân. La langue kurde issue de la famille iranienne des langues indo- européennes n'a aucun rapport à l'origine, avec la langue turque, qui est ouralo-altaïque, ou la langue arabe qui est une langue sémitique. Il est utile de citer quelques phrases de Nikitine sur ce point : iNikitine a écrit dans son livre "Les Kurdes" : "Cependant les Kurdes, tout au moins maintenant, parlent une langue qui est indiscutablement iranienne, donc indo-européenne."(1) Il a écrit plus loin :

"Malgré sa division en plusieurs dialectes, cette langue kurde présente une grande stabilité de caractéristiques et appartient sans doute au groupe Kord-Ouest des langues iraniennes. Les divergences qu'on constate entre le Kurde et le Persan se trouvent dans tous les dialectes. »(2)
La langue kurde, qui n'a pas été l'objet de recherches et d'études, était cependant écrite depuis le Vll-é siècle de notre ère, ainsi Ehmedê Xanê a terminé le "Mem û zîn"(3) en 1691.
La langue Kurde comprend deux principaux groupes dialectaux
1— Le "Kurmancî Sero" qui est utilisé par les kurdes "Badinan"(4),au nord-ouest du Kurdistan irakien, les Kurdes du Kurdistan de Syrie et de Turquie, et les Kurdes des régions du nord du Kurdistan iranien.
2- Le "Kurmancî Xaro" connu sous le nom"Soranî" qui est utilisé par une bonne moitié des Kurdes du nord-est du Kurdistan irakien, et environ deux tiers des Kurdes du Kurdistan iranien. Lais en plus de ces deux groupes il existe des dialectes régionaux. (Voir les cartes P. 142-148)

Il y a deux grandes différences entre ces deux groupes dialectaux, le dialecte "Kurmancî Sero" a deux groupes de pronoms qui sont utilisés selon les verbes, transitifs ou intransitifs et aussi le temps du verbe : le présent, le futur ou le passé. Tandis que le "Kurmancî Xaro" ne possède qu'un seul groupe de pronoms pour tous les cas. La deuxième différence est que le premier dialecte groupe comporte le masculin et féminin tandis que le deuxième dialecte ne connaît pas cette différence de genre.
Le sujet de cette thèse est le système verbal du dialecte "Kurmancî Sero" en général et particulièrement dans la région de Badinan au Kurdistan irakien.
Les frontières imposées après la première guerre mondiale n'ont pas seulement divisé le peuple kurde en cinq pays mais ont aussi divisé les Kurdes parlant le même dialecte "Kurmancî Sero" ou "Kurmancî Xaro" en plusieurs pays. Le manque de communications et la localisation linguistique au Kurdistan sont dûs à son partage en quatre pays. L'usage exclusif de d'arabe, du turc et du persan, prohibant celui du kurde, a d'autant plus renforcé l'influence de ces pays sur chaque partie du Kurdistan et en particulier dans les régions homogènes. Cependant le peuple Kurde est l'un de ceux qui ont gardé la pureté de leur langue. Malgré les frontières imposées, un Kurde du Kurdistan iranien, par exemple, rencontre peu de difficultés à communiquer avec un Kurde d’une autre partie du Kurdistan, surtout s'ils parlent le même dialecte. La meilleure preuve qu'on peut en donner, est le fait que les étudiants kurdes en Europe (seul lieu de rencontre pour les Kurdes du grand Kurdistan) travaillent dans les mêmes organisations estudiantines sans éprouver des grandes difficultés linguistiques.

Ma thèse sur le système verbal de la langue Kurde dialecte "Kurmancî Sero" ne couvre pas tous les problèmes qui concernent les verbes, car un tel travail demanderait de longues études et recherches.
Ce travail concerne plutôt l'utilisation du verbe sous ses différentes formes et les régies qu'on peut tirer de ses utilisations : j'ai utilisé les formes du verbe de la façon dont les Kurdes s'en servent dans leur vie quotidienne, et j'ai essayé, ensuite, de trouver les régies et les emplois du verbe.
J'ai éprouvé beaucoup de difficultés à écrire cette thèse.
En premier lieu, il n'y a pas des livres sur ce sujet et s'il y en a c'est sur la langue Kurde prise dans son ensemble et la partie consacre au verbe ne forme qu'un seul chapitre. En second lieu il n'y a pas de spécialistes de la langue Kurde en Europe, qui connaissent suffisamment la langue et qui puissent résoudre les problèmes linguistiques. Il y en a davantage en URSS mais les ouvrages de ces spécialistes ont été rédigés en Russe et peu d'études ont été traduites en d'autres langues, ils ne sont donc d’aucune utilité pour moi.

J'ai divisé ma thèse en six parties : le verbe "Bûn", le verbe "hebûn", avoir et les quatre groupes de verbes qui se terminent par "in" comme "ketin", "în" comme "kirîn", "an" comme "razan" et "ûn" comme "çûn". Je les ai divisés en quatre parties selon leur terminaison', car tous les verbes en Kurde se terminent par l'une de ces terminaisons. Celles-ci disparaissent dans la plupart des conjugaisons sauf dans quelques-unes qui gardent la voyelle désinentielle au passé.
Le verbe "bûn" est le verbe principal dans la langue Kurde, ce verbe a une grande influence sur le système verbal de la langue Kurde. Il est plus important pour cette langue que le verbe "être" pour la langue française ou le verbe "to be" pour langue anglaise, car aucun verbe ne peut se conjuguer sans l'influence du verbe "Bün".

