LE NATIONALISME KURDE FACE AUX ETATS-NATIONS
Cet ouvrage est le premier à rassembler des documents d’archives diplomatiques françaises sur les Kurdes sur une période comprise de la fin du XIXème siècle au milieu du XXème siècle. Nous avons mis en valeur des textes rédigés entre 1874 à 1945, pour leur quasi totalité inédits, émanant de la diplomatie française en les plaçant dans leurs contextes. En faisant appel à d’autres études déjà publiées, cette présentation éclaire ces documents riches de nouveaux éléments qui approfondissent la connaissance sur les Kurdes et le mouvement national kurde.
L’émergence du nationalisme kurde du XIXème siècle jusqu’à la deuxième guerre mondiale gagne ainsi à être comprise plus finement. En cela, ces documents fournissent une clé pour comprendre la question kurde au XXIème siècle, à savoir des processus qui traversent les Etats-nations du Moyen-Orient depuis plus d’un siècle.
Les Kurdes dans les archives
Ce travail est le fruit d’une recherche qui se distingue des études précédemment publiées en ce qu’il apporte une connaissance des Kurdes telle que contenue dans les sources diplomatiques de l’Etat français, qui faisait jusque-là défaut. Des auteurs, parmi lesquels Ahmet Kardam1, dans son livre sur l’Emir Bederkhan bey (1802-1866) déplorait lui-même de ne pas avoir pu consulter les archives du ministère des Affaires étrangères de la France, l’une des plus grandes puissances mondiales de l’époque avec l’Angleterre. Le présent ouvrage comble ainsi un vide dans la recherche sur la question kurde du début du XXème siècle et permet également de prendre connaissance de faits jusque-là méconnus de tous. Il offre le moyen d’éclairer sous de nouveaux angles des points de l’histoire des Kurdes que l’on croyait acquis.
L’intérêt qu’offre la publication de ces documents produits – ou collectés –par la diplomatie française tient aussi à l’étendue des questions soulevées dans un espace-temps qui précède l’avènement des Etats-nations en Turquie, en Syrie, en Irak et en Iran. L’analyse de ces documents préserve le chercheur des découpages du mouvement kurde en autant de parties – turque, syrienne, iranienne, irakienne – qu’il y a aujourd’hui d’Etats-nations concernés. Il permet d’appréhender la question kurde dans toute sa complexité sur un large territoire que les Kurdes revendiquent en tant que Kurdistan. Dégagée d’une vue qui serait enfermée dans les frontières des Etats-nations, l’analyse du mouvement kurde peut alors se faire dans un cadre régional plus large. L’étude
1 Ahmet Kardam, Cizre-Bohtan Beyi Bedirhan. Direniş ve isyan yillari [Le bey de Cizre-Bohtan Bedirhan. Les années de résistance et de révoltes], Ankara, Dipnot Yayinlari, 2011, p. 17. |