On remarque que les terminaisons des verbes sont celles du verbe "Bûn" aussi bien au présent qu'au passé.
Le mélange du verbe "bûn" et "hebûn" à la forme négative, qui prennent les mêmes formes mais donnent des sens différents, le sens du verbe "être" et "avoir" était et est l'une des difficultés que j'ai rencontrées dans ma thèse et je n'ai pas pu découvrir les raisons de ce mélange. La conjugaison irrégulière du groupe "in" au présent et au futur était aussi un autre problème. Il y a un grand changement d'orthographe au niveau de la conjugaison de ces verbes.
Des lettres disparaissent et d'autres les remplacent sans que l'on, sache d'où ces lettres viennent, ou quelle est leur origine. L'absence d'explication et de régie en ce qui concerne la conjugaison du présent et du futur, pose sûrement trop de difficultés pour les étrangers qui veulent, soit étudier, soit faire une recherche sur la langue kurde. Cependant cela n'en pose pas pour les Kurdes car la conjugaison vient naturellement.

J’étais personnellement très tenté par un travail de recherche sur la langue Kurde dialecte "Kurmancî Sero", mais il y a d'autres raisons qui ont joué un rôle décisif pour écrire cette thèse. Tout d'abord la langue Kurde est, sans doute, l'une des langues les plus riches de la région, mais elle n'a pas été beaucoup étudiée par les Kurdes, et n'a pas eu la chance, comme d'autres langues de faire l'objet d'une étude ou d'être l'objet de recherches linguistiques sous chacun de ses aspects. Cette négligence vis-à-vis de la langue Kurde n'est pas sans rapport avec les raisons politiques car l'évolution d'une langue est liée à la liberté et au développement d'un peuple dans tous les domaines, en premier lieu la liberté politique. Puisque les Kurdes, qui sont environ 20 millions aujourd'hui, ont été partagés après la première mondiale entre quatre pays différents, où ils constituent à présent les minorités de ces pays dont les régimes chauvins ont tout fait pour supprimer non seulement la langue, la culture et la littérature kurde mais aussi l'identité du peuple. En Turquie (où vivent environ 10 millions de Kurdes) le régime turc ne reconnaît même pas l'identité kurde, il les appelle "Les Turcs de la montagne". En Iran les Perses chauvins prétendent que la langue Kurde est un dialecte de la langue Persane. C'est exactement comme si on disait " l'Espagnol est un dialecte de la langue Français la situation n'est pas meilleure en Irak ou en Syrie si ce n'est pire.

Deuxièmement la plupart des livres que j'ai vus jusqu'à présent sont écrits par des étrangers qui ont visité ou passé quelque temps au Kurdistan, comme fonctionnaire, militaire, etc..., et qui ont écrit des livres sur la langue ou la littérature kurde, et non pas les Kurdes eux-mêmes. Il y a de bonnes raisons qui font que les Kurdes eux-mêmes n'ont pas écrit à propos de leur langue et de leur littérature : ce sont des raisons politiques avant tout. Ils (les intellectuels) risquent leur vie, des dizaines de poètes et écrivains kurdes ont été emprisonnés pour leurs écrits et leur poésies révolutionnaires. D'autre part, la situation économique ne permet pas aux intellectuels kurdes d'écrire sur leur langue, ainsi un étudiant kurde pour des raisons économiques préféré étudier l'autres langues (l'arabe, le turc, et le persan) car cela lui permet de vivre.
En fin j'ai écrit cette thèse sur le système verbal en restant fidèle au parler kurde, et à son expression écrite, en espérant que cela aidera quelqu'un d'autre à écrire une étude plus approfondie et plus détaillée, car c'est une langue qui nécessite des études et des recherches.

(1) Nikitine, B., "Les Kurdes", édition d'Aujourd’hui 195b, P.6.
(2) ibid., P. 9.
(3) I.E. Aürbîli a écrit à propos d'Ehmedê Xanê :
"Lorsqu'on dit que le poète doit être proche, à travers ses écrits, de son peuple et de l'humanité, on ne peut pas, sans doute, ignorer les trois grands poètes du Proche-Orient qui sont : "Firdewsi, Sotà Rustaveli et Enmedê Xanê" ce dernier dont l'œuvre la plus illustre est "Mam û Zîn".
Ehmedê Xanê est né en 1650, on connaît très mal sa vie, mais il est connu par son œuvre "Mam û Zîn", il est mort en 1707.
(4) Badinan était la royauté dans la région du nord-ouest du Kurdistan d'Irak dont la capitale était "Amêdiyê".

Chapitre I

Le Verbe "Bûn"

Le verbe "bûn" est considéré dans la langue kurde comme le verbe le plus important car c'est le verbe principal servant de base à la plupart des autres verbes. Autrement dit, sans la connaissance du rôle du verbe "bûn", de sa conjugaison et de son utilisation, aucun autre verbe ne peut fonctionner ni se conjuguer. Si l'on connaît bien le verbe "bûn" dans le sens "être", la compréhension des autres groupes de verbes sera plus aisée.
Le verbe "bûn" a également trois fonctions et trois sens différents :
1, le verbe "bûn" signifiant "être"
2. le verbe "bûn" signifiant "devenir"
3. le verbe "bûn" signifiant "naître"

"Bûn" : "Être"

L'indicatif
A. Le présent

Le verbe "bûn" dans les deux premiers sens se conjugue avec le groupe "ez" du pronom, le verbe Hebûn" i "être" prend alors les formes suivantes au présent ;
Ez Kurd im (je Kurde suis)
Tu Kurd î (tu Kurde es)
Ew Kurd e (il Kurde est) elle
Em Kurd în (nous Kurd sommes)
Hîn Kurd in (vous Kurde êtes)
Ew Kurd in (xils Kurde sont)
Elles
…..




